Zea : The 7’’ Cassette (Makkum, 2015)
Nerveux, répétitif, hyperactif, surprenant voire incontrôlable : There’s something wrong with me, chante Arnold de Boer sur le dernier titre de cette compilation de raretés de son Zea.
Déjà publiés – mais les tirages sont souvent limités – ou non, les quatorze morceaux de cette cassette attestent l’instabilité de l’inspiration du désormais chanteur de The Ex : sur le souvenir, bon ou mauvais, du rock indépendant – et de son enterrement au son du « single » qui ouvre l’objet en question –, Arnold de Boer s’est construit une identité certes « éclatée » mais aussi cohérente.
Ainsi, jongle-t-il avec les références : avec une effronterie qui sied à l’énergie qui le transcende, il reprend à la cantonnade (Wim T Schippers, Coldplay ou le Wallias Band, qu’il aborde comme hier Jimi Tenor réécrivait le Caravan d’Ellington) ou entame des refrains personnels qui rendent – malgré eux peut-être – hommage à The Byrds, The Stooges, Marc Ribot, Daniel Johnston, Pavement, Violent Femmes… Les emprunts sont nombreux, mais puisque la musique s’affranchit de tout…
Zea : The 7’’ Cassette (Makkum)
Edition : 2015.
Cassette : A1/ We've buried indierock years ago A2/ Ya ya ya (Looking for my baby) live at VPRO A3/
Dance Electric A4/ Clocks A5/ My country lost A6/ Why do good things happen to bad people (live at the BBC) – B1/ Atomic heart B2/ Stuck on you B3/ Muziqawi silt B4/ You sound like an iTunes fade-out B5/ Faster B6/ Ich hab ein Riesenkopf B7/ I am searching for an MP3 B8/ An experience of trouble (by Peter Carbonu)
Guillaume Belhomme © Le son du grisli
King Ayisoba : Wicked Leaders (Makkun, 2014)
Ce n’est pas le premier CD de King Ayisoba que produit Makkun Records (le label d’Arnold de Boer) mais c’est le tout premier que j’entends de ce Ghanéen chanteur (à plusieurs voix) et joueur de kologo. Ce n’est donc pas le premier musicien africain qu'un des membres de The Ex m’aura fait découvrir, et apprécier !
Donc voilà : la voix du King n’est plus ce qu’elle était (nasillarde qu’elle est, stupéfiante !) et son déhanché donne plutôt maintenant dans la saccade et l’embardée. Quant à ces rengaines qu’ils vous assaillent, que l’on imagine pleines de fiel, elles font directement effet sur le cortex cérébral. Surprenant en diable, King Ayisoba peut aussi choisir de donner dans la tendresse (Song for Peace) ou développer ses idées en compagnie de featurings (Zea, of course, Ayuune Sulley, Solomon Abusoro…) qui font parfois penser à ce disque que Waldemar Bastos (Angolais, lui) enregistra il y a des années sous la houlette d’Arto Lindsay.
Enfin, une dernièrechose... J’ai découvert un truc (enfoui chez moi depuis des siècles sans doute) : j’aime le son du Doo ! Et je ne pourrai désormais plus m’en passer.
King Ayisoba : Wicked Leaders (Makkun)
Edition : 2014.
CD / LP : 01/ Bayeti Boi 02/ Wicked Leaders 03/ Sunsua 04/ Yele Mengire Nbo Se’ena 05/ Akolbire 06/ Mbhee 07/ Asa’ala Daandera 08/ Weene Ma’le Wane 09/ Abeleywine 10/ Song for Piece
Pierre Cécile © Le son du grisli
Charles, Gross, Hautzinger, Marchetti : Tsstt! (Monotype, 2012) / Zea : Bourgeois Blues (OOCCII, 2012)
Tsstt ! Bzzz ! Wooshhhh ! Clkt ! En cinq pièces courtes et moins d'une demi-heure, à coups de zips, de zaps et de sulfateuses portatives, l'association de Xavier Charles (clarinette), Franz Hautzinger (trompette quart de ton), Jean-Philippe Gross (dispositif électroacoustique) et Lionel Marchetti (magnétophone Revox B77, radio), relève le défi de maintenir l'attention de l'auditeur sans lasser. Si cela tient, à n'en pas douter, à l'heureuse brièveté de ce disque enregistré en janvier 2010 à Metz, il faut également l'imputer à la variété des climats créés.
Busy & buzzy, le groupe (qu'un Thomas Lehn ne déparerait pas – on ne peut non plus s'empêcher de penser à Jérôme Noetinger ou eRikm pour la section des « machines ») évite l'asphyxie de la seule course aux effets, aux scratches ou aux pétarades de flipper ; des nappes d'attente, crénelées de stridences, savent se bâtir et quand la bâche de la pochette se soulève, une bribe dixie, oui, s'échappe, un mécanisme s'emboucle, un jet de vapeur fuse... Sans renverser les codes de ce genre d'électrimpro mixte, le quartet déploie un bel art de l'espace et une intelligente effervescence.
Xavier Charles, Jean-Philippe Gross, Franz Hautzinger, Lionel Marchetti : Tsstt ! (Monotype)
Enregistrement : 2010. Edition : 2012.
CD : 01-05/ 01-05
Guillaume Tarche @ Le son du grisli
On retrouve Xavier Charles sur un 45 tours que publie Zea (Arnold de Boer) : Bourgeois Blues. Sous le blues promis par ce titre de Lead Belly dont Mark E. Smith retoucha les paroles, trouver des chansons en anglais qui oscillent entre pop et folk : Charles y intervient en effronté qui ornemente et assure de son soutien une guitare (folk ou électrique) obnubilée par les rythmes d’Afrique. Pour la seconde face, surtout.
EN ECOUTE >>> Bourgeois Blues
Zea, Xavier Charles : Bourgeois Blues (OCCII)
Enregistrement : 2011. Edition : 2012.
45 tours : A/ Bourgeois Blues B1/ It’s Quiet B2/ Insecurity Expert
Guillaume Belhomme © Le son du grisli
Zea, Oscar Jan Hoogland : Summing (Makkum, 2020)
A l'occasion (et jusqu'à) la parution, à la fin du mois d'avril 2022, de l'anthologie du Son du grisli aux éditions Lenka lente, nous vous offrons une dernière salve de chroniques récentes (et évidemment inédites). Après quoi, ce sera la fermeture.
J’ai bien mieux pour toi que le coton tige qu’on veut te fourrager dans le pif pour cause de flippe virale, et c’est un truc qu’on se mettra dans l’oreille. Alors ? Un riff de guitare électrique et un clavier derrière : voilà le duo Zea (Arnold de Boer) / Oscar Jan Hoogland parti battre la campagne sonore qui l’environne (l’Hollandaise). Oui mais voilà, le guitaro-chanteur et le pianiste aiment les voyages.
Avec la frénésie qu’on connaît au vociférant de The Ex, les voilà donc sur tous les fronts : hérésie africaniste (les vieux synthés nous ramènent aux premiers Youssou N’Dour), babiole asiatique, berceuse européenne… C’est les Talking Heads sur les routes de l’Afrobeat ou Captain Beefheart qui sirtakisse… Excentrique, jouissif, le grand cirque que Zea et Hoogland distillent en petit comité en mérite un bien plus grand. Un grand comme le monde, un généreux comme leur paire.