Le son du grisli

Bruits qui changent de l'ordinaire


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Archives des interviews du son du grisli

Mark Dresser : Nourishments (Clean Feed, 2013)

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Le syndrome premier(s) de la classe menacerait-il le dernier opus de Mark Dresser ? La vélocité d’école de Rudresh Mahanthappa pourrait, dans un premier temps, le laisser croire. Passé Not Withstanding et son thème à embuscades, le quartet va adoucir ses élans et ne plus se précipiter dans l’exploit sportif. Ainsi, les thèmes emprunteront des chemins chromatiques plutôt que de s’adonner aux mélodies ductiles.

Il y aura des canevas répétés obsessionnellement, des unissons poreux et des ambiances anxiogènes. Il y aura des prouesses d’alto, un hyperpiano (Denman Maroney) troublant, un trombone (Michael Dessen) soyeux, un jazz bancal, un batteur (Tom Rainey) amant du conflit et un autre (Michael Serin) soupirant du langoureux, des entrechats trombone-alto. Et enfin, il y aura une science des tuilages, déjà croisée à de nombreuses reprises (pour ne pas dire rabâchée) mais trouvant ici sa plus belle justification.  

Mark Dresser Quintet : Nourishments (Clean Feed / Orkhêstra International)
Edition : 2013.
CD : 01/ Not Withstanding 02/ Canales Rose 03/ Para Waltz 04/ Nourishments 05/ Aperitivo 06/ Rasaman 07/ Telemojo
Luc Bouquet © Le son du grisli



Denman Maroney : Double Zero (Porter, 2011)

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La notion d’ « hyperpiano » pour Denman Maroney n’est pas coquetterie mais la juste vision d’un travail entrepris depuis de nombreuses années en direction du centre et des périphéries du piano. Ainsi, la symétrie et la dissymétrie trouvent ici un moyen de se réconcilier et d’accompagner les heurts et chavirements voulus par le musicien.

Une main dans le ventre de la bête, une autre actionnant l’ivoire, voici un florilège de sons : sons fantômes, sirènes hurlantes et fracassantes, bourdonnement de tampura, résonnance d’acier, craquements et grincements, glissendis chromatiques, brides mélodiques aux accents monkiens : ici, entaille et harmonie ne sont plus ennemis mais alliés d’une suite solo particulièrement convaincante.

Denman Maroney : Double Zero (Porter/ Orkhêstra International)
Enregistrement : 2008. Edition : 2011.
CD : 01/ Double Zero Part I 02/ Part II 03/ Part III 04/ Part IV 05/ Part V 06/ Part VI 07/ Part VII 08/ Part VIII 09/ Part IX
Luc Bouquet © Le son du grisli


Miguel Frasconi, Denman Maroney : Gleam (Porter, 2010)

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Nous ne les voyons pas mais nous les entendons. Ils sont deux et nous savons qu’ils frottent. Ils frottent les cordes d’un piano. Du verre aussi. Ils bercent et jamais ne fouettent. Etranges sont leurs sonorités. Ils distillent, entrechoquent, coulissent. Et toujours finement. Sans éraillures. Parfois le piano immisce une forme. Alors, l’autre rebondit et s’étire. Douce somnolence. Douce attraction.

Les responsables de cette sucrerie sonique se nomment Miguel Frasconi (glassharp, instruments en verre) et Denman Maroney (piano). Et à vrai dire, on ne s’est jamais ennuyé ici.

Miguel Frasconi, Denman Maroney : Gleam (Porter / Orkhêstra International)
Enregistrement : 2008. Edition : 2010.
CD : 01/ Gleam 02/ Glaze 03/ Glide 04/ Gliss 05/ Glass 06/ Gloss
Luc Bouquet © Le son du grisli


Leroy Jenkins: The Art of Improvisation (Mutable - 2005)

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Enregistrement d’un concert donné le 8 octobre 2004 par le quartette de Leroy Jenkins, The Art of Improvisation atteste de l’énergie endurante du plus charismatique des violonistes de l’A.A.C.M., porté par 3 partenaires triés sur le volet.

En moins d’une heure, l’exercice est décliné sur 4 modes et autant d’ambitions. To Live : à un rythme fougueux, Min Xiao-Fen imbrique les phrases de son pipa à celles du violon, et décide d’une progression abrupte et dissonante, évoluant sur fond de western mongol. To Sing : où les solos se succèdent poliment - le pianiste Denman Maroney interrogeant accordage et désaccordage, Jenkins optant pour une impression pseudo-baroque, ou le percussionniste Rich O’Donnel jonglant entre construction entêtante et ruptures de rythme.

Elaborées en commun sur la fin de To Sing, les propositions musicales retrouvent la fougue du début du disque sur To Run. Là, les musiciens se font plus virulents encore, à l’image de Jenkins, qui frotte les cordes de son violon au moyen d’un archet sec, tandis que Maroney n’hésite plus à distribuer les coups à l’intérieur de son instrument. Inéluctable, la retombée des tensions : To Believe, sur lequel le violoniste trouve seul le chemin de la mélodie légère, qui convaincra bientôt les interventions individuelles du bien-fondé de se fondre.

Vu de loin, The Art of Improvisation est une source intarissable de projections intempestives et d’initiatives mûrement réfléchies. Le tout lié admirablement par le savoir-faire de quatre musiciens qualifiés, qui ne cessent cependant d’hésiter entre assurance et doute. Entre l’un et l’autre, sûrement trouvent-ils leur charme.

CD: 01/ To Live 02/ To Sing 03/ To Run 04/ To Believe

Leroy Jenkins - The Art of Improvisation - 2005 - Mutable Music.



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