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Le son du grisli
ldp
26 novembre 2015

LDP 2015 : Carnet de route #28

ldp 2015 30 octobre 2015

Jacques Demierre et Urs Leimgruber sont désormais à New York, et au programme de l'IBeam Brooklyn pour deux soirs. C'est ici le souvenir du premier. 

30 octobre,Brooklyn, New York
IBeam

Kevin Reilly ist eine Ausnahme Erscheinung. Er ist ein grosser Liebhaber und ein engagierter Produzent improvisierter Musik. Er führt sein eigenes Label Relative Pitch.Seit vielen Jahren kennt er die internationale Szene bestens. Während dieser Zeit hat er eine grosse Anzahl von Lp’s, Kassetten und CD’s führender internationaler Protagonisten gesammelt, archiviert, und er hat einen ganzen Katalog von CD’s auf seinem Label produziert. Er organisiert die beiden Konzerte heute und morgen im Ibeam, Brooklyn. Der Club befindet sich im Südwesten Brooklyn’s, an der 7th Street im ehemaligen Industrieviertel inmitten von Gewerbehallen. In der Zwischenzeit wohnen hier heute mehrheitlich junge Leute, Künstler und Musiker. Der Standort ist mit diversen Clubs, Restaurants und Bar’s sehr belebt.
Jacques und ich installieren uns im Club. Kevin richtet den Beamer für das Video. Harald bringt die nötigen audio Kabel, die er beim Music Store nebenan ausleiht. Die ersten Zuhörer treffen ein. Sie strecken mir CD’s zum Signieren entgegen. Zum Teil sind es ältere Veröffentlichungen, Aufnahmen die ich fast schon vergessen habe. Dennoch sind sie mir ganz präsent. Wenn ich in der Erinnerung an sie denke, höre ich jeden Ton, jeden Klang, das ganze Gerät das wir dazumal aus dem Moment heraus entwickelten und in unbekannte Richtungen bewegten. Es geht mir auch mit Konzerten so, die dazumal nicht aufgezeichnet worden sind. Ich erinnere mich an einen bestimmten Ort, an die Stimmung im Raum, sofort nehme ich gespielte Klänge und Abläufe wahr, ich höre das Konzert von neuem. An andere Konzerte kann ich mich überhaupt nicht mehr erinnern. Sie haben sich aufgelöst.
An diesem Abend beginnt das Konzert mit dem Video mit Barre. Anschliessend spielen Jacques und ich im Duo, beginnend im Crossfade zusammen mit dem Kontrabass. Heterogene Abläufe und Attacken fallen ein. Clusters, Multiphonics, Lufttöne, Obertöne, Klappen-geräusche, Pfeifen, Reiben, Stille, Pedale bewegen, Saiten zupfen, Klaviatur betasten… und ein kurzes, intensives Crescendo mit längerem Abbau und Ausklang.
Nach dem Konzert lerne ich Dave Phillips (Phillips Junior) kennen. Dave ist ein sehr sympathischer Mann. Er spielt auch Kontrabass. Dave erzählt mir, dass er vor zehn Tagen noch bei Barre zu Hause in St. Philomène war, als Barre ihm erzählt wie gerne er zusammen mit uns mit auf der Tour wäre, und dass er sich jeden Tag mental und physisch aufbaue, um am 13. November, nach fünf monatigem Unterbruch zusammen mit uns in der Tonhalle wieder auf der Bühne stehen zu können. Die Leute unterhalten sich. Später verlassen wir alle den Raum. Wir rufen eine Taxi. See you tomorrow!
U. L.

P1100600
"Llévame a la Roca!", me précise le chauffeur de taxi équatorien en rigolant, n'est pas cette chanson à la mode dans les milieux chrétiens d'aujourd'hui qu'entonneraient certains passagers depuis le siège arrière de son véhicule qui nous conduit, Urs et moi, de La Guardia Airport à Brooklyn, mais bien la destination de la course donnée par les membres des familles latino-américaines qui voudraient rendre visite à leurs proches incarcérés à Rikers Island, connu pour être l'un des complexes carcéraux de New York les plus violents.  Il ajoute avec un grand sourire, alors que je viens de lui dire que nous sommes musiciens et que mon instrument est le piano, que cette destination en précède statistiquement de très peu une autre, "Llévame a Steinway Street!", puisque l'usine qui fabrique les pianos Steinway & Sons, et qui originellement faisait partie du Steinway Village, est située non loin de l'île sur la East River, qui accueille cette prison à haut risque, entre Queens et Bronx. Se rendant compte que je comprends l'espagnol, il me confie d'une voix plus basse et légèrement voilée, qu'il aimerait jouer du piano. Tellement. Et qu'habitant également dans le Queens, la visite régulière de la fabrique Steinway reste pour lui comme un pèlerinage dont il ne saurait se passer. Alors que ses mots me rappelle des scènes de dévotion religieuse auxquelles j'ai pu assister, au Mexique et en Bolivie, où l'expérience extatique passe par une intense adoration d'objets souvent brillants et étincelants, il revient brusquement à l'anglais et s'adresse à Urs en lui disant que le saxophone est un instrument plus difficile, dans la mesure où il faut simultanément souffler et garder le rythme. Je reste un peu interloqué face à cette affirmation, et tente de visualiser, bloqué au milieu des embouteillages, cette relation entre rythmique et soufflerie. Peut-être notre chauffeur veut-il évoquer une difficulté qui viendrait d'une perte momentanée de l'immédiateté entre marcher et respirer ? Cette pensée m'a occupé jusqu'au soir, où, dans le cadre de notre premier concert au IBeam de Brooklyn, en duo saxophone-piano, un ténor Selmer Mark VI et un soprano Selmer Super Action II pour Urs, et un SCHIMMEL, 1885, numéro 295.196, pour moi, un instrument datant de 1991, si on en croit le tableau des numéros de séries et année de fabrication consultable sur le site de la maison Schimmel, j'ai pu une nouvelle fois expérimenter combien la pratique de la tournée permet de travailler jour après jour, concert après concert, sur cet état qui ne présuppose pas ce qui pourrait advenir, mais qui est comme une préparation à agir de la manière la plus proche des forces qui agissent l'instant du concert. Cet état de préparation est là pour nous permettre de capter au mieux les forces d'immédiateté, sans se préoccuper de leurs manifestations extérieures. Le mouvement part de l'intérieur et laisse l'extérieur se manifester librement. En écrivant cela, j'aimerais dire ici l'influence sur mes contributions au Carnet de route du livre de Jean-François Billeter, Essai sur l'art chinois de l'écriture et ses fondements, paru en 2010 chez Allia, ouvrage qui est une refonte de l'Art chinois de l'écriture publié chez Skira à Genève en 1989. Bien calé et protégé dans mon sac à bandoulière, ce livre a accompagné et accompagne encore chaque instant de la tournée LISTENING. Il ne cesse de m'aider à mieux localiser mes réflexions, comme autant de points à préciser par processus de triangulation, et de m'ouvrir des espaces de perception et de compréhension que seul je n'aurais jamais su convier. Coïncidence : si ce livre fut d'abord publié à Genève, c'est aussi à Genève que Ludwig Hohl, cité par Billeter, a vécu les dernières années de sa vie dans une petite chambre en sous-sol du quartier de la Jonction. Il écrit ceci dans Die Notizen : " Une expression immédiate : voilà ce que sont les grandes œuvres d'art. […] Seule peut être immédiate une expression dans laquelle ne subsiste plus aucune partie solide du passé. Celui qui s'exprime a certes absorbé en lui beaucoup de passé, mais il l'a fondu, liquéfié, liquidé, de sorte qu'il a pu ne laisser couler que ce qui était nécessaire: tout ce qui subsiste sert. " Ce sont ces mots qui me reviennent à l'esprit lorsqu'à la pause, Chris Mann, poète australien vivant à New York, m'évoque la traduction d'une de ses performances en langage des signes, dans l'immédiateté de l'instant et tel que l'aurait pu faire un interprète simultané.
J. D.

P1100552

Photos : Jacques Demierre

> LIRE L’INTÉGRALITÉ DU CARNET DE ROUTE

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