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Le son du grisli
15 juillet 2010

Evan Parker : Whitstable Solo (Psi, 2010)

whistablegrisli

Subtilement barbelée, d’une élégance échevelée et exigeante, la geste soloparkerienne n’en finit pas d’enchanter, inscrivant ses épisodes les plus épiques au fichier secret de nos drogues auditives. La collection de ces chapitres, du moins de ceux qui comptent, s’organise, au disque, selon un plan quasi-quinquennal : Saxophone Solos (1975), Six of One (1980), The Snake Decides (1986), Process & Reality (1991), Lines Burnt in Light (2001)… et Whitstable Solo donc, qui vient d’y trouver aujourd’hui une place de choix.

Avec cet enregistrement de l’été 2008, c’est en huit assez brèves bouffées (de quatre à quinze minutes – ce qui contraste avec les longues plongées hallucinatoires antérieures) qu’Evan Parker rend compte de l’état des recherches que le saxophone soprano lui a permis de mener ; il les évoquait ainsi, dès 1992, dans un texte intitulé De Motu : « Ces derniers temps, le saxophone m’est plutôt apparu comme un instrument d’investigation biologique : il me permet d’étudier et d’accroître le contrôle de mon audition et des mécanismes moteurs de mon système musculaire et osseux ; l’amélioration de leur fonctionnement m’a beaucoup donné à réfléchir. C’est tantôt le corps qui conduit l’imagination, tantôt l’imagination (« l’esprit vif » de Rascher) qui guide le corps. » S’adonnant à ce jeu « alternatif », le souffleur dresse une manière d’autoportrait – physique & intellectuel – et, les années passant, tient une forme de journal personnel dont il publie les pages significatives.

En présence du public ou avant son arrivée, devant les micros d’Adam Skeaping (avec lequel EP partage un long compagnonnage et déjà plusieurs enregistrements dans cette église St Peter’s de Whitstable), Parker atteint ici, dès la troisième pièce, après poussée et reflux de fièvre, une température à laquelle de clairs dessins se dégagent du tourbillon : danses lentes, comme rêvées, presque lacyennes – voire sifflables… de whitstable à whistlable ? – dans leurs intervalles et figures mélodico-géométriques. Si l’ébullition reprend ensuite, virulente, hypnotique, au moins aura-t-elle montré quelle fine écume elle est en mesure de faire advenir. Un très beau disque, qui « instruit » et donne à penser.

Evan Parker : Whitstable Solo (Psi / Orkhêstra International)
Enregistrement : 2008. Edition : 2010.
CD : 01/ Whitstable Solo 1 02/ Whitstable Solo 2 03/ Whitstable Solo 3 04/ Whitstable Solo 4 05/ Whitstable Solo 5 06/ Whitstable Solo 6 07/ Whitstable Solo 7 08/ Whitstable Solo α-ω
Guillaume Tarche © Le son du grisli

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