Paal Nilssen-Love Large Unit : Ana (PNL, 2016)
C’est une drôle d’école de samba qu’a ouverte Paal Nilssen-Love au Royaume de Norvège d’où nous arrivent les trois pièces d’Ana. Inspiré par la MPB – moins ClarA Nanes ou Elis RegAna que batucada –, le Large Unit qu’il emmène depuis 2013 se défait de son épaisseur le temps d’expériences rafraîchissantes.
« The Fat Is Gone », une fois pour toute ? Au son de motifs rythmiques et mélodiques rendus déposés par les invités Paulinho Bicolor et Celio de Carvalho, l’ensemble entamera deux pièces de quinze minutes (Ana et Circle in the Round, composées l’une et l’autre autour d’une phrase de quelques notes, redites par les vents à l’unisson quand ne s’y accrochent pas d’heureuses déclinaisons) et une autre de trente : Riofun, que le batteur a composé Bahia en tête.
Ouverte au berimbau, celle-ci (aussi disponible sur EP) disserte en quatre temps sur un thème exotique, fait porter à d’autres gimmicks des solos affolés et s’arrange aussi d’oppositions, met enfin son bel entrain au service d’une marche funèbre. Voilà les façons qu’a trouvées Nilssen-Love pour insuffler un peu de légèreté à ses franches habitudes ; et son jeu y gagne.
Paal Nilssen-Love Large Unit : Ana
PNL Records
Enregistrement : 14 août 2015. Edition : 2016.
CD : 01/ Ana 02/ Riofun 03/ Circle in the Round
Guillaume Belhomme © Le son du grisli
All Included : Satan in Plain Clothes (Clean Feed, 2015)
S’il n’est pas le plus documenté des nombreux projets qu’emmène Martin Küchen, All Included – à l’intérieur : Mats Äleklint (trombone), Thomas Johansson (trompette), Jon Rune Strøm (contrebasse) et Tollef Østvang (batterie) – intéressera par les façons qu'a le saxophoniste d’envisager les compositions d’un autre que lui : Strøm, en l’occurrence.
Contrebassiste entendu dans les formations de Frode Gjerstad ou Paal Nilssen-Love, Strøm signe-là trois pièces qui démontrent un intérêt pour le refrain et un certain sens du swing. L’un et l’autre portant le groupe dans le même temps qu’il assure une franchise à la fantaisie de ses solistes : sortis des unissons de rigueur, Äleklint, Johansson et Küchen rivalisent d’artifices et d’espièglerie.
Agréable sur les compositions du membre de Friends & Neighbors, All Included gagne en présence sur celles du saxophoniste. Sur l’hymne grave de I’ve Been Lied to, la formation opère sa mue : loin de la rengaine permissive, la voici travaillant à une épaisseur qui la rehausse.
All Included : Satan in Plain Clothes (Clean Feed / Orkhêstra International)
Enregistrement : 19 décembre 2014. Edition : 2015.
CD : 01/ Tune for Martin 02/ I’ve Been Lied to 03/ The Gap 04/ Despair Is in the Air 05/ Three Courses 06/ Satan in Plain Clothes
Guillaume Belhomme © Le son du grisli
Cortex : Live! (Clean Feed, 2014)
Quelque chose est donc resté de l’Ornette des débuts. Ce petit quelque chose se retrouve dans le quartet sans piano de Cortex. Dans la forme, bien sûr, parfois dans le fond. Une solide rythmique (Ola Høyer, Gard Nilssen), un cornettiste (Thomas Johansson) poussant quelques intonations peterevansiennes ici, exhumant un improbable West End Blues free ailleurs, un saxophoniste (Kristoffer Alberts) enserrant l’espace de son ténor rocailleux : Cortex ne joue pas toujours le jeu de la survivance.
Souvent se croisent des tempos détendus, retenus ; parfois les cuivres menacent de collision ; un embarbouillé rythme latin s’impose et glisse vers d’autres figures. Car Cortex est passé maître dans l’art d’enchâsser les formes, d’apaiser les transitions. Et dans ces moments précis, la chaude contrebasse d’Ola Høyer emprunte à Charlie Haden quelques bienveillants mimétismes. Le tout avec souplesse, conviction et inspiration.
Cortex : Live! (Clean Feed / Orkhêstra International)
Enregistrement : 2013. Edition : 2014.
CD : 01/ Opening 02/ Cerebrum 03/ Endorphin 04/ Gray Matter 05/ Interlude 06/ Hub 07/ Casting
Luc Bouquet © Le son du grisli
Friends & Neighbors : Hymn for a Hungry Nation (Clean Feed, 2014)
Evidemment, il y a beaucoup d’Ornette là-dessous. Et Alors ? Alors, un combo n’ayant pas peur de réveiller les fantômes. Des musiciens hurleurs, pas encore saboteurs. De ceux qui peuvent vous fignoler une mélodie accrocheuse sans être vulgaire (Bolehogda). Des cris qui ne se commandent pas mais s’exécutent sans préavis. Une clarinette tendue, une trompette acide (trop peu utilisée à mon goût), des récits serrés et des joutes furieuses. Et encore de suaves mélopées.
De vieilles formules, de séculaires recettes. Et alors ? Alors, il y a ceux du copier-coller et ceux de l’ivresse pure : Friends & Neighbors (André Roligheten, Thomas Johansson, Oscar Grönberg, Jon Rune Strøm, Tollef Østvang) jouent assurément dans la deuxième catégorie.
Friends & Neighbors : Hymn for the Hungry Nation (Clean Feed / Orkhêstra International)
Enregistrement : 2012. Edition : 2014.
CD : 01/ Hymn for the Hungry Nation 02/ Bolehodga 03/ John’s Abbey 04/ Give Me jarrison 05/ Skremmerud 06/ Ceramic Inside 07/ Vocals on the Run 08/ Heading South
Luc Bouquet © Le son du grisli