Le son du grisli

Bruits qui changent de l'ordinaire


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Archives des interviews du son du grisli

Zea : The 7’’ Cassette (Makkum, 2015)

zea the 7 cassette copy

Nerveux, répétitif, hyperactif, surprenant voire incontrôlable : There’s something wrong with me, chante Arnold de Boer sur le dernier titre de cette compilation de raretés de son Zea.

Déjà publiés – mais les tirages sont souvent limités – ou non, les quatorze morceaux de cette cassette attestent l’instabilité de l’inspiration du désormais chanteur de The Ex : sur le souvenir, bon ou mauvais, du rock indépendant – et de son enterrement au son du « single » qui ouvre l’objet en question –, Arnold de Boer s’est construit une identité certes « éclatée » mais aussi cohérente.

Ainsi, jongle-t-il avec les références : avec une effronterie qui sied à l’énergie qui le transcende, il reprend à la cantonnade (Wim T Schippers, Coldplay ou le Wallias Band, qu’il aborde comme hier Jimi Tenor réécrivait le Caravan d’Ellington) ou entame des refrains personnels qui rendent – malgré eux peut-être – hommage à The Byrds, The Stooges, Marc Ribot, Daniel Johnston, Pavement, Violent Femmes… Les emprunts sont nombreux, mais puisque la musique s’affranchit de tout…



Zea : The 7’’ Cassette (Makkum)
Edition : 2015.
Cassette : A1/ We've buried indierock years ago A2/ Ya ya ya (Looking for my baby) live at VPRO A3/
Dance Electric A4/ Clocks A5/ My country lost A6/ Why do good things happen to bad people (live at the BBC) – B1/ Atomic heart B2/ Stuck on you B3/ Muziqawi silt B4/ You sound like an iTunes fade-out B5/ Faster B6/ Ich hab ein Riesenkopf B7/ I am searching for an MP3 B8/ An experience of trouble (by Peter Carbonu)
Guillaume Belhomme © Le son du grisli



The Ex : And So Say All of Us (Ex, 2015)

the ex and so say all of us

Une longue file d’attente, dans le froid : c’est un DVD, et aussi l’Angleterre. The Ex y joue, au Café Oto, à l’occasion d’un anniversaire particulier (trente-trois années et quatre mois d’existence), qu’il célébra aussi au Bimhuis – un aperçu ici : At Bimhuis (1991-2015).

A Londres, c’est une fête dont on peine à compter les invités – autant de satellites qui pourront, comme Steve Beresford et Wolter Wierbos, John Butcher et Tony Buck ou encore ce Clarinet Summit que forment Ken Vandermark, Xavier Charles et Ab Baars, improviser à distance. Pour le groupe, c’est surtout l’occasion – avec son Brass Unboud, notamment – de modifier quelques-uns de ses refrains : That’s Not A Virus, State of Shock, Theme from Konono No. 2

Le montage est vif (Seán Zissou à la manœuvre), qui est à l’image du groupe et rend assez bien sa méthode : régénérer, par la récréation, un art exaltant de libre création.

The Ex : And So Say All of Us - 33 1/3 Festival. Live at Café Oto (Ex)
Edition : 2015.
DVD : 01/ Addis Hum 02/ That’s Not a Virus 03/ Maybe I Was the Pilot 04/ Mats Gustafsson & Andy & Terrie 05/ Ken Vandermark 06/ Steve Beresford & Wolter Wierbos 07/ D’ouest en est 08/ Gondar 09/ Hidegen Fujnak a Szelek 10/ Lale Guma 11/ Xavier Charles & Terrie 12/ John Butcher & Tony Buck 13/ Ab Baars, Xavier Charles, Ken Vandermark 14/ John Butcher & Tony Buck 15/ State of Shock 16/ Eoleyo 17/ Theme from Konono No. 2
Guillaume Belhomme © Le son du grisli


The Ex : The Ex at Bimhuis (1991-2015) (Ex, 2015)

the ex at bimhuis

L’endroit (Bimhuis, Amsterdam) a une quarantaine d’années. The Ex y a passé vingt-cinq ans. Une quinzaine de dates, sans compter les apparitions, sur la même scène, de tel ou tel membre du groupe avec tel ou tel improvisateur (Ab Baars, Peter Brötzmann, Ken Vandermark, Thurston Moore…). Mais la quinzaine suffit à remplir ce disque-double.

Une rétrospective, et aussi un hommage – un espace n’est-il pas l’un des ingrédients qui permettent une osmose ? Dans le fascicule glissé dans le digipack, Katherina Bornefeld dit, malgré ses premières appréhensions, le public du Bimhuis très ouvert quand Andy Moor se souvient qu’il y réalisa qu’il pouvait en découdre avec des improvisateurs d’importance (Wolter Wierbos, premier de tous).

The Ex en concert, c’est souvent un The Ex augmenté – et, en conséquence, des chansons revues. Par Wierbos, notamment, dont le trombone en rehausse les âpres rengaines (Shopping Street), Baars, aussi, et puis Steve Beresford, Han Bennink, Phil Minton, John Butcher, Peter Evans, Mats Gustafsson… La prise de son n’est pas toujours irréprochable (le début des années 1990 est déjà loin), mais quand elle permet de relativiser les brouillons, la magie opère : alors, tournent les bourdons multipliés de Symphony for Machines, la chanson-scansion de Lale Guma et, avec Getatchew Mekuria, le swing de Shellelle.

The Ex at Bimhuis, c’est aussi une suite d’instants présents d’un groupe en perpétuel devenir – ou comment le départ de G.W. Sok transforme un trompettiste en vocaliste qui renouvelle : ainsi, la voix d’Arnold de Boer devrait-elle résonner encore, et même souvent, sur la scène du Bimhuis.  

The Ex : At Bimhuis (1991-2015) (Ex)
Enregistrement : 1991-2015. Edition : 2015.
2 CD : CD1 : 01/ Flutes Tale 02/ Shopping Street 03/ Pretty Cattle Office 04/ Lied der Steinklopfer 05/ Invitation to Dance 06/ Kimmel 07/ Sonic Broom 08/ The Early Bird’s Worm 09/ Ex Guitars’n’Han 10/ Kat’n’Han 11/ Dear House 12/ New Clear Daze 13/ Oh Puckerlips Now – CD2 : 01/ Symphony for Machines 2/ Gronings Liedje 03/ Suction Prints 04/ Lale Guma 05/ Shellelle 06/ Abbay Abbay / Aynamaye Nesh 07/ Aha Gedawa 08/ Bourgeois Blues 09/ 24 Problems 10/ Every Sixth Is Cracked 11/ Gondar
Guillaume Belhomme © Le son du grisli


King Ayisoba : Wicked Leaders (Makkun, 2014)

king ayisoba wicked leaders

Ce n’est pas le premier CD de King Ayisoba que produit Makkun Records (le label d’Arnold de Boer) mais c’est le tout premier que j’entends de ce Ghanéen chanteur (à plusieurs voix) et joueur de kologo. Ce n’est donc pas le premier musicien africain qu'un des membres de The Ex m’aura fait découvrir, et apprécier !

Donc voilà : la voix du King n’est plus ce qu’elle était (nasillarde qu’elle est, stupéfiante !) et son déhanché donne plutôt maintenant dans la saccade et l’embardée. Quant à ces rengaines qu’ils vous assaillent, que l’on imagine pleines de fiel, elles font directement effet sur le cortex cérébral. Surprenant en diable, King Ayisoba peut aussi choisir de donner dans la tendresse (Song for Peace) ou développer ses idées en compagnie de featurings (Zea, of course, Ayuune Sulley, Solomon Abusoro…) qui font parfois penser à ce disque que Waldemar Bastos (Angolais, lui) enregistra il y a des années sous la houlette d’Arto Lindsay.

Enfin, une dernièrechose... J’ai découvert un truc (enfoui chez moi depuis des siècles sans doute) : j’aime le son du Doo ! Et je ne pourrai désormais plus m’en passer.

King Ayisoba : Wicked Leaders (Makkun)
Edition : 2014.
CD / LP : 01/ Bayeti Boi 02/ Wicked Leaders 03/ Sunsua 04/ Yele Mengire Nbo Se’ena 05/ Akolbire 06/ Mbhee 07/ Asa’ala Daandera 08/ Weene Ma’le Wane 09/ Abeleywine 10/ Song for Piece
Pierre Cécile © Le son du grisli


The Ex & Brass Unbound : Enormous Door (Terp, 2013)

the ex brass unbound enormous door

Depuis le temps, on sait bien que The Ex n’a pas besoin d’artifice pour se faire entendre, et même entendre bien fort. Pas besoin d’artifice, mais pourquoi pas d’artificiers ? Le Brass Unbound (Mats Gustafsson, Ken Vandermark, Wolter Wierbos & Roy Paci) qui l’accompagne de temps à autre en concerts n’apporte-t-il pas à son rock brut de décoffrage comme un souffle nouveau ?

Qu’ils portent à bout de gorges et de mentons l’air du morceau ou pousse les Hollandais à se surpasser dans les dissonances (Every Sixth Is Cracked), on ne regrette jamais l’effet des vents sur le groupe (et ce même lorsqu’on en arrive à frôler les Pogues, comme sur Our Leaky Homes). Huit musiciens sur scène qui s’y connaissent autant en déglingue improvisée qu’en éthio-jazz : que demande le peuple ? Et s’ils terminent en plus le CD avec le morceau qui sert d’habitude à débuter leurs concerts, il ne reste à l’auditeur plus que deux mots à dire avant le point d’exclamation final : diantrement efficace !

The Ex & Brass Unbound : Ernomous Door (Ex Records)
Enregistrement : 1-5 juin 2012. Edition : 2013.  
CD / LP : 01/ Last Famous Words 02/ Every Sixth Is Cracked 03/ Belomi Benna 04/ Red Cow 05/ Our Leaky Homes 06/ Bicycle Illusion 07/ We Are Made Of Places 08/ Theme From Konono No.2
Pierre Cécile © Le son du grisli

terrie ex paal nilssen-love gored gored

Gored Gored, c’est quarante minutes d’un concert du duo Terrie Ex / Paal Nilssen-Love enregistré à la Goutte d’Or dans le cadre de Sonic Protest en 2012. Guitare électrique contre batterie complète, médiator tranchant contre baguettes massives, guidées par une complicité peaufinée dans Offonoff, Lean Left et déjà sur CD avec Hurgu!, signent là un rock alternatif et tribal comme on en fait peu… à « décorner » les bœufs.

Terrie Ex, Paal Nilssen-Love : Gored Gored (Terp)
Enregistrement : 14 avril 2012. Edition : 2013.
CD : 01/ Gored Gored
Pierre Cécile © Le son du grisli



Fire!, Oren Ambarchi : In Your Mouth - A Hand / Fire! Orchestra : Exit! (Rune Grammofon, 2012/2013)

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L’amateur de crochets et d'anicroches trouvera là son compte : In the Mouth – A Hand est ce récit de coups portés par Fire! à un invité de marque : Oren Ambarchi.

Alors que la rencontre du trio et de Jim O’Rourke (Released! / Unreleased?) avait accouché de ballades expérimentales, mornes mais néanmoins inventives, In the Mouth – A Hand joue de basses et de rythmes soutenus qui enjoignent Gustafsson et Ambarchi à faire respectivement œuvre de cris rentrés et de cordes envisagées au poing – parfois le coup est maladroit, la gesticulation manque son but, alors le moulinet tourne à vide et l’exercice tient de l’entraînement longuet. Mais dans son ensemble, le disque se montre digne d’intérêt : faite de nœuds inextricables, la musique qu’il délivre trouve dans son endurance même la raison de son entêtement.

Fire!, Oren Ambarchi : In the Mouth – A Hand (Rune Grammofon)
Enregistrement : 28 octobre 2011. Edition : 2012.
CD : 01/ A Man Who Might Have Been Screaming 02/ And The Stories Will Flood Your Satisfaction (With Terror) 03/ He Wants To Sleep In A Dream (He Keeps In His Head) 04/ Possibly She Was One, Or Had Been One Before (Brew Dog)
Guillaume Belhomme © Le son du grisli 2013

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Au son de compositions de Gustafsson, Berthling et Werllin et sur des paroles d’Arnold de Boer, Fire! s’est fait grand orchestre. Enregistré le 13 janvier 2012, une trentaine de musiciens (dont Magnus Broo, Per-Ake Holmlander, David Stackenäs, Sten Sandell, Joel Grip ou Raymond Strid) s’y bousculaient de concert. Déclamant, Mariam Wallentin, Emil Swanangen et Sofia Jernberg, mènent la formation de ronde affolée en berceuse inquiète et de free folk en post-rock prog, obtiennent grâce après supplique : Fire!, stay with me.

Fire! Orchestra : Exit! (Rune Grammofon)
Enregistrement :13 janvier 2012. Edition : 2013.
CD : 01/ Exit! Part One 02/ Exit! Part Two
Guillaume Belhomme © Le son du grisli 2013


Getatchew Mekuria, The Ex & Friends : Y'Anbessaw Tezeta (Terp, 2012)

getatchew mekuria tezeta

C’est le second enregistrement en studio et le troisième fruit de la collaboration de Getatchew Mekuria avec The Ex. Il sera aussi peut-être, si l’on en croit le saxophoniste lui-même, son dernier disque. Voici donc : Y'Anbessaw Tezeta (une fois traduit : A la mémoire du lion).

Le lion, on le sait, c’est Mekuria. Avec le groupe hollandais et quelques invités (Colin McLean, Xavier Charles, Ken Vandermark, Wolter Wierbos, Joost Buis et le danseur Melaku Belay), il montre qu’il rugit encore, seul (le beau Tezeta) ou accompagné. Ses accompagnateurs mettent d’ailleurs sa voix en valeur en l’installant dans une felouque qui balance sur les eaux du Nil ou en l’enveloppant de leurs attentions (les instruments à vent à l’unisson le portent aux nues). Le tout coule et va au pas de marches tranquilles, si ce n’est sur Aha Gedawo, où les ardeurs de The Ex rattrapent la troupe pour un résultat entêtant.

En bonus, le label Terp a eu la belle idée de compiler sur un second CD des enregistrements de Mekuria en différentes compagnies : avec l’Instant Composers Pool en 2004 (le saxophoniste devient la vedette d’un incroyable cabaret frappé), The Ex en concert à Montréal en 2009 (saluons la belle performance d’Arnold De Boer) et, rareté, dans les années 60 dans l’Haile Selassie 1 Theatre Orchestra. Oserais-je l’avouer ? Ce disque bonus fait tout le sel de Y’Anbessaw Tezeta !

EN ECOUTE >>> Aha Gedawo

Getatchew Mekuria, The Ex & Friends : Y'Anbessaw Tezeta (Terp / Differ-ant)
Enregistrement : 2011-2012. Edition : 2012.
2 CD : 01/ Ambassel 02/ Tezeta 03/ Bertukane / Yematebela Wof / Shegitu 04/ Bati 05/ Ene Eskemot Derese 06/ Yegna Mushera 07/ Aha Gedawo 08/ Almaz Men Eda New 09/ Abbay Abbay / Yene Ayal 10/ Zerafewa / Eregedawo + CD Bonus : Getatchew Mekuria & Instant Composers Pool Orchestra, The Ex, Haile Selassie 1 Theatre Orchestra
Pierre Cécile © le son du grisli


Charles, Gross, Hautzinger, Marchetti : Tsstt! (Monotype, 2012) / Zea : Bourgeois Blues (OOCCII, 2012)

charles hautzinger gross marchetti tssst

Tsstt ! Bzzz ! Wooshhhh ! Clkt ! En cinq pièces courtes et moins d'une demi-heure, à coups de zips, de zaps et de sulfateuses portatives, l'association de Xavier Charles (clarinette), Franz Hautzinger (trompette quart de ton), Jean-Philippe Gross (dispositif électroacoustique) et Lionel Marchetti (magnétophone Revox B77, radio), relève le défi de maintenir l'attention de l'auditeur sans lasser. Si cela tient, à n'en pas douter, à l'heureuse brièveté de ce disque enregistré en janvier 2010 à Metz, il faut également l'imputer à la variété des climats créés.

Busy & buzzy, le groupe (qu'un Thomas Lehn ne déparerait pas – on ne peut non plus s'empêcher de penser à Jérôme Noetinger ou eRikm pour la section des « machines ») évite l'asphyxie de la seule course aux effets, aux scratches ou aux pétarades de flipper ; des nappes d'attente, crénelées de stridences, savent se bâtir et quand la bâche de la pochette se soulève, une bribe dixie, oui, s'échappe, un mécanisme s'emboucle, un jet de vapeur fuse... Sans renverser les codes de ce genre d'électrimpro mixte, le quartet déploie un bel art de l'espace et une intelligente effervescence.

Xavier Charles, Jean-Philippe Gross, Franz Hautzinger, Lionel Marchetti : Tsstt ! (Monotype)
Enregistrement : 2010. Edition : 2012.
CD : 01-05/ 01-05
Guillaume Tarche @ Le son du grisli

zea xavier charles bourgeois blues

On retrouve Xavier Charles sur un 45 tours que publie Zea (Arnold de Boer) : Bourgeois Blues. Sous le blues promis par ce titre de Lead Belly dont Mark E. Smith retoucha les paroles, trouver des chansons en anglais qui oscillent entre pop et folk : Charles y intervient en effronté qui ornemente et assure de son soutien une guitare (folk ou électrique) obnubilée par les rythmes d’Afrique. Pour la seconde face, surtout.

EN ECOUTE >>> Bourgeois Blues

Zea, Xavier Charles : Bourgeois Blues (OCCII)
Enregistrement : 2011. Edition : 2012.
45 tours : A/ Bourgeois Blues B1/ It’s Quiet B2/ Insecurity Expert
Guillaume Belhomme © Le son du grisli


Zea, Oscar Jan Hoogland : Summing (Makkum, 2020)

A l'occasion (et jusqu'à) la parution, à la fin du mois d'avril 2022, de l'anthologie du Son du grisli aux éditions Lenka lente, nous vous offrons une dernière salve de chroniques récentes (et évidemment inédites). Après quoi, ce sera la fermeture. 

zea summing copy

J’ai bien mieux pour toi que le coton tige qu’on veut te fourrager dans le pif pour cause de flippe virale, et c’est un truc qu’on se mettra dans l’oreille. Alors ? Un riff de guitare électrique et un clavier derrière : voilà le duo Zea (Arnold de Boer) / Oscar Jan Hoogland parti battre la campagne sonore qui l’environne (l’Hollandaise). Oui mais voilà, le guitaro-chanteur et le pianiste aiment les voyages.

Avec la frénésie qu’on connaît au vociférant de The Ex, les voilà donc sur tous les fronts : hérésie africaniste (les vieux synthés nous ramènent aux premiers Youssou N’Dour), babiole asiatique, berceuse européenne… C’est les Talking Heads sur les routes de l’Afrobeat ou Captain Beefheart qui sirtakisse… Excentrique, jouissif, le grand cirque que Zea et Hoogland distillent en petit comité en mérite un bien plus grand. Un grand comme le monde, un généreux comme leur paire. 

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The Ex : 27 Passports (Ex, 2018)

the ex 27 passports

Tandis que je mettais un terme à l’écriture d’un prochain best-seller – c’est une simple supposition – intitulé « Pourquoi en finir avec les voyages », voilà que paraît le nouvel album de The Ex, 27 Passports. Vingt-sept, pensai-je, les pauvres.

Trop d’obligations, de contraintes et d’atermoiements, en effet, dans ces transports de bétails qui déverseront à distance de l’endroit qu’ils « occupent » leur encombrement inapte, certes, mais soulevé (quand même) par la lecture du dernier Sylvain Tesson. Mais vingt-sept passeports, qu’est-ce à dire ? Par musicien ? Chaque année ? On sait pourtant que les conditions sont désormais difficiles, des groupes qui voyagent parmi les troupeaux d’ingénus qui mangent des kilomètres pour se les comparer sur Facebook…

Mais puisque The Ex est revenu de l’expérience – d’Afrique, notamment, à la fois réalité et fantasme qui interroge son art depuis Mudbird Shivers et l’influence depuis sa première tournée en Ethiopie –, rendons-lui hommage. A ses formules répétitives, à ses rengaines martelées, l’Afrique a redonné une direction, pour ne pas dire un sens, dont profitent pleinement Soon All Cities, The Heart Conductor, Birth ou The Sitting Chins.

Ailleurs, c’est un Ex historique, mais vaillant à hauteur : les motifs répétés à satiété trouvant leur raison d’être dans une poésie qui ne peut être envisagée que « de front » (This Car Is My Guest), les accrocs de guitares renvoyant au temps où le Dog Faced Hermans (Andy Moor) ne faisait pas encore partie de The Ex (Piecemeal). Et c’est déjà le retour en première plage : Arnold de Boer affirme que toutes les villes se ressemblent et qu’il n’est qu’une urgence : la fuite.

La fuite, c’est d’accord, mais en chansons. Car The Ex est encore capable de chansons – peu de groupes nés dans les années 1980 peuvent en faire entendre autant – qui nous réconcilieraient presque avec le goût du voyage, voire nous en redonnerait l’envie : que The Ex se produise dans cet endroit éloigné [tous les concerts sont ici], et alors nous irons.

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Ex
Edition : 2018.
Guillaume Belhomme © Le son du grisli



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