Le son du grisli

Bruits qui changent de l'ordinaire


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Archives des interviews du son du grisli

Matana Robert, Sam Shalabi, Nicolas Caloia : Feldspar (Tour de Bras, 2014)

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Souffle sablé et phrasé jazz, grain filou : voici Matana Roberts. Cordes insistantes, denrées métalliques et traits rigides : voici Sam Shalabi. Walking bass empoisonnée, archet droit et poison rythmique : voici Nicolas Caloia.

On pourra s’étonner des excès atmosphériques du trio. On regrettera cette interaction déjouée, ce calme jamais vraiment rompu. On questionnera ce jazz incongru, cette distorsion des matières. On s’étonnera de l’un cherchant et de l’autre percutant. Et l’on ne comprendra jamais vraiment l’indifférence du troisième. Alors, l’on écoutera de nouveau. Et l’on comprendra. On comprendra que l’effort n’est pas uniquement dans l’écoute, dans le renvoi à l’autre, dans les dialogues ânonnés, bredouillés. On comprendra que les virginales glaises se méritent, ne se donnent jamais facilement. Et on ne les remerciera jamais assez de les avoir cherchées, recherchées. Et ici, trouvées.  

Matana Roberts, Sam Shalabi, Nicolas Galoia : Feldspar (Tour de Bras)
Enregistrement : 2011. Edition : 2014.
CD : 01/ Orpiment 02/ Spinel 03/ Galena 04/ Anatase 05/ Opal 06/ Cinnabar 07/ Feldspar
Luc Bouquet © Le son du grisli



Matana Roberts : Coin Coin Chapter Two: Mississippi Moonchile (Constellation, 2013)

matana roberts coin coin chapter 2

Mississipi is a beautiful place ! C’est (enfin, c’était, l’année dernière) le retour de Matana Roberts et de Coin Coin, son projet qui puise aux racines de la musique noire américaine (s’il faut donner une couleur à la musique) pour remettre au goût du jour la légendaire... danse des canards (bon).

Pour nous convaincre, la saxophoniste remet la parole (le chant masculin peut parfois heurter l’oreille) et la « tradition » au centre des enjeux. Le blues, le ragtime, le swing, le jazz de l’AACM ou du Brotherhood of Breath, tout inspire bien le Mississipi Ness que télécommande de main de maître Miss Roberts. Alors, après Gens de Couleur Libre, on est bien obligé de saluer la deuxième apparition du Coin Coin et en répondre : oui, il existe, et bel, et bien !

Matana Roberts : Coin Coin Chapter Two: Mississippi Moonchile (Constellation / Souffle Continu)
Edition : 2013.
CD / LP / DL : Coin Coin Chapter Two: Mississippi Moonchile
Pierre Cécile © Le son du grisli


Matt Bauder : Paper Gardens (Porter, 2010)

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Enregistré au club Roulette de New York en 2006, Paper Gardens montre comment le saxophoniste ténor et clarinettiste Matt Bauder envisage ses travaux d'atmosphères et de jazz aux côtés de partenaires occasionnels mais adéquats.

Ceux-là – Matana Roberts (saxophone alto et clarinette), Loren Dempster (violoncelle) et Reuben Radding (contrebasse) – changent donc Bauder des fidèles Zach Wallace et Aaron Siegel (membres de Memorize the Sky qu'il côtoya plus tôt sur 2 + 2 Compositions aux côtés d'Anthony Braxton, alors leur professeur à la Wesleyan University). Pourtant, malgré le changement, l'idée est la même : celle de défendre une nouvelle forme de musique soumise à partition mais aussi à de grandes plages d'improvisation.

Dès l'ouverture de Paper Gardens, les notes se font longues : deux minutes à peine sur lesquelles Bauder et Roberts s'unissent pour progresser lentement, vrillent et étirent avec mesure un discours sonore mis en commun lorsqu'ils ne le déstabilisent pas plutôt sous les effets de déstructurations passagères. Dempster et Radding, eux, se chargent de maintenir les concentrations dans un cadre fait de notes passées au tamis de structures à cordes : pizzicatos souvent lâches capables de convaincre de l'intérêt à trouver en dérives multiples et archets enjoignant les souffles à gronder un peu – le temps seulement de comprendre qu'ils agissent sur courbe et d'en revenir forcément à la mesure de départ. Depuis Weary Already of the Way, son premier disque, Matt Bauder s'est attelé à la mise au jour de cette musique horizontale aux reliefs décidés par l'intensité des climats à y défiler : avec Paper Gardens, sans doute a-t-il mis la main sur la pièce-maîtresse de son esthétique.

Matt Bauder : Paper Gardens (Porter / Orkhêstra International)
Enregistrement : 16 octobre 2006. Edition : 2010.
CD : 01-11/ Track A-Track K
Guillaume Belhomme © Le son du grisli



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