Le son du grisli

Bruits qui changent de l'ordinaire


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John Cage : Silence (Contrechamps / Héros-Limite, 2012)

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« Conférences et écrits de John Cage », voici ce que renferme Silence – à l'origine publié en 1961, ici traduit (de brillante manière) par Vincent Barras pour les éditions Contrechamps et Héros-Limite. Plus qu'une pensée, un traité, un diktat..., c'est là un précis d’écoute que clarifie un savoir-faire hors du commun – Nouvelle musique : nouvelle écoute, écrit le compositeur dans le texte « Musique expérimentale ».

Vingt années d'articles et de conférences, et aussi d'expériences, de tentatives de dire voire d'expliquer ce qui peut s'écouter et se jouer même – ainsi Cage précise-t-il qu'il a pu employer pour ces fragments de théorie des moyens de composition analogues à mes moyens de composition dans le champ de la musique, comme mettre en usage un féroce « souci de la poésie » ou faire appel au Zen ou au hasard. Comme pour ses œuvres musicales, le compositeur ne cache rien de ses procédés.

Tout comme son statut de novateur ne l’oblige en rien à revêtir l’habit d’iconoclaste fiévreux : si la fièvre monte en Silence, c’est d’ingénuité, de trouvailles et d’humour – les unes à l’autre scellés parfois, comme dans « Indétermination », dont la police d’écriture est d’une petite taille choisie pour ajouter au caractère intentionnellement pontifiant de la conférence. Ainsi Cage converse-t-il avec Erik Satie, dont il reprend l’idée de « musique d’ameublement (…) qui fera partie des bruits ambiants, qui en tiendra compte », parsème-t-il son propos de références nombreuses (Maître Eckhart ou maîtres Zen, Morton Feldman, …) et d’anecdotes légères (collage de bandes avec Earle Brown, visite d’un parc en compagnie d’enfants avec Merce Cunningham…).

Parfois, les articles ont valeur d’explication (Imaginary Landscapes IV, Music of Changes) ; d’autres fois, comme dans « Communication », ils posent davantage de questions qu’ils n’apportent de réponses ; toujours, Cage conserve une distance qui profite à l’art qu’il a de la parole. C'est pourqoi au terme de sa lecture – qu’il prendra soin de fractionner –, le lecteur pourra dire avec John CageNos oreilles sont maintenant en excellente condition.

première vue de Silence  seconde vue de Silence

John Cage : Silence (Contrechamps / Héros-Limite / Metamkine)
Edition : 2012.
Livre : Silence
Guillaume Belhomme © Le son du grisli



Source Music of the Avant-Garde 1966-1973 (University of California Press, 2011)

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Quand est sorti Source Music of the Avant-Garde, l’espoir est né de voir réédités un jour les onze numéros de Source publiés entre 1966 et 1973. Voilà qui est fait, et en un seul et unique volume. Aidé de Douglas Kahn et Nilendra Gurusinghe, Larry Austin (l’éditeur historique, élève de Darius Milhaud et trompettiste du New Music Ensemble) raconte l’histoire d’un journal qui donnait la priorité… aux idées.

Dans sa préface au premier numéro, Kahn dit qu’il veut faire de Source un « outil de communication » pour le compositeur. Sans attendre, son vœu fut réalisé : dans ses pages, Robert Ashley y explique ses graphiques, Earle Brown parle de forme et de non-forme musicales, Pauline Oliveros et Morton Feldman rêvent de faire disparaître le compositeur, Gordon Mumma traite de Music for Solo Performing d’Alvin Lucier, John Cage offre sa partition de 4’33’’, Christian Wolff celle d’Edges, Cornelius Cardew des extraits de The Great Learning, etc., etc.

D’autres noms peuvent encore être cités : Annea Lockwood, Steve Reich, James Tenney, Anthony Braxton, Gavin Bryars, Max Neuhaus, Nam June Païk… Ce qui fait beaucoup de listes, mais elles ont un but : celui d'inciter le lecteur à aller fouiller dans cet ouvrage essentiel avant qu’il devienne aussi rare que les numéros originaux de Source (dont vous trouverez ci-dessous les onze couvertures originales, non reproduites dans le livre). 

Larry Austin, Douglas Kahn : Source Music of the Avant-Garde 1966-1973 (University of California Press / Amazon)
Edition : 2011.
Livre
Héctor Cabrero © Le son du grisli

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Michael Francis Duch : Edges (+3dB, 2010)

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Le contrebassiste Michael Francis Duch inaugure avec Edges une série d’enregistrements intitulée « Music for One » sur le label +3dB. Pour donner un aperçu de la largeur et de la hauteur de sa palette, il s’est servi dans le répertoire de Christian Wolff, Earle Brown, Cornelius Cardew, Morton Feldman et Howard Skempton.

Ce n’est d’ailleurs pas tant à un exercice d’interprète que se livre Duch qu’à un jeu d’évocations de grands fantômes qui le hantent encore. Sur Edges, il pèse de tout son poids sur l’archet pour qu’apparaisse sur la partition le visage en bas-reliefs de Christian Wolff. Pareil pour Brown ou Feldman : leurs silhouettes sont dessinées dans la lenteur et dans la nuance.

Pour faire mentir le chroniqueur ou l’empêcher de mettre au jour un système, Duch s’est gardé Octet ’61 de Cardew : c’est une obsession qui tourne au drame lorsque les notes s’abattent sur le compositeur comme sur l’interprète, l’hommage est un mille-feuilles de sons démoniaques. Ce n’est même plus seulement un hommage, c’est un chant d’amour que Duch consacre à ses modèles. Et c’est un chant d’espoir qu’il offer à ses auditeurs.

Michael Francis Duch : Edges (+3dB)
Edition : 2010.
CD : 01/ Christian Wolff : Edges 02/ Earle Brown : December 1952 03/ Cornelius Cardew : Octet ’61 04/ Morton Feldman : Projection I 05/ Howard Skempton : For Strings
Héctor Cabrero © Le son du grisli



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