Joe McPhee, Eli Keszler : Ithaca (8mm, 2012)
On sait l’intérêt que Joe McPhee trouve depuis toujours à interroger sa force d’invention au contact de fauteurs de troubles sonores (John Snyder, Raymond Boni…). Il se peut que ces fauteurs de troubles soient batteurs (John Heward, Chris Corsano, Paal Nilssen-Love…). A cette liste pointilleuse, il faudra désormais ajouter le nom d’Eli Keszler.
La rencontre de McPhee avec le jeune homme – qui peut ailleurs user de guitares ou penser de retentissantes installations – date de 2010 et eut lieu à l’Université Cornell. Les choses qu’ils trouvèrent à se dire révèlent des références communes (free jazz, lyrisme et virulence) et des enjeux voisins (recherches sur le son quelques fois détachées de toute optique musicale). Au soprano, McPhee renvoie chacun des signaux nés de la frappe sèche de Keszler ; en halluciné qui en démontre, celui-ci peut aussi interférer dans la progression mélodique ou venir casser un sifflement endurant.
Déjà convaincant, le duo connaît un sursaut d’originalité sur la seconde face : là, McPhee retourne aux graves pour faire face aux aigus que charrient les cymbales avant de débiter des phrases qui entameront l'équilibre et la quiétude trouvées. Si Keszler démontre qu’il est en mesure de battre le tambour avec un aplomb aussi féroce que Corsano et Nilssen-Love, les mobiles phoniques qu’il déplace en compagnie de McPhee rappellent les atmosphères que ce-dernier peignit avec Snyder ou Heward. Sur cette nuance, voici la boucle bouclée.
Joe McPhee, Eli Keszler : Ithaca (8mm)
Enregistrement : 2010. Edition : 2012.
LP : A/ - B/ -
Guillaume Belhomme © Le son du grisli