Schlippenbach Trio : Features (HatOLOGY, 2015) / First Recordings (Trost, 2014)
A intervalles plus ou moins réguliers, ce vieux trio (voir ci-dessous) revient hanter nos étagères. Les vieux copains, on les connaît, on les écoute, on connait leurs mécanismes et l'on sait aussi qu’aujourd’hui ils ne vont pas fissurer la routine. Mais les vieux copains ne sont pas de vieux copains pour rien. Ils ont étoilé de noires nuits, sauvé de mornes journées. Et ils sont toujours dans la cité.
Les figures cassantes d’Evan Parker s’oublient parfois, les fusées de son vieux ténor ne possèdent plus la dureté d’antan. Mais le phrasé est toujours aussi intense, soutenu. Paul Lovens s’arrime de résonances, roule sur la peau, fusionne les métaux. Alex von Schlippenbach soutient l’espace, lui chante louanges et dithyrambes. Et si la tension du début s’est domestiquée au profit de l’attente et de la résonance, restent toujours la présence, les duos inspirés (souffle continu contre quincaillerie percussive, ténor rugueux contre frappe hirsute). Et quoi de mieux que les vieux copains pour réinventer le monde ?
Schlippenbach Trio
Features
Alexander von Schlippenbach : Features (Intakt / Orkhêstra International)
Enregistrement : 2013. Edition : 2015.
CD : 01-15/ 01-15
Luc Bouquet © Le son du grisli
Publiées à la fin des années 1970 par FMP – dont Lasse Marhaug a subtilement emprunté les codes graphiques pour composer cette couverture – sur la compilation For Example. Workshop Freie Musik 1969 - 1978, ces First Recordings (devant un maigre public) datent du 2 avril 1972. Quelques mois avant l’enregistrement de Pakistani Pomade, ils annonçaient donc le bel avenir du trio. Epais, nerveux, remuants, les premiers essais sont des tentatives qui aboutissent : fuites et déferlantes valant échappatoires, frappes sur piano et batterie contre soprano en équilibre ou ténor sifflant. Après quoi, le trio traîne sur gravats (Then, Silence) : ballade étrange (et murmurée), qui s’avèrera inspirante.
Schlippenbach Trio : First Recordings (Trost)
Enregistrement : 2 avril 1972. Edition : 2014.
CD / LP : 01/ Deal 02/ Village 03A/ With Forks and Hope 03B/ Then, Silence
Guillaume Belhomme © Le son du grisli
Quat Quartet : Live at Hasselt (NoBusiness, 2013)
L'étude – enregistrée en public le 18 juin 2011 – est périlleuse. Son sujet : l'effet du temps sur la force de frappe de Fred Van Hove et de Paul Lovens. Sa conclusion est rassurante, voire heureuse.
Auprès des deux frappeurs annoncés, en trouver deux autres : Els Vandeweyer, jeune vibraphoniste belge, et Martin Blume, percussionniste entendu jadis aux côtés de Phil Wachsmann, Frank Gratkowski ou Joëlle Léandre. Alertes, impulsives, en d'autres mots faites pour s'entendre, quatre pratiques célèbrent un art de l'emportement qui accuse un faible pour les répétitions et les incartades bravaches.
Sur la troisième pièce, les musiciens se passent le relais avant que Van Hove et Vandeweyer (dont le vibraphone s'interdit tout bavardage – chose rare dans le métier) rivalisent de fantaisie : ardents eux aussi, voici les accords transportés par les franches coupes de Lovens, les rattrappages rythmiques de Blume. Du bout des doigts, il est déjà temps de conclure : l'étude qu'est ce Live at Hasselt n'était, tous comptes faits, pas périlleuse, mais promise à de merveilleux accidents ; surtout, elle fut menée de mains de maîtres.
Quat Quartet : Live at Hasselt (NoBusiness)
Enregistrement : 18 juin 2011. Edition : 2013.
CD : 01-04/ 01-04
Guillaume Belhomme © Le son du grisli
Ce samedi 31 août, Fred Van Hove improvisera à Mulhouse en duo avec Shih-Yang Lee. Pour cadre... Météo.
Sudo Quartet : Live at Banlieue Bleue (NoBusiness, 2012)
S’il démontre que le festival Banlieues Bleues peut encore être pourvoyeur d’instants d’intérêt, ce Live célèbre encore davantage la complicité intacte du duo de cordes Léandre / Zingaro, sublimée par les présences de Sebi Tramontana (troisième larron d’un Chicken Check In Complex jadis enregistré aux Instants Chavirés) et Paul Lovens.
Volatil, le violoniste appelle à lui tous les graves de la contrebasse, les endort sur phrase défaite – la voix de Léandre prend alors le relai – ou entame avec eux un jeu de rapprochement et d’éloignement dont les mouvements profitent de la cohérence du quartette. C’est qu’en arrière-fond, trombone et batterie œuvrent aussi à la prestation haute : litanie improvisée délicate et puissante, voilà pour le souvenir.
EN ECOUTE >>> Sudo 1 >>> Sudo 4
Sudo Quartet : Live at Banlieue Bleue (NoBusiness)
Enregistrement : 25 mars 2011. Edition : 2013.
CD : 01-05/ Sudo 1 – Sudo 5
Guillaume Belhomme © le son du grisli
John Corbett : Vinyl Freak. Love Letters to a Dying Medium (Duke University Press, 2017)
Avant d’être le galeriste qui, depuis Chicago et associé à Jim Dempsey, réédite d’indispensables disques de jazz et d’improvisation (Joe McPhee, Peter Brötzmann, Staffan Harde, Tom Prehn…), John Corbett signa de nombreux textes sur d’indispensables disques d’improvisation et de jazz. Pour DownBeat, notamment, dans une colonne dont le titre est repris (rien n’est jamais dû au hasard) par celui de ce livre : Vinyl Freak.
Ancien collectionneur de papillons, Corbett revient en introduction sur ses premières émotions d’auditeur et, surtout, de palpeur de vinyle – Sun Ra, déjà, employé dans les Sensational Guitars Of Dan & Dale jouant les thèmes de Batman And Robin (disque Tifton). Après quoi, rassemble-t-il un lot de confessions obligées par les vinyles, tous de son choix (mais pas tous 33 tours, ni tous « anciens », puisqu’on y trouve par exemple Irregular, 45 tours de Martin Küchen / Martin Klapper estampillé Fylkingen).
Puisqu’il travaille alors pour DownBeat, Corbett fait avec un lectorat (ce peut être une simple supposition) peu ouvert d’esprit : ses premiers papiers évoquent en conséquence Philly Joe Jones, Paul Gonsalves, Chris McGregor ou Tom Stewart – cornettiste dont le Sextette/Quintette cache quand même Steve Lacy (Young Lacy, Early Days…).Alors, voilà que le propos « déraille », car Steve Lacy est, avec Sun Ra – Corbett a consacré au pianiste et chef de crew plusieurs ouvrages, dont Sun Ra + Ayéaton : Space, Interiors & Exteriors 1972 –, le musicien qui parle sans doute le plus au mélomane qu’il est. Une fois en / dans la place, le Stewart de Troie, de cinq ou de six, peut ainsi décharger Mauricio Kagel, Anthony Braxton, Diamanda Galas, Franz Koglmann, Morton Feldman, François Tusques, The Residents, Bill Dixon ou David Toop…
Bien sûr, l’occasion (et la quête de l’occasion) est pour Corbett celle de parler de lui : dire la différence à faire entre un Diskaholic Anonymous – faut-il revenir sur l’association Mats Gustafsson / Thurston Moore / Jim O’Rourke ? – et un simple snob, son avis sur la compétition (avec le même Gustafsson, notamment, avec qui il échange depuis longtemps, comme le disait cet article d’un one-shot jazz Stop Smiling), la place qu’il réserve à l’esthétique dans un panier de crabo-collectionneurs ou l’espoir qu’il a de voir rééditées des perles sorties jadis à quelques centaines d’exemplaires – ainsi établit-il, comme en complément à ses papiers DownBeat, une liste de 131 tirages limités (certes, pas que) à aller « retrouver » d’urgence.
Premier de tous, ce Weavers du trio Günter Christmann / Paul Lovens / Maarten Altena que publia Po Torch en 1980. Dans la liste, aussi : deux Lacy, mais elle aurait pu en contenir davantage – Corbett & Dempsey ont récemment racheté un lot de bandes à Hat Hut, ce qui augure de rééditions. Autant de conseils intéressés qui ajoutent aux curiosités – A.K. Salim (dans le groupe duquel on trouvera la saturnien Pat Patrick en plus de Yusef Lateef), Orchestre Régional de Mopti, The Korean Black Eyes (là se situe peut-être la frontière entre freak et snobisme dont nous parlions tout à l’heure) – que renferme le livre en plus de celle, orange, qui prend la forme d’un flexi : interprétation d’It’s A Good Day par Sun Ra au clavier. Quelques secondes – une minute ou deux, vraiment ? – qui ajoutent au « curieux » de la chose et la rendent anecdotique, et la rendent indispensable.
John Corbett : Vinyl Freak. Love Letters to a Dying Medium
Duke University Press
Edition : 2017
Guillaume Belhomme © Le son du grisli
Schlippenbach Quartet : At Quartier Latin (FMP, 2010)
Si, au disque, les quatre décennies d’aventures du Schlippenbach Trio sont pour le moins correctement documentées, les avatars du groupe, lorsqu’il a été étendu à un quartet (entre 1973 et 1983, par adjonction d’un bassiste – successivement Kowald puis Silva), n’ont comparativement laissé que peu d’enregistrements.
Les deux concerts berlinois reproduits aujourd’hui – qui combinent la face B du vinyle Three Nails Left (février 1975) et l’intégralité du LP intitulé The Hidden Peak (janvier 1977) – permettent d’écouter Alexander von Schlippenbach (piano), Evan Parker (saxophones ténor & soprano), Paul Lovens (percussions) et Peter Kowald (contrebasse) dans des conditions satisfaisantes, tout en faisant un intéressant pendant au disque publié il y a une dizaine d’années par Atavistic, Hunting the Snake (septembre 1975).
Ecouter ou réécouter cette musique, trente-cinq ans après sa création, c’est aussi s’interroger sur sa réception à l’époque et remettre en cause la doxa de l’oncle qui, nostalgique, s’acharna à nous convaincre que, vraiment, l’âge d’or du free (branche teutonne) en Europe – ces seventies au milieu desquelles nous naissions, tandis que mouraient certains idéaux dudit tonton – « c’était super, pur & dur, politisé » et tout et tout... que la musique y était « libre & sauvage »…
Eh bien, je crains de ne pas entendre là le free « intransigeant, viril, destructeur », fantasmé par certains auditeurs vétérans (de ce qu’ils prenaient pour une guerre) mais, précisément, une musique qui tient par un équilibre de concessions (et pas un équilibre de la terreur sonique, héroïco-kaputt et sanglante), une œuvre de gentlemen à grandes oreilles, qui certes s’invente dans les opérations qui la réalisent, mais que travaillent de scrupuleux agencements de textures choisies et une délicate pensée des formes. Cette raffinerie raffinée, prenant à l’occasion l’allure d’une ébullition, agit comme la distillation des essences subtiles du jazz, annonçant ce que le groupe, en trio, poursuivrait : condensation, précipités…
Schlippenbach Quartet : At Quartier Latin (FMP / Instant jazz)
Enregistrement : 1975-1977. Edition : 2010.
CD : 01/ Black Holes 02/ Three Nails Left, for P.L. 03/ The Hidden Peak I 04/ The Hidden Peak II 05/ The Hidden Peak III 06/ The Hidden Peak IV 07/ The Hidden Peak V
Guillaume Tarche © Le son du grisli
Ce disque est l'un des douze (rééditions ou enregistrements inédits) de la boîte-rétrospective que publie ces jours-ci le label FMP. A l'intérieur, trouver aussi un grand livre de photographies et de textes (études, index de musiciens, catalogue...) qui finit de célébrer quarante années d'activités intenses.
Globe Unity Orchestra : Baden-Baden '75 (FMP, 2010)
En 1975, le Globe Unity Orchestra & Guests d’Alexander von Schlippenbach c’était Enrico Rava, Manfred Schoof, Kenny Wheeler, Anthony Braxton, Peter Brötzmann, Rüdiger Carl, Gerd Dudek, Evan Parker, Michel Pilz, Günter Christmann, Albert Mangelsdorff, Paul Rutheford, Buschi Niebergall, Peter Kowald et Paul Lovens.
C’était Maranao, composition d’Enrico Rava : un fracas collectif, des cuivres en ébullition, un enfer en décomposition. Un riff émergeant de la masse et ce n’est plus le GUO mais le Brotherhood of Breath. C’était aussi U-487, composition d’Anthony Braxton : une marche qui ouvre et referme l’œuvre, des percées solitaires (l’élan percussif de Schlippenbach, les matières vibrantes de Lovens), des terres blessées d’orgueil et de flammes.
Mais il y avait aussi Jahrmarkt de Peter Kowald : de l’alarme et de l’effroi, des aigus perçants, des mélodies qui s’enchâssent (Straight No Chaser, l’Internationale, La Paloma) avant le retour aux sauvageries collectives. Il y avait également Hanebüchen du leader : des frissons de cuivres, des crescendos sans fin, une flûte qui garde le cap et un jazz qui résiste tant bien que mal aux assauts de cuivres déchaînés.
Et c’était enfin The Forge, autre composition de Schlippenbach : une texture syncopée vite dessoudée ; visite approfondie – guides idéaux – de l’enfer le plus profond. En 1975, le GUO c’était cela. Et ce cela n’était pas rien.
Globe Unity Orchestra : Baden-Baden ’75 (FMP / Instant Jazz)
Enregistrement : 1975. Edition : 2010.
CD : 01/ Maranao 02/ U-487 03/ Jahmarkt 04/ Hanebüchen 05/ The Forge
Luc Bouquet © Le son du grisli
Ce disque est l'un des douze (rééditions ou enregistrements inédits) de la boîte-rétrospective que publie ces jours-ci le label FMP. A l'intérieur, trouver aussi un grand livre de photographies et de textes (études, index de musiciens, catalogue...) qui finit de célébrer quarante années d'activités intenses.
Michel Pilz, Peter Kowald, Paul Lovens : Carpathes (FMP, 1975)
Disque de trio / duo / solo de trois musiciens vus et entendus au sein du Globe Unity, formation incontournable des années 70. Pourquoi ce vinyle ? Michel Pilz à la clarinette basse – quel son et quel talent (à écouter : le morceau Krebsauel en solo) ! Monsieur Peter Kowald – toujours indispensable à ce jour grâce aux nombreux enregistrements. Paul Lovens – sa Grande période (à écouter le morceau Pikolo für den Glöckner von Notre Dame en trio) et aussi pour son label de vinyles Po Torch Records (fin 70 / fin 80). Ce disque est également issu du merveilleux catalogue de vinyles de Free Music Production de l'époque Jost Gebers et Dieter Hahne, avec des pochettes « bien trempées ».
Michel Pilz, Peter Kowald, Paul Lovens : Carpathes (FMP)
Enregistrement : 1975.
LP : 01/ Un peu d’ail 02/ Krebsauel 03/ Inno Chika Chow 04/ Billiger Willi 05/ Willige Billie 06/ Carpathes 07/ Pilolo für den Glöckner von Notre Dame 08/ Zythum
Jean-Noël Cognard © Le son du grisli
Percussionniste efficient, Jean-Noël Cognard multiplie les projets vigoureux : Salmigondis, Tankj, Tribraque. On l’entendait encore récemment en Empan.
Schlippenbach Trio : Bauhaus Dessau (Intakt, 2010)
C’est avec une régularité comparable – mais tous les deux ans seulement – à celle que montre le trio en prenant la route, chaque hiver, pour une tournée en forme de Winterreise (disque psi), que nous parvient un nouveau bulletin de l’excellente santé musicale du groupe, fondé il y a près de quarante ans.
Cet enregistrement de novembre dernier, qui entre en résonance avec tout un corpus phonographique, a été saisi en concert à Dessau : il offre une longue improvisation de quarante minutes, prolongée de deux pièces plus brèves, et fait en quelque sorte pendant aux dix instantanés du précédent disque (Gold Is Where You Find It), gravé en studio, courant 2007 – tout comme il y a vingt ans, chez FMP, Physics répondait à sa manière aux Elf Bagatellen…
D’une compacité et d’un raffinement toujours aussi étonnants, l’agrégation d’Alexander von Schlippenbach (piano), Evan Parker (au seul saxophone ténor) et Paul Lovens (batterie) déploie ses mondes en une variation infinie que l’auditeur suit avec d’autant plus de plaisir que cette continuation, cette « version », cette reprise du matériau fait remonter de véritables pépites… Si les efficaces principes de l’économie intime du trio – énergie au combustible rythmique, rouleaux pianistiques en guise de paliers (redistribution, entrées, bifurcations), constructions klangfarbentes jamais barbantes – sont connus, la musique n’en est pas moins merveilleusement malaxée et tannée, délicatement hirsute et poétique : une houle de très grande classe !
Schlippenbach Trio : Bauhaus Dessau (Intakt / Orkhêstra International)
Enregistrement : 2009. Edition : 2010.
CD : 01/ Bauhaus 1 02/ Bauhaus 2 03/ Bauhaus 3
Guillaume Tarche © Le son du grisli
Alexander von Schlippenbach: Gold Is Where You Find It (Intakt - 2008)
Suite des aventures du Schlippenbach Trio, Gold Is Where You Find It scelle l’entente et découvre au passage de nouvelles possibilités, offertes par quelques années d’efforts qui auront forgé la maîtrise.
A Baden-Baden, fin 2007, Schlippenbach, Evan Parker et Paul Lovens remirent donc l'ouvrage sur le métier, de progressions difficiles sur lesquelles s’entendre mieux qu’ailleurs (ZDWA) en ruades attendues mais toujours supérieures (Three in One). Différents, quelques morceaux d’abstraction conseillent aux musiciens l’installation inquiète d’une atmosphère à qui l’on refuse tout développement (K. SP), ou la mise en place lente d’une entente tripartite gagnée par la vitesse (Gold Is Where You Find It). Définitif, si les 35 ans du Schlippenbach Trio ne promettaient pas d’en prendre encore et de s’affiner.
CD: 01/ ZDWA 02/ Happy Flapping 03/ Amorpha 04/ Gold Is Where You Find It 05/ K. SP 06/ Monkey’s Fist 07/ Lekko 08/ Cloudburst 09/ Three in One 10/ The Bells of St. K >>> Alexander von Schlippenbach - Gold Is Where You Find It - 2008 - Intakt Records. Distribution Orkhêstra International.
Alexander Von Schlippenbach: Winterreise (Psi - 2006)
Extraits de l’enregistrement de deux concerts donnés au Loft de Cologne en 2004 et 2005, Winterreise redit l’assurance avec laquelle Alexander Von Schlippenbach (piano), Evan Parker (saxophone ténor) et Paul Lovens (percussions) continuent d’interroger ensemble l’improvisation. De deux manières différentes…
Frénétique, d’abord (Winterreise 1). Les ruades de Schlippenbach ne mettant pas longtemps à pousser Parker au free flamboyant, quand Lovens trame dans l’ombre un exposé brillant des possibilités des cymbales et toms. Se réservant quelques pauses, le trio peut laisser discourir seul un piano aux déliés romantiques, avant de dévaler une nouvelle pente abrupte, plage de musique emportée sur laquelle chacun excelle.
Prudent et plus sombre, ensuite (Winterreise 2). Là, les graves lents et réverbérés du piano s’opposent à la pratique expérimentale de Parker, qui traîne ses notes sur les sifflements fomentés sur cymbales par Lovens. Légère, la main droite de Schlippenbach ose des interventions plus concrètes qui inciteront l’ensemble à charger à nouveau, pour conclure, en destructeurs, un disque remarquable.
CD: 01/ Winterreise 1 02/ Winterreise 2
Alexander Von Schlippenbach - Winterreise - 2006 - Psi. Distribution Orkhêstra International.