Yannick Franck, Craig Hilton : Flowers for L.P. (Idiosyncratics, 2013)
Militant passionné de la scène electronica, Yannick Franck trouve ici en Craig Hilton un partenaire au niveau de ses habituelles et variées collaborations. Premier effort de la paire belgo-américaine, Flowers For L.P. débute sur des atmosphères menaçantes, qui se rapprocheraient d’un Marsen Jules métamorphosant Svarte Greiner, avant de glisser lentement vers une esplanade post-métallique où règnent les fantômes de Jefre Cantu-Ledesma ou Gilles Aubry.
Chemin faisant, le ton s’évapore, on rêve du fantôme de Geneviève Menace Ruine Beaulieu qui viendrait poser sa voix d’outre-tombe, avant qu’un tourbillon post-industriel n’emporte un fantôme de Stephan Mathieu. Corsée, l’affaire.
EN ECOUTE >>> Flowers for L.P. (extrait)
Yannick Franck, Craig Hilton : Flowers For L.P. (Idiosyncratics)
Edition : 2013.
CD : 01/ Flowers For L.P.
Fabrice Vanoverberg © Le son du grisli

Craig Hilton, Tomas Phillips : Le goût de néant (Absinth, 2011)
La référence à Baudelaire est tronquée, mais on pourrait y voir une nuance d’importance : le goût de néant plutôt que le goût du néant. C’est un solo de guzheng enregistré par Craig Hilton (Sans mouvement I) qu’il réécrit trois fois en compagnie de Tomas Phillips – l’un et l’autre musicien agissant alors au laptop.
La pièce acoustique est un paysage à horizons multiples : des trajectoires endurantes y sont amalgamées et révèle un sens inédit du désarroi sonore – inédit et non pas morne, puisque les basses fréquences et les faux drones qu’on y trouve attestent que les techniques étendues, même sur guzheng, ne suffisent plus : elles doivent être étirées désormais.
Adieu donc, chants du cuivre et soupirs de la flûte ! Le fil qui relie ce premier Sans mouvement à ses réinventions est de plus en plus ténu : ainsi Sans mouvement II, à force de manipulations discrètes, répétera à l’envers le chant du premier titre ; Le goût de néant s’imposera en folk minimaliste dont l’atmosphère défaite évoque Terry Riley ou Alexander Balanescu ; Sans Mouvement III sacrifie tout à une mobilité prévenante, aux commandes du bateau ivre dans lequel prendre place, on imagine Morton Feldman : Et le Temps m'engloutit minute par minute.
Cette pièce et ses relectures forment donc ce goût de néant. Qui donne envie d’essayer le poème de Baudelaire en remplaçant chacun des « du » par un « de », et vice-versa. Alors donc on y trouverait acceptable aussi, et même bien davantage : Résigne-toi, mon cœur ; dors ton sommeil du brute.
EXTRAIT >>> Sans mouvement
Craig Hilton, Tomas Phillips : Le goût de néant (Absinth Records / Metamkine)
Enregistrement : 2009-2010. Edition : 2011.
CD : 01/ sans mouvement I 02/ sans mouvement II 03/ le goût de néant 04/ sans mouvement III
Guillaume Belhomme © Le son du grisli
