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Le son du grisli
paul lytton
2 décembre 2015

LDP 2015 : Carnet de route #29

ldp 2015 carnet de route 29

C’est à New York – second soir au IBeam – que Jacques Demierre et Urs Leimgruber auront passé Halloween. Et donc ? Eh bien, quand même !, les présences (pour ne pas dire les esprits) de Shelly Hirsch, Nate Wooley, Paul Lytton et Sylvie Courvoisier...  Avant de laisser place aux souvenirs, un mot sur un projet : parution du livre Listening en mars prochain.



31 octobre, Brooklyn, New York
IBeam

Heute ist Halloween! Viele Leute gehen maskiert und kostümiert auf die Strasse, sie lassen ihrer Fantasie und ihren Emotionen freien Lauf. Jacques und ich treffen uns um 7:00pm im Ibeam mit Kevin und Harald. Heute laden wir Shelly Hirsch, Nate Wooley und Paul Lytton für ein Zusammenspiel mit uns ein. Im ersten Teil spielen Shelly, Paul und Jacques im Trio. Das Trio beginnt entschlossen. Auf- und Abbau wechseln sich ab. Nach einzelnen Eruptionen wird die Musik immer wieder in die Stille zurückgeführt. Es entsteht ein mehrteiliges Stück, bestehend aus Klangräumen und abrupten Wechseln. Die Stimme, das Klavier und das Schlagzeug entwickeln kammermusikalisch einen extensiven Bogen mit wechselnder Dynamik. Anschliessend spielen Nate und ich im Duo. Ich kenne ihn als Spieler, treffe ihn jedoch das erste Mal für ein Zusammenspiel. Wir beginnen geräuschhaft aus dem Nichts. Der Zugang ist leicht. Der Funke springt sofort und wir stehen unmittelbar im gleichen Raum. Im offenen Schlagabtausch entstehen polyrhytmische und multiphone Klänge und Sequenzen. Nach einer Pause spielen wir alle im Quintett. Stille geht voraus. Kurze Einsätze, schroffe Töne, das Innehalten von Pausen manifestieren sich reduktiv und expressiv als klangliche Struktur. Wir entwickeln gemeinsam, wir zersetzen Aufgebautes abrupt in schnellen Wechseln. Klänge stehen blitzartig im Raum. Donnerndes Getöse hallt nach. Das Stück nimmt seinen Verlauf. Es wird wieder mal klar, die Musik beginnt mit der Auswahl Musiker. Das Casting hat heute definitiv gestimmt. Die Zuhörer sind begeistert und bedanken sich mit herzlichem Applaus.
U.L.

P1100547

« Vous êtes des "warriors" », me dit en souriant la pianiste et amie Sylvie Courvoisier au sortir de cette seconde soirée au IBeam. La métaphore guerrière me surprend, car aucun désir belliqueux ne vient nourrir mes sons, mais je la comprends : je perçois souvent ma pratique sonore comme une sorte d'art martial. Un art qui ne s'occuperait pas que du combat, mais qui, comme les arts martiaux traditionnels, intègrerait la dimension spirituelle, au sens large. Un art qui réunirait autant les aspects externes, techniques, de la pratique sonore improvisée, que ses dimensions les plus internes, énergétiques. Ainsi, assis devant ce même piano SCHIMMEL, 1885, numéro 295.196, tout se passe comme si, prêt une seconde fois au « combat » en deux jours, l'engagement des forces, de mes forces, était, l'expérience se renouvelant performance après performance, d'entrer en contact avec ce que je pourrais décrire comme un champ magnétique entourant chacun des éléments de la situation de concert. Il me faut entrer en contact avec les forces animant ce champ, les laisser effectuer toute modification sur moi-même, les laisser agir sur l'équilibre et le positionnement des formes en jeu. Combat particulier, où je dois céder, je dois abandonner toute résistance pour que ces forces « magnétiques » s'expriment le plus librement et le plus largement possible. Mais comment accéder à ce champ ? Quelle voie emprunter pour permettre cet échange ? La pensée en tant que telle est inadéquate, je crois en avoir déjà parlé dans ce Carnet de route, car elle introduit une distance entre elle-même et son objet. Le jeu improvisé n'est pas lieu de pensée, il est pensée autonome, qui déroule ses propres modes d'action à travers le corps jouant. Car c'est là, oui, dans le corps, que se construit notre rapport à l'instant, que s'élabore la qualité des liens tissés entre notre présence à lui-même et ce que nous sommes en train de faire. Mais ce corps n'est pas neutre. Par une longue pratique, le vide qu'il parvient à convoquer n'est pas néant, mais présence potentielle de tout ce qui pourrait survenir, même et peut-être surtout, ce qui relèverait de l'inouï et de l'imprévisible. Peut-être sommes-nous des « warriors » dans la manière que nous avons de projeter nos modes d'action non rationnels afin de créer un pont entre le dedans de notre expérience intérieure et le dehors de la situation de concert. Des « warriors » qui jouent, comme des enfants, à un jeu en continuelle transformation, où la moindre modification intérieure ou extérieure, change de façon radicale autant notre rapport à nous-mêmes que notre rapport au monde. Subtil équilibre céleste du jaillissement spontané, souvent perturbé par l'humain désir de plaire...
J.D.

P1100591

Photos : Jacques Demierre

> LIRE L’INTÉGRALITÉ DU CARNET DE ROUTE

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