Le son du grisli

Bruits qui changent de l'ordinaire


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Archives des interviews du son du grisli

Klaus Filip, Dafne Vicente-Sandoval : Remoto (Potlatch, 2013)

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Son goût pour le duo (Malfatti, Nakamura, Veliotis, et Blechmann en Taus), poussait récemment Klaus Filip jusqu’en bord de cuvette – le basson est celui de Dafne Vicente-Sandoval.  

Lorsqu’ils ne font pas acte de Remoto (soit : s’éloignent l’un de l’autre et aussi de l’auditeur) pour, en silence, reprendre leurs esprits, les musiciens l’imaginent tout autre, dessinant des parallèles dont la proximité fait naître des sonorités surprenantes. Au jeu des fréquences, larsens et graves opposés (Clair et Obscur dont se chargent à tour de rôle ondes sinus et basson), brise et haleine croisées, révèlent un paysage d’où la musique émane, insaisissable et prégnante : les bruissements y sont rivaux quand les drones refusent l’amalgame.

Serait-ce en présence de que Filip brillerait particulièrement ?  Revoir – refaire, voire –  l’espace à coups d’ondes portées qu’un instrument plus conventionnel modifiera à force de mesure concurrente ? Alors, Remoto serait un très bel exemple de ce que la méthode peut « donner ».

Klaus Filip, Dafne Vicente-Sandoval : Remoto (Potlatch / Souffle Continu)
Edition : 27 avril & 12 août 2013. Edition : 2013.
CD : 01/ Clauir 02/ Obscur
Guillaume Belhomme © Le son du grisli



Klaus Filip, Toshimaru Nakamura, Andrea Neumann, Ivan Palacký : Messier Objects (Ftarri, 2012)

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Le duo d’Aluk (Klaus Filip / Toshimaru Nakamura) et celui de Pappeltalks (Andrea Neumann / Ivan Palacký) mettent en commun sur Messier Objects leurs instruments rares – à savoir : logiciel ppooll (Filip), no-input mixing board (Nakamura), ventre de piano et mixing board (Neumann), machine à coudre amplifiée et… panneaux solaires (Palacký). Voilà deux rencontres (concert enregistré à Prague le 4 octobre 2011 et pièce enregistrée en studio à Vienne le lendemain) qui donnent à leur fantaisie futuriste les moyens de ses ambitions.

Au Babel Festival, quarante minutes furent données : strates de sons continus ou oscillants sur lesquels les musiciens se cherchent avant que le piano de Neumann ne creuse, à force d’arpèges délicats mais tenaces, un lit profond. Là, viendront se ficher à la verticale : lignes d’aigus, tessons cristallins, parasites, larsens, bourdonnements et puis déflagrations, avant que les rafales sourdes de la Dopleta ne retournent la pièce. Alors, les bruissements graves des tables de mixage agissent en poudreuses : mille grisailles pousseront après leur passage.

A Vienne, derrière les micros de Christof Amann, seize minutes seulement. Des râles d’origine forcément inconnue s’y disputent d’autres aigus superposés, des crépitements remontent jusqu’au sommet de cordes défaites… Plus aérée, l’expérimentation revêt les atours d’une ronde qui, à force de tourner, fait quitter le sol à Filip, Nakamura, Neumann et Palacký. Avec eux, lentement, la fantaisie futuriste gagne les hautes sphères.  

EN ECOUTE >>> M1 Crab Nebula (extrait) >>> M20 Trifid Nebula (extrait)

Klaus Filip, Toshimaru Nakamura, Andrea Neumann, Ivan Palacký : Messier Objects (Ftarri / Souffle Continu)
Enregistrement : 4 et 5 octobre 2011. Edition : 2012.
CD : 01/ M1 Crab Nebula 02/ M20 Trifid Nebula
Guillaume Belhomme © Le son du grisli


Sélectives expéditives : Creative Sources

sélectives expéditives cd

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Ernesto Rodrigues, Angharad Davies, Guilherme Rodrigues, Alessandro Bosetti, Masafumi Ezaki : London (Creative Sources, 2005). En quelques lignes, « faire le tri » parmi les références Creative Sources, et de même dans la discographie du violoniste qui anime le label, Ernesto Rodrigues. Commencer par cet enregistrement d’un concert donné à Londres en 2005 : en compagnie d’Angharad Davies (violon), Guilherme Rodrigues (violoncelle), Alessandro Bosetti (saxophone soprano) et Masafumi Ezaki (trompette), l’alto peint un de ces paysages de craie qui l’obnubilent. Les techniques instrumentales, à bout de souffle, révèlent par le soupçon des confidences qui font  tanguer tout décor, et enfin vous chavire. (gb)

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Los Glissandinos : Stand Clear (Creative Sources, 2005). Clarinettes contre ondes sinus : sous un nom exotique (Los Glissandinos), Klaus Filip et Kai Fagaschinski enregistraient Stand Clear en juillet 2004. De longues notes, suspendues, s’y superposent, convergent ou interfèrent selon la force du vent et la trajectoire des ondulations ; surtout : quadrillent un territoire d’ébats que se disputent sifflements et chuchotements au creux desquels il arrive aux voix de Filip et Fagaschinski de se confondre avec subtilité. (gb)

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Birgit Ulher, Mazen Kerbaj, Sharif Sehnaoui : 3:1 (Creative Sources, 2006) Six pièces improvisées en 2006 par deux trompettistes (Birgit Ulher, Mazen Kerbaj) et un guitariste (Sharif Sehnaoui) aux usages peu communs. Coups de pression entretenant l’effervescence, la musique se nourrit du bruit de cordes interrogées à la baguette, de projectiles soufflés et d’effets d’aiguilles redessinant sans cesse la partition. Dans le discours expérimental, ce bel art partagé de l’insinuation, qui de l’improvisation abstraite relève la saveur et explique avec superbe tous les remuants efforts. (gb)

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Bertrand Denzler, Jean-Luc Guionnet, Kazushige Kinoshita, Taku Unami : Vasistas (Creative Sources, 2005). Les yeux levés vers le vasistas du 31 Nevill Road, à Londres, on enregistre ce qui en traverse le cadre ce 19 septembre 2003 : les souffleurs du groupe Hubbub sont associés à Kazushige Kinoshita (violon) et Taku Unami (laptop, guitare) pour près de soixante-dix minutes d'affût tendu (allons, il y a tout de même quelques moments creux) ; la trame du fog – archet & machine – est perforée çà et là de brusques libérations – clapets, slaps, pizz' – étranglées qui s'agglutinent en petites concrétions. Sévère mais admirable broderie pour l'auditeur qui accepte l'épreuve d'endurance. (gt)

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Xavier Charles, Bertrand Denzler, Jean-Sébastien Mariage, Mathieu Werchowski : Metz (Creative Sources, 2004). C'est un plaisir renouvelé que de réécouter cette demi-heure de musique enregistrée par Jean-Luc Guionnet en octobre 2003 au Temple Neuf de Metz ! Tirant parti de l'acoustique réverbérante des lieux, clarinette, saxophone ténor, guitare électrique et violon poussent leurs séquences de jeu (que des pauses silencieuses organisent) avec une fine élégance : travail « dans le son » collectif, changements de plans et efflorescences aboutissent à un développement organique passionnant. (gt)

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Günter Müller, Jason Kahn, Christian Wolfarth : Drumming (Creative Sources, 2005). En neuf pastilles effervescentes (taillées cut dans une session au WIM de Zurich, fin octobre 2004), les drummers Müller (iPod, electronics), Kahn (laptop) et Wolfarth (percussion) appliquent à l'art tambourinaire une définition extensive... ou très littérale : à force d'entrelacs, de chevauchements, de prolifération, les pouls entrent en ébullition et crépitent ; anamorphoses, boucles, basses et balais, dans leur intrication, confèrent grain et complexité au flot – que prolongera, en 2009, le disque Limmat. (gt)


Nikos Veliotis, Klaus Filip : Slugabed (Hibari Music, 2012)

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Un archet autour duquel rôde une présence, ainsi débute Slugabed de Nikos Veliotis et Klaus Filip – qu’Hibari réédite aujourd’hui. Pour avoir signé de grands ouvrages d’électroacoustique sinueuse (le premier avec Looper notamment, le second en compagnie de Radu Malfatti ou Toshimaru Nakamura), les musiciens s'appliquèrent, un premier mars de quelle année, à soigner leur rencontre. 

L’écoute, de le confirmer : dans le champ électronique percé par un rayon, s’engouffre un paquet d’oiseaux affolés. Voici le violoncelle lévitant, ses notes sont les maillons d’une chaîne qui délimite une belle aire de rumeurs en attente d’élévation. Fusionnant bientôt – ce qui ne va pas sans l’apparition de quelques parasites –, les instruments synchronisent leurs chants, lignes d’aigus et nappes de graves grossissant pour bientôt disparaître. L’imposant spectre sonore né de l’association Nikos Veliotis / Klaus Filip fera de même, toutefois longtemps après que le disque aura fini de tourner.

Nikos Veliotis, Klaus Filip  : Slugabed (Hibari Music)
Enregistrement : un 1er mars. Réédition : 2012.
CD : 01/ Slugabed
Guillaume Belhomme © Le son du grisli


Burkhard Stangl : Hommage à moi (Loewenhertz, 2011)

burkhard stangl hommage à moi

Cet hommage que s’adresse non sans malice Bukhard Stangl a valeur de rétrospective. Trois disques – qui peuvent être augmentés d’un DVD et d’un livre (en allemand) – reviennent sur le parcours d’un guitariste entendu, entre autres formations, en Ton Art, Efzeg ou Polwechsel – combinaisons dévouées toutes à des formes musicales réfléchies.

Sur le premier disque, Stangl expose des compositions écrites pour ensembles, sur lesquelles il dirige l’Extented Heritage – présences de John Butcher, Angelica Castelló et dieb13 – le temps de pièces d’électroacoustique ténébreuse : au récitatif diaphane inspirée d’un solo de Butcher (Concert for Saxophone and Quiet Players) ou comblée de field recordings et progressant au rythme d’un vaisseau fantôme soumis à grand vent (Los vestidos blancos de Mérida). Ailleurs, c’est son amour pour les voix et les souffles que Stangl trahit au son d’une rencontre Angélica Castelló / Maja Osojnik / Eva Reiter.

Le deuxième disque est celui d’intelligents divertissements. C’est l’endroit où se mêlent de concert expérimentations et contemplations. Là où Stangl contraint un clavier à accepter son destin électronique (Angels Touch), contrarie la trompette de Gabriël Scheib-Dumalin en lui imposant un vocabulaire réduit (For a Young Trumpet Player), concocte des miniatures explosives au moyen de collages hétéroclites et de numérique affolé que pourront chahuter Klaus Filip ou Christof Kurzmann (Nine Miniatures), s’oppose au piano à la cithare de Josef Novotny (En passant), enfin, transforme l’Extended Heritage en ensemble de musique baroque autant que fantasque (Come Heavy Sleep).

Sur le troisième disque, on trouve la réédition de l’incontournable Ereignislose Musik – Loose Music, jadis édité par Random Acoustics. Là, Stangl dirige Maxixe, grand ensemble élaboré au début des années 1990 dans lequel on trouve Radu Malfatti, Werner Dafeldecker, Max Nagl, Michael Moser… En concerts, les musiciens peignent une musique de traîne que des nasses et verveux faits de cordes de guitare, de violons et de contrebasse, cherchent à capturer, empêchés toujours par des voix qui s’opposent et préviennent (dont celle de Sainkho Namtchylak). Après quoi Stangl dirige en plus petits comités des pièces de nuances voire de discrétions.

Ainsi, ces travaux et ces souvenirs regorgent de trouvailles. Leur intelligence est égale, née de celle de Burkhard Stangl, qui fait qu’on y reviendra souvent : au gré des envies, du moment, des surprises…  

Burkhard Stangl : Hommage à moi (Loewenhertz)
Enregistrement : 1993-2009. Edition : 2011.
CD1 : Kompositionen für Ensembles : 01/ Concert for Saxophone & Quiet Players 02/ WOLKEN.HEIM.breathing/clouds 03/ My Dowland 04/ Los vestidos blancos de Mérida – CD2 : Divertimenti : 01/ Angels Touch 02/ Ronron 03/ For a Young Trumpet Player 04-06/ Three Pieces of Organ 07-14/ Nine Miniatures 15/ Come Heavy Sleep – CD3 : Ereignislose Musik – Loose Music : 01/ Konzert für Posaune und 22 instruments 02-04/ Drei Lieder 05/ Trio Nr.1 06/ Uratru
Guillaume Belhomme © Le son du grisli


Taus : Pinna (Another Timbre, 2012)

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Sous le nom de Taus (Tim & Klaus contractés), Blechmann et Filip marient – en concert donné en 2010 en l’église St Ruprecht de Vienne – des éléments d’un langage qu’ils ont en commun (ces crescendos / decrescendos requérant patience que Filip envisagea avec Radu Malfatti sur Building Excess et Imaoto, ces respirations mêlées à des références à la nature que Blechmann pensa par exemple avec Seijiro Murayama sur 347).  

Cet ouvrage de laptops, qui tient du recueillement tant il est concentré, célèbre avant tout la malléabilité des sons dont est capable l’instrument : les basses agissent au sol, les larsens annoncent l’apparition d’aigus moins irritants dont les interférences scinderont les pistes d’évolution afin de créer des voies secondaires qui, à force de retours et de trajectoires fluctuantes, pourront se recouper. Pour que l’exercice ne soit pas sans fin, Blechmann et Filip peuvent interrompent quelques-uns de ces chants réverbérés : le silence reprend alors sa place, le duo laissant le champ libre à la rumeur d’une église dont il a transformé le décorum ou aux piaillements d’oiseaux qui ne font que passer au large de leurs paysages magnétiques.

Taus : Pinna (Another Timbre)
Enregistrement : 4 juillet 2010. Edition : 2012.
CD : 01/ Pinna
Guillaume Belhomme © Le son du grisli


Klaus Filip, Radu Malfatti, Mattin, Dean Roberts : Building Excess (GROB, 2004)

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Vienne, 4 juillet 2003. En studio, Klaus Filip, Radu Malfatti, Mattin et Dean Roberts s’essayent à une expérience électroacoustique qui pourrait bien changer les habitudes de l’audition commune. La guitare électrique de Roberts pèsera ses notes claires avant de les distribuer, les ordinateurs de Filip et Mattin dérouleront leur lot d’oscillations et de craquements, perturbations dont se nourrira le trombone – en filigrane plus qu’en sourdine – de Malfatti.

Dans une machine volante, le groupe progresse et prend possession de l’espace qui l'environne. C’est son transport que l’on entend et aussi les territoires qui concèdent et chantent, l’un après l’autre, avoir été découverts. Le silence suit, puis ce sont quelques souffles qui disent leur blancheur. Autant que de minces larsens ils font maintenant la bande-son de l’architecture élevée en quelques minutes, différente de celle qui sera déposée sur la couverture du digipack – éternel fantasme de modernité sortie de la cassure et colporteuse de froid, que tord l’association à bras le son.

Klaus Filip, Radu Malfatti, Mattin, Dean Roberts : Building Excess (GROB / Metamkine)
Enregistrement : 4 juillet 2003. Edition : 2004.
CD : 01/ Building Excess
Guillaume Belhomme © Le son du grisli



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