John Butcher : Winter Gardens (Kukuruku, 2012)
Deux temps auront composé Winter Gardens, solo qui profite d’autant de concerts que John Butcher donna en 2011 à Londres et Milwaukee. Au ténor et au soprano, toujours, le saxophoniste agit ; de mille manières, encore.
En l’église St Anne de Londres, Butcher donna les deux pièces qui ouvrent chacune des faces du trente-trois tours. C’est là un nouveau dialogue avec un « endroit qui résonne » : d’aphonie en diphonie, le musicien marque son territoire, sujet à expressions volatiles autant qu’à tremblements lyriques : les vêpres qu’il sonne craignant la passion de l’homme pour les manipulations sonores. Sous les traits d’un oiseau-lyre qui aurait troqué l’imitation pour une invention acerbe, Butcher évolue en virtuose. Sous ceux d’un oiseau de feu, il répète ici deux notes, là singe une rhapsodie de Gershwin, ailleurs en appelle au Dixit Dominus de Verdi – au ténor, ses accentuations féroces commandent des pansements de sons délicats en conséquence.
Echappées du Vogel Hall de Milwaukee, deux pièces encore : amplification aidant, le ténor va de clefs qui tombent et claquent en harmoniques que la superposition affole ; pneumatiques et freinages, nouveaux aigus sifflants, retours d’une note sur elle-même, illustrent le portrait d’un « Butcher by the Sea ». Le rapprochement de ces deux moments n’est pas vain, qui renvoie au dictionnaire à la page de « Spectral », dont Tristan Murail parlait ainsi : « La révolution de la musique spectrale se situe là, dans ce basculement de la conception de l’écoute qui a permis d’entrer dans la profondeur du son, de sculpter vraiment la matière sonore, au lieu d’empiler des briques et couches successives. ≫
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John Butcher : Winter Gardens (Kukuruku)
Enregistrement : 13 décembre 2011 (Londres) & 28 octobre 2011 (Milwaukee). Edition : 2012.
LP : A1/ Sporangia (high) A2/ Sea Cone B1/ Sporangia (low) B2/ Sea Fret
Guillaume Belhomme © Le son du grisli