Le son du grisli

Bruits qui changent de l'ordinaire


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Archives des interviews du son du grisli

Antoine Prum : Taking the Dog for a Walk (Ni Vu Ni Connu, 2015)

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Après avoir fait entendre tout l’amour qu’il porte à l’improvisation britannique (Just Not Cricket), Antoine Prum s’est attaché à la montrer en plus. Avec l’aide de Tony Bevan et du comédien – et grand amateur d’improvisation – Stewart Lee, le (déjà) réalisateur de Sunny’s Time Now présentait récemment Taking the Dog for a Walk.

Parti de la scène du Café Oto – haut lieu de l’improvisation actuelle –, Prum instaure un code amusé du musicien-samouraï avant de retracer l’histoire de l’activité qui l’enchante depuis les premières expériences du Little Theatre Club – venus pour l’essentiel du free jazz, les musiciens s’en détacheront au profit d’un jeu autrement collectif que les personnalités qui composent AMM et celles de John Stevens, Trevor Watts, Derek Bailey… se chargeront de diversifier.  

Après quoi (dans le documentaire et en intégralité sur un second DVD), sont recueillis les témoignages de personnages : Lol Coxhill, Eddie Prévost, Phil Minton, Roger Turner, Steve Beresford, John Butcher, Maggie Nicols… La parole libère autant de précisions qu’elle dresse de constats : sur l’éternel refus de tout répertoire et l'insatiable intérêt pour les sons nouveaux (qu’illustre ici un extrait de concert donné par AMM en compagnie de Rhodri Davies), sur le rapport de la pratique à l’entertainment (Coxhill) et au public (Karen Brockman) ou encore la nostalgie commandée par un âge d’or à l’ombre duquel s’assoupit parfois le quotidien (Bevan, John Edwards aussi : « maintenant, c’est facile »)…

Facilité que de plus jeunes improvisateurs devront contourner, voire refuser, s’ils veulent renouveler un genre qui n’en est pas un : Gail Brand, Dominic Lash, ou encore Alex Ward, que l’on retrouve sur un CD enfermé lui aussi dans la boîte jaune de Taking the Dog for a Walk. Sur celui-ci, c’est N.E.W. enregistré au Café Oto le 17 janvier 2012. N.E.W., qui donne de nouvelles teintes à l’improvisation et clame même que l’espoir est permis. Non pas celui d’un simple renouvellement ou d’une mise à jour fétiche, mais bien celui de nouvelles choses à attendre de l’improvisation britannique.  

Antoine Prum : Taking the Dog for a Walk. Conversations with British Improvisers (Ni Vu Ni Connu / Improjazz)
Edition : 2015.
2 DVD + CD : Taking the Dog for a Walk.
Guillaume Belhomme © Le son du grisli

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London Jazz Composers Orchestra : Harmos (Intakt, 2012)

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Des contours flous et quel autre effet détachent étrangement la musique de l’image dans cette captation d’Harmos du London Jazz Composers Orchestra, donné en 2008 au festival de jazz de Schaffhausen.

Qu’importe. Le temps pour Barry Guy de présenter la pièce – enregistrée déjà en 1989 pour Intakt – et de la dédier à Paul Rutherford, disparu quelques mois plus tôt, et voici trois trombones (Conny Bauer, Johannes Bauer, Alan Tomlinson) entamant la partition. Celle d’une composition aux airs de vaisseau d’envergure que dirige Guy avec le concours d’Howard Riley : mélodies lustrées à l’unisson, progressions dramatiques, morceaux de classique sévère ou d’opéra bouffe, convocations de jazz – orchestral, swing (dont l’éclat peut parfois décontenancer : intervention de Pete McPhail), free… – et inévitables charges héroïques (Mats Gustafsson, Phil Wachsmann, Evan Parker).

Au jeu des comparaisons, si cet Harmos n’atteint pas les sommets de son prédécesseur – vingt ans plus tôt, Howard Riley, Barre Phillips, Paul Lytton, Evan Parker, Trevor Watts et Phil Wachsmann donnaient déjà de leur personne auprès de Guy, en présence de Paul Rutherford, Paul Dunmall et Radu Malfatti –, sa hauteur n’est pas non plus à négliger : qui le fait dépasser tout autre orchestre du genre d’au moins une quinzaine de têtes.  

Barry Guy London Jazz Composers Orchestra : Harmos, Live at Schaffhausen (Intakt / Orkhêstra International)
Enregistrement : 21 mai 2008. Edition : 2012. 
DVD : 01/ Harmos
Guillaume Belhomme © Le son du grisli


Peter Brötzmann: Berlin Djungle (Atavistic - 2004)

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Vingt ans après son enregistrement au JazzFest de Berlin, le label Atavistic ressortait Berlin Djungle du saxophoniste Peter Brötzmann, édité à l’origine par Free Music Production.

Le temps d’un concert unique, 11 musiciens servirent le fantasme du Brötzmann Clarinet Project, certains devant laisser leur instrument de prédilection au profit de la clarinette : parmi eux, les saxophonistes Tony Coe (transfuge de l’orchestre d’Henry Mancini) et John Zorn. Au nombre des intervenants, compter aussi Louis Sclavis, Toshinori Kondo (trompette), Johannes Bauer et Alan Tomlinson (trombones), quand William Parker et Tony Oxley assurent la section rythmique.

Et Brötzmann, bien sûr, qui adresse un clin d’œil à Dolphy avant de conduire son ensemble le long des deux parties de What A Day, pièces sans concessions évoluant au gré des emportements : mouvements saccadés, cris, sifflements, pizzicatos de Parker surpris en pleine transe nihiliste. Espacés, des solos sont ensuite plus à même d’instaurer des pauses obligatoires avant l’unisson ultime et suraigu auquel résiste, seul, le barrissement d’un trombone (First Part). L’épreuve est extrême, et la seconde partie nous apprendra que le bout du bout de la fougue bruyante peut encore changer d’allures. Les contraintes presque toutes anéanties, les trombones dressent leurs sirènes plaintives au milieu desquelles Brötzmann installe au tarogato (saxophone en bois d’origine hongroise) un blues badinant avec la Rhapsody In Blue de Gershwin. Incursion démesurée dans le champ du free jazz et de l’improvisation contestataire, Berlin Djungle est, en plus, un document d’importance, au générique singulier. Prometteur à l'époque ; confirmé aujourd'hui.

CD: 01/ What A Day / First Part 02/ What A Day / Second Part >>> Peter Brötzmann - Berlin Djungle - 2004 (réédition) - Atavistic. Distribution Orkhêstra International.



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