Gratkowski : All at Once, Le vent et la gorge, Fo(u)r Alto, Vermilon Traces/Donaueschingen (Relative Pitch, 2013 / Leo, 2012)
FPR : All at Once (Relative Pitch, 2013)
Au jeu des acronymes rovesque, Frank Gratkowski s’est plié : avec Jon Raskin (alto et baryton) et Phillip Greenlief (alto et ténor), le voici formant FPR. Enregistré entre 2007 et 2010, All at Once donne à entendre le trio de saxophones (et clarinette) servant des compositions de ses trois membres : unissons déviants, connivence et embardées, encombrements attendus, bourdonnements saisissants, notes prises au bond, et voici le trio rappelant le quartette (ROVA, donc) sans rien gagner ni beaucoup perdre à la comparaison. [gb]
Frank Gratkowski Quartet : Le vent et la gorge (Leo, 2012)
En une suite de trente-huit minutes (har-oh-nie) alternant unissons-glissandi et pilonnage intensif, le quartet de Frank Gratkowski (Wolter Wierbos, Dieter Manderscheld, Gerry Hemingway) dévoile ce que sera Le vent et la gorge : une œuvre laissant peu de place à l’aléatoire mais distillant quelques hauts sommets. Longs travellings salivaires ou duels de souffles, Gratkowkski se permet même de faire entrer en concurrence clarinette basse survoltée et alto soyeux. Et signe, de fait, un disque captivant. [lb]
Fo(u)r Alto : 4 Compositions by Frank Gratkowski (Leo, 2012)
Ici, d’autres horizons, d’autres unissons. Frank Gratkowski compose pour quatre saxophones altos (lui-même et Florian Bergmann, Benjamin Weidekamp, Christian Weidner) et les dissonances y trouvent leur(s) chemin(s). Parfois, on frôle les souffles (ce disque aurait pu, lui aussi, s’intituler Le vent et la gorge). Le reste du temps, on se refuse à répudier une microtonalité prégnante. Témoin, ce Sound 1, pièce d’une trentaine de minutes, entre drone et drame, et où se transfusent et s’évaporent des souffles presque braxtoniens. [lb]
Frank Gratkowski, Chris Brown, William Winant, Gerhard E.Winkler : Vermilion Traces / Donaueschingen 2009 (Leo, 2012)
S’inspirant des paysages jadis détroussés par Cage ou Feldman (ce dernier surtout), Frank Gratkowski, Chris Brown, William Winant et Gerhard E.Winkler (ce dernier sur une plage seulement) interpellent un dense horizon où l’improvisation se croit composition. Dans ces quasi-silences percés de scintillements, il n’y a aucune coupe ou interruption mais un continuum de la forme. Ailleurs (sur le deuxième CD surtout), sidérurgie et balayages expriment fougues et colères, frottent jusqu’au sang la chair infectée. Et distillent un alphabet du désagréable qui emballera de façon certaine les initié(e)s. Votre serviteur, surtout. [lb]
John Raskin, Carla Harryman : Open Box (Tzadik, 2012)
C'est une boîte de Pandore qu'ouvrent Jon Raskin (lecture, saxophones) et Carla Harryman (poésie et lecture) dès les premières secondes d'Open Box – projet mêlant musique et poésie que soutiennent pas moins de neuf musiciens, dont les membres du quartette de Raskin. Mais à l'intérieur de la boîte, trésors et drouille sont confondus.
Doué de parole, le duo explique d’abord les tenants et les aboutissants de leur projet sur fond de guitare et de batterie tonitruant : post-no wave poing levé sans véritable envergure, l'ouverture en appelle au patronage de Zorn ou de Ribot. La suite vaudra davantage que cette simplissime allégeance : Open Box 1 & 2 laissant les deux récitants portés par les surfaces étranges de Gino Robair : torves, les sonorités effacent la mièvrerie du récitatif dans un élan peu commun de poésie urbaine.
C’est un art de l’étrange, ensuite, qui convoque des vocalisations à la népalaise et un baryton, une pièce de comédie musicale d’expérimentale obédience, un psychédélisme brouillon et les déclamations absconses qu’on croirait sorties d’un pénible jeu de rôles. C’est en conséquence vaguement saoul que l’on sort de cette écoute, demain nous dira-t-il quelle était la qualité de la mixture ?
Jon Raskin, Carla Harryman : Open Box (Tzadik / Orkhêstra International)
Edition : 2012.
CD : 01/ Fish Speech 02/ Open Box Part 1 03/ Open Box Part 2 04/ LA Reactive Meme 05/ Song for Asa 06/ A Sun and Five Decompositions 07/ JS Active Meme
Guillaume Belhomme © Le son du grisli
ROVA Saxophone Quartet, Nels CLine Singers : The Celestial Septet (New World, 2010)
Le ROVA (Bruce Ackley, Steve Adams, Larry Ochs, Jon Raskin) fusionne avec le Nels Cline Singers (Devin Hoff, Scott Amendola, Nels Cline) et devient le Celestial Septet. Le Celestial Septet ou comment concilier le tout collectif du ROVA aux saillies solitaires du Nels Cline Singers.
Par une écriture rigoureuse, une combinaison des modes de jeu et de textures, le sextet gagne la partie haut la main. La richesse et la diversité de The Buried Quilt qui clôture ce disque résiste et échappe à l’écueil des zappings et des surcharges faciles. Ainsi, en imbriquant, déterminant et alternant des flux, à priori, antinomiques (l’unisson minimaliste du début, la fulgurance free, le dialogue saxophone-guitare, le cluster final), le lien se crée ; abouti, définitif.
Ce qui avait précédé n’était pas sans intérêt. Sans tâtonnements, entre lyrisme perçant, lent déploiement des souffles et excès métallique d’une impétueuse guitare, nous avions déjà entrevu l’essentiel de cette idéale fusion. Ils recommencent quand ils veulent.
ROVA Saxophone Quartet, Nels Cline Singers : The Celestial Septet (New Worlds / Orkhêstra International)
Enregistrement : 2008. Edition : 2010.
CD : 01/ Cesar Chavez 02/ Trouble Ticket 03/ Whose to Know 04/ Head Count 05/ The Buried Quilt
Luc Bouquet © Le son du grisli
Earth Music: Ten Years of Meridian Music (Innova, 2010)
Dix ans de musique et pas de n’importe quelle musique : celle programmée par la galerie Meridian qui, si l’on n’a pas de penchant particulier pour les compilations ou les rétrospectives, pourrait vous faire changer d’avis. Au moins le temps de la durée de ce disque.
Parce qu’on trouve sur cette anthologie des musiciens fabuleux, qui s’activent dans des genres différents mais qu’il est possible de rapprocher malgré tout : Vinny Golia (à la clarinette basse), Matthew Sperry (ses élucubrations électroniques sont merveilleuses), Pauline Oliveros (& son drone d’accordéon), Frank Gratkowski (esprit frappeur de clarinette), Jon Raskin (baryton hors ROVA) ou bien encore Shoko Hikage (répétitive répétitive). Chaque plage du disque vous fait passer d’un monde à l’autre, les quelques secondes de silence entre les morceaux sont une porte dérobée donnant sur un ailleurs aussi fabuleux que l’était le précédent.
Earth Music : Ten Years of Meridian Music : Composers in Performance (Innova)
Edition : 2010.
CD : 01/ Vinny Golia : Steps 02/ John Bischoff : Quarter Turn 03/ Matthew Sperry : Improvisation 04/ Damon Smith, Hugh Livingston, Carla Kihlstedt : Lines for Trio 05/ Pauline Oliveros : Pauline’s Solo 06/ Ben Goldberg, John Schott : All Chords Stand for Other Chords 07/ Shoko Hikage : Improvisation 08/ Frank Gratkoswki : Improvisation 09/ Sara Schoenbeck, Ellen Burr : Improvisation 10/ Viv Corringham : Improvisation 11/ Jon Raskin : Sonic Coordinates 12/ Tim Bickley, Bob Marsh : Microtonic Meditations for Endings and Beginnings 13/ Philip Gelb, Jie Ma : Comp. 40 N and Comp. 110 A. 14/ Theresa Wong : Nightwatching
Héctor Cabrero © Le son du grisli
Jon Raskin: Quartet (Rastascan - 2008)
Echappé de Rova – groupe d’improvisateurs pas toujours inspiré –, le saxophoniste Jon Raskin menait en 2005 de plus franches improvisations en quartette.
Auprès de Liz Allbee (trompette et percussions), George Cremaschi (contrebasse et matériel électronique) et Gino Robair (batterie et claviers), Raskin commande une musique électroacoustique abstraite, jouant des limites sonores des instruments ou profitant d’un dialogue fantasque qui motive chacun des intervenants. Au final, fait alterner déconstructions inquiètes et morceaux jubilatoires nés des préceptes de l’école de Chicago, et ce, toujours à propos.
CD: 01/ Cracked Earth 02/ Sound Barometer Reading 1 03/ African Tulip 04/ Swing Sing 05/ Kandinsky 06/ Sound Barometer Reading 2 07/ Postcard 2 08/ Ceilometer Reading 09/ Postcard 1 10/ Bleckner 11/ Disdrometer Reading 12/ Qupe >>> Jon Raskin - Quartet - 2008 - Rastascan Records. Distribution Orkhêstra International.