Arto Lindsay : Invoke (Righthouse Babe, 2002)
Invoke est l'élément perturbateur de la discographie d'Arto Lindsay. Un disque mal parti puisque son premier titre, Illuminated, est peut être celui qui a donné le meilleur exemple de la miévrerie constante qui conseille Lindsay sur deux à trois morceaux sur chaque disque – Over/Run sera l'autre morceau à regretter, production old school qui doit sans doute beaucoup à la grosse patte de Melvin Gibbs.
Mais le reste d'Invoke, comment dire ? Comme si l'inventivité s'emparait du corps maigre d'Arto Lindsay, le remue en coquille de noix au milieu d'un océan sévère, lui fait avaler des tasses de mélodies sans prétention mais fantastiques sur lesquelles il place son chanté-parlé avec un élégant recul. Cette même élégance le pousse à entonner des chansons de différentes natures : sur Predigo il renvoie Tom Zé dans ses cordes et ses accordéons, sur You Decide il se grime en Prince caribéen, sur Unseen il se noie littéralement sous des flots de dark électronique. Plus loin, c'est encore de la poésie sonore ou une bossa non-triste (Beija-Me qu'il interprète auprès du guitariste Vinicius Cantuaria).
Si Invoke est un disque pop, on parle ici d'une pop qui ressemble à ce que les disques de DNA et d'Ambitous Lovers furent au rock ou à ce que ceux des Lounge Lizards furent au jazz : des nuances savoureuses qui relativisent toutes les tables de la loi et qui font au final de grands albums de vulgarisation expérimentale.
Arto Lindsay : Invoke (Righthouse Babe)
Edition : 2002.
CD : 01/ Illuminated 02/ Predigo 03/ Ultra Privileged 04/ Over/Run 05/ Invoke 06/ You Decide 07/ In the City That Reads 08/ Delegada 09/ Uma 10/ Clemency 11/ Unseen 12/ Beija-Me
Pierre Cécile © Le son du grisli
Présent aussi au Festival Météo, Arto Lindsay y jouera ce samedi 28 août au côté du guitariste Jean-François Pauvros.