Lemur : Aigéan (+3db, 2010)
J'espère que cette chronique sera jugée valable. Sinon, vous voudrez bien quand même la trouver honnête puisque j'avoue avoir écouté Aigéan plusieurs fois (cinq ou six) en l'espace de deux jours alors que j'étais alité pour soigner une forte fièvre (entre autre).
A côté de boîtes d'Advil entamées, il y avait donc sur ma table de chevet la pochette de ce disque. Les noms de trois musiciens sur quatre (Bjornar Habbestad, Hild Sofie Tafjord, Lene Grenager, Michael Duch) m'étaient inconnus et je parvenais à peine à distinguer la couleur de la pochette en question. Mais la musique répétitive de Lemur a été une belle expérience. Les instruments à cordes battent la mesure et les autres postillonnent avec une énergie innée, voilà mon premier souvenir.
Au plus fort de ma fièvre, un casque pesait sur mon front et dans mes oreilles, je trouvais la bande-son idéale de mes divigations (dont celle de lémuriens visitant Saragosse, vous chercherez pourquoi). Non, je n'ai pas aperçu de tunnel – je le répète, il ne s'agissait que d'une fièvre – mais j'ai eu l'impression de faire à mon humble tour le voyage en barque du Dead Man de Jarmush en écoutant Imbrium. La musique était répétitve et me plantait des aiguilles dans tout le corps : c'est à Habbestad que je ferais les plus grands reproches. Son jeu est agressif et n'allait pas toujours à mon état de convalescent, mais la potion a peut être aidé à ma guérison. Je me promettais de réécouter le disque une fois guéri. Depuis, je ne l'ai pas fait, de peur de voir la fièvre remonter.
Lemur : Aigéan (+3db records)
Edition : 2010.
CD : 01/ Dasht-Elut 02/ Panthalassa 03/ Betpak-Dala 04/ Imbrium 05/ Dzibilchaltun 06/ Saragasso 07/ Kriznajama
Pierre Cécile © Le son du grisli
Lene Grenager : Affinis Suite (+3dB, 2009)
Violoncelliste norvégienne, improvisatrice dans Spunk ou Lemur, Lene Grenager est également compositrice : c’est pour les sept musiciens de l’Affinis Ensemble (fondé en 1990 et qui, avec un effectif bien moindre, peut à certains égards faire songer à l’Ensemble Modern) qu’elle a élaboré cette suite en six mouvements où alternent tutti, soli et petits regroupements qui explorent sous divers angles (macro et micro structures, rythmes) un matériau circonscrit mais toujours animé.
Si la cinétique est assez « typiquement contemporaine » (jeux efficaces sur les dynamiques, les plans et les timbres), il faut tout de même lui reconnaître d’être bien informée de ce que les méthodes d’improvisation ont mis au jour en matière instrumentale ou scénaristique, et d’en tirer utilement profit. Ainsi le travail d’Arnulf Johansen – hautbois perforant, agile (rappelant les cabrioles d’un Mario Arcari chez Koglmann par exemple) – est-il remarquable et représentatif de l’engagement de cet orchestre à propulsion percussive.
Lene Grenager : Affinis Suite (+3dB)
Edition : 2009.
CD : 01/ Attitude 02/ Duped 03/ Redolence 04/ Intermittent interplay 05/ Fumblemumble 06/ Effect without cause
Guillaume Tarche © Le son du grisli
Sofia Jernberg, Lene Grenager : Crochet (Olof Bright, 2009)
Sortie de Spunk, la violoncelliste norvégienne Lene Grenager rencontre la jeune chanteuse suédoise Sofia Jernberg par l'entremise de Mats Gustafsson.
Le Crochet résultant, de consigner le dialogue improvisé, souvent âpre mais ravissant, de deux musiciennes comparant leurs langages : de cordes lâchées en cancans et de cris extirpés en pizzicatos butés. Lorsque Jernberg s’étonne de ses propres ressources, Grenager croit faire illusion en prenant soin de frotter les cordes de son instrument. Et quand Grenager claque quelques coups secs sur le bois du même, Jernberg tient la note, en apaisée détachée du tumulte. Or, quelles que soient les apparences, c’est bien ce tumulte qui commande l’ensemble de Crochet, disque qui saisit un auditeur qui aura du mal à s'en défaire.
Sofia Jernberg, Lene Grenager : Crochet (Olof Bright / Metamkine)
Enregistrement : 2008-2009. Edition : 2009
CD : 01/ Tempo 56 02/ Lichen 03/ The Melody 04/ Shiver 05/ Point and Line 06/ The Other Melody 07/ Made of Glass 08/ Excess 09/ Whistle
Guillaume Belhomme © Le son du grisli