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Le son du grisli
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1 septembre 2011

Festival Météo 2011 : Mulhouse, 11-27 août 2011

météo 2011

Dans le champ des musiques improvisées, peu de festivals français peuvent se permettre de seulement rêver une affiche telle que celle conçue par Météo. Bien sûr, il faut quelques moyens, mais il faut aussi faire preuve d’un minimum d’attention : « L’improvisation ne s’improvise pas », répétait le nom d’un stage animé cette année par Joëlle Léandre dans le cadre du festival – certes, l’affirmation contraire (l’improvisation s’improvise) est tout aussi acceptable, mais qu’importe… Alors, l’oreille des organisateurs traîne des mois durant d’un concert à l’autre – l’imagination est en éveil et le pari en tête – dans le souci d’élaborer une programmation qui devra se montrer assez persuasive pour transformer, le temps de quelques jours, Mulhouse en capitale culturelle.

Cette année, par exemple, on trouva en divers endroits de la ville des personnalités faisant autorité dans le même temps qu’elles continuent de bel et bien composer sur (et avec) l’instant : le pianiste John Tilbury et le guitariste Keith Rowe qui jouèrent de dissonances et de suspensions, de discrétions et de mesure, au sommet d’un parking à étages ; le saxophoniste Daunik Lazro enveloppant de son invention la clarinette et la voix d’Isabelle Duthoit à la Chapelle Saint-Jean ; Joëlle Léandre en représentation au Noumatrouff aux côtés du violoncelliste Vincent Courtois ; le sopraniste Michel Doneda et le percussionniste Tatsuya Nakatani développant une collaboration dont l’entente fut consignée l’année dernière sur disque (White Stone Black Lamp, chez Kobo) ; Paul Lovens, batteur hétérodoxe et fantasque insatiable, en souteneur d’électroacoustique inspirée aux côtés des terribles Axel Dörner (trompette) et Kevin Drumm (électronique) ; le saxophoniste Urs Leimgruber et le pianiste Jacques Demierre emmenant de concert un sextette tranchant du nom de 6ix ; le contrebassiste Barry Guy, enfin, dont l'art des tensions n'a rien pu faire pour améliorer son discours avec le pianiste Agusti Fernandez et le batteur Ramon Lopez, plus souvent fade que véritablement convaincant.

D’autres noms à l’affiche : de plus jeunes, certes, mais de réputés aussi – glisser derrière ce tiret le principal reproche à faire aux organisateurs du festival qui donnent dans la confusion dès qu’ils décident (pour faire original peut-être) d’imposer un artiste « étonnant / décalé / à l’univers improbable », en un mot : superflu. Cette année, ce furent Alexandre Kittel, avilisseur de cymbales dont l’intervention tient davantage de la performance banale que de la recherche sonore, et Adrien Kessler, chanteur au piano électrique dont le cabaret frappé est aussi affecté qu’inutile, qui, en refusant l’invitation du festival sous prétexte de ne pas être tout à fait prêt encore à jouer seul devant un public, auraient gagné en honnêteté ce qu’ils ont perdu en crédibilité. Par souci de franchise, il faut indiquer que, à spectacle conventionnel, public conventionnel, l’un et l’autre n’auront pas manqué d’applaudissements.

De plus jeunes noms à l’affiche, écrivais-je donc, mais de réputés déjà : Xavier Charles à la clarinette et Jean-Luc Guionnet à l’orgue s’exprimant l’un et l’autre en solo et avec panache ; la pianiste Magda Mayas et la saxophoniste Christine Abdelnour balançant de rivalités graves en accord parfait sur une jolie pièce d’atmosphère ; le Berlin Sound Connective inventant en quartette un ouvrage tendu d’électroacoustique que capturera Jérôme Noetinger en ses machines pour le transformer ; Rhodri Davies, dont la harpe subtile guidera le trio Cranc le temps d’une belle et inquiète exploration des volumes de la friche DMC avant d’en faire le lendemain en compagnie de Clare Cooper un écrin post-industriel pour huit harpes d’exception.

Au nombre enfin des concerts véhéments qui emportèrent formes et fond, citer celui de The Ames Room (Jean-Luc Guionnet revenu au saxophone alto et accompagné de Clayton Thomas à la contrebasse et de Will Guthrie à la batterie, servant un free jazz qui existe donc encore, et même se montre vaillant), celui de The Ex soutenu par une section de vents composée de Ken Vandermark, Mats Gustafsson et Roy Paci, enfin celui de N.E.W., formation réunissant Alex Ward (guitare électrique), John Edwards (contrebasse) et Steve Noble (batterie), soit deux improvisateurs hors pair appelés auprès d’un guitariste exalté pour conclure une exceptionnelle semaine Météo.

Guillaume Belhomme © Mouvement / Le son du grisli

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