Dave Rempis' Aerophonic Expéditives
S’il a déjà autoproduit quelques disques par le passé – deux Ballister, notamment –, Dave Rempis n’avait, jusque-là, pas éprouvé le besoin de donner un nom à leur « étiquette ». Aujourd'hui, les choses ont changé : son label a pour nom Aerophonic.
Rempis Percussion Quartet : Phalanx (Aerophonic, 2013)
La première référence Aerophonic documente, en deux disques, le développement du Rempis Percussion Quartet. En concerts – à Milwaukee le 12 juin 2012 et à Anvers le 25 avril 2012 –, la batterie double (Daisy / Rosaly) et la contrebasse (Haker Flaten) invectivent quand Rempis s’amuse avec brio à leur faire perdre leurs repères : ainsi, louvoie-t-il ici pour exacerber ailleurs les tensions contenues en courts motifs qu’il répète. Alto, ténor et baryton, nerveux tous, jouent de l’étincelle et de la cogne avec un art toujours épatant.
Wheelhouse : Boss of the Plains (Aerophonic, 2013)
En Wheelhouse, formé en 2005, Rempis côtoie Jason Adasiewicz (vibraphone) et Nate McBride (contrebasse). En concert à Chicago (Izzy’s Palace) le 9 octobre 2010, le trio progresse à pas feutrés, flottant parfois, sur dix pièces inquiètes de format chanson. De Song Sex Part 1 à Song Tree – et exception faite sur ce Song for Teens plus tourmenté –, Wheelhouse développe un air d’Easy Way qui cache de belles étrangetés (cet archet grave qui embrasse les longues notes d’alto sur Song Hate, première de toutes).
Dave Rempis, Tim Daisy : Second Spring (Aerophonic, 2014)
Enregistré en studio le 20 mai 2013, Second Spring poursuit les efforts entamés en 2005 par le duo avec Back to the Circle. Le souffle mis au service d’autres motifs courts n’empêche pas la confection d’un patchwork bigarré : les échanges vifs, les réflexions mêlées et les accords soudains redisent l’entente de partenaires qui se connaissent bien : l’un, souffleur de notes grisantes ; l’autre, carillonneur d’avant-poste.
Dave Rempis, Joshua Abrams, Avreeayl Ra : Aphelion (Aerophonic, 2014)
Extraits de trois concerts datés de 2013, Aphelion donne à entendre Dave Rempis (alto et baryton) aux côtés de Josh Abrams (contrebasse, gambri et petite harpe) et Avreeayl Ra (percussions). Entre deux légères impressions d’Afrique (évocations sans doute de celle que Rempis a jadis connue), Abrams et Ra, s’ils peinent à enthousiasmer, démontrent quand même une force qui enjoint le saxophoniste à dévier beaucoup. Lui trace alors presque autant de directions qu’il dessine de lignes : instable, l’invention de Rempis est autrement pertinente.
Ari Brown: Live at The Green Mill (Delmark - 2007)
Membre discret de l’AACM, le saxophoniste Ari Brown, souvent entendu aux côtés de Kahil El’Zabar, emmenait en juin 2007 à Chicago un quartette âgé d’une dizaine d’années, qui donne à entendre aussi : Kirk Brown au piano, Yosef Ben Israel à la contrebasse, et Avreeayl Ra à la batterie.
Sur ses propres compositions, Brown défendait là un jazz sobre et élégant, inspectant les possibilités de la modalité (Richard’s Tune) ou servant une ballade travaillée longtemps (One for Skip). Ailleurs, le trompettiste Pharez Whitted est invité à venir, lyrique, soutenir le ténor (Waltz of The Prophets) ou la flûte (Kylie’s Lullaby).
Le film, quant à lui, se satisfait de peu : captation de concert sobre aussi, voire brute, voire rudimentaire, selon les jugements. Instable, en tout cas, mais qui donne à entendre (et donc à voir) un titre de plus que la version cd de cet enregistrement : Evod, marche éléphantesque et enivrante qui vaut qu’on lui pardonne.
DVD: 01/ Richard’s Tune 02/ One For Skip 03/ Waltz of The Prophets 04/ Shorter’s Vibes 05/ Two Gun 06/ Kylie’s Lullaby 07/ Evod
Ari Brown - Live at The Green Mill - 2007 - Delmark. Distribution Socadisc.
Frequency: Frequency (Thrill Jockey - 2006)
Récemment formé par quatre représentants de la jeune garde du jazz de Chicago, Frequency expose ses ambitions sur un disque autant fourni que sage, aussi évident que recherché.
Ainsi, Edward Wilkerson (clarinette basse), Nicole Mitchell (flûtes), Harrison Bankhead (contrebasse et violoncelle) et Avreeayl Ra (percussions) entament leur exposé par deux morceaux plus qu’efficaces : jazz roulant et swing déposé sur un gimmick de contrebasse (Pitiful James), et bop servi par l’unisson des instruments à vent, bientôt tentés par une échappée free (Take Refuge).
Par la suite, le quartette rend des instants d’un calme à deux doigts du méditatif – impressions sages portées par le son du kalimba de Ra (Portrait of Light) ou la flûte de Mitchell (Serenity), improvisations évanescentes (Optimystic) n’interdisant pas le recours à quelques expérimentations (From The Other Side).
Au final, c’est cette couleur apaisante que prendra Frequency. Un brin de free (Satya) ou un funk croulant sous les dissonances (The Tortoise) pourront venir tester la véracité des intentions, sans réussir à l’emporter jamais devant le flegme affiché par le groupe. Qui s’en sera servi pour emplir encore davantage la densité de son jazz imperturbable.
CD: 01/ Pitiful James 02/ Take Refuge 03/ Satya 04/ Portrait of Light 05/ Fertility Dance 06/ From the Other Side 07/ The Tortoise 08/ Optimystic 09/ Serenity
Frequency - Frequency - 2006 - Thrill Jockey. Distribution Discograph.