Le son du grisli

Bruits qui changent de l'ordinaire


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Archives des interviews du son du grisli

Gudrun Gut : Vogelmixe (Run United, 2016)

gudrun gut vogelmixe

J’aurais bien (avec plaisir même) fait escale à Berlin pour m’envoler avec Gudrun Gut pour un tour du monde. Les avions nous auraient trimballés dans les pays d’où proviennent les airs traditionnels qu’elle a remixés. D’un coucou à l’autre, j’en aurais sûrement appris sur Einstürzende Neubauten ou Malaria! (subtile moyen pour moi de vous rappeler qui est Gudrun), mais bon.

Non, pas de voyage, mis à part celui que j’ai fait en musique en écoutant le deuxième CD de Vogelmixe. Lesdites chansons (au nombre de huit) y sont présentées dans leur version originale, et elles m’ont permis de découvrir Trio Fado ou Ricardo, Rafael y Pedro (j’ai été moins emballé par les titres africains, pour ne rien dire du refrain allemand du groupe Heide).

DJ émérite (et même grande prêtresse radiophonique) Gut n’a bien sûr ni inventé le remixe, ni la house, ni le chill-out, ni la robotik… Rien de nouveau sous le ciel gris, alors, juste des relectures qui fleurent parfois le Marrs ou le Kraftwerk, avec un léger supplément d’âme expérimentale. Plaisant, donc, mais de loin. De Bruxelles, ça va. Tant qu’on ne me retire par mes galettes de Malaria!, tudo bem.



gudrun gut vogelmixe

Gudrun Gut : Vogelmixe
Run United
Edition : 2016.
2 CD : Vogelmixe. Gudrun Gut remixes Heimatlieder aus Deutschland Vol. 2

Pierre Cécile © Le son du grisli



Myra Davies, Beate Bartel, Gudrun Gut : Sirens (Moabit, 2017)

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Au début des années 1990, Myra Davies et Gudrun Gut ont entamé une collaboration sous le nom de Miasma (Miasma 1, 2 & 3 ont fini par donner ce nom au duo) ce qui n’a pas empêché la première de sortir un autre album de mots parlés / chantés avec la seconde à la musique, c’était Cities and Girls en 2004. Voilà donc que Davies (à l’écriture et à la voix) et Gut (à la musique sur la moitié des morceaux) remettent ça (nous sommes alors en 2015-2016).

Mais quid de la musique de l’autre moitié des morceaux ? Eh bien c’est Beate Bartel qui s’en charge, la Bartel qu’on se souvient avoir entendu avec Einstürzende Neubauten et qui a aussi connu des projets communs avec Gut (Matador et Mania D., pour ne pas les citer). Notons avant de parler du « comment sonne » Sirens que le label publie dans le même temps Instrumentals for ‘’Sirens’’, soit les dix mêmes compositions mais privées de la piste des voix.

Partant de là (je veux dire d’Armand Monroe, le premier titre du disque), on craint un peu l’hommage intello aux DJ du temps des premiers… DJ. Mais non, la voix de Davies, qu’on pourrait curseuriser entre Patti Smith et Laurie Anderson, et sa plume nous interpellent et nous intéressent « par-dessus » la musique. Dans un souffle elle referme même ce club intello où s’entendaient les premières minutes une scansion hip-hop et des synthés de retro-techno… C’est alors un tout autre genre de musique auquel on a droit, une électronique mécanico-robotico-répétitive au rythme souvent soutenu qui n’empêche pas qu’on parle de John Cage ou de Wagner, qu’on raconte une anecdote qui ramène à la Seconde Guerre mondiale ou qu’on s’essaye à une poésie métaphysique. Particulier, et percutant ouvrage de spoken-word.  


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Myra Davies, Beate Bartel, Gudrun Gut : Sirens
Moabit Musik
Edition : 2017.
CD : Sirens
Pierre Cécile © Le son du grisli


Greie Gut Fraktion : reKonstruKtion (Monika Enterprise, 2011)

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Rapprochement à demi-réussi (seulement) entre la jeune Finlandaise de Berlin AGF (aka Antye Greie) et  la légendaire Gudrun Gut, figure du Kreuzberg underground eighties avec son punk band Malaria et patronne de longue date du label Monika, Baustelle déclinait voici deux ans les bruits de chantier (d’où son titre) au son d’un electro-pop minimaliste et sombre. Réussi par instants, dont l’obsédant Drilling An Ocean et la relecture spoken word du hit de Palais Schaumburg Wir Bauen Eine Neue Stadt, inconsistant en d’autres, l’exercice n’appelait à priori pas à la tentation facile du remix – qui est pourtant réussi avec acuité, sinon brio.

Parmi les titres retenus (les moins ont été laissés de côté, et c’est tant mieux), certains bénéficient d’un regard extérieur leur donnant une réelle plus-value sonore, voire totalement inédit à tel point qu’on n’identifie plus grand-chose de l’objet initial (notamment le Drilling An Ocean sous les doigts menaçants de Mika Vainio). Toujours formidablement en phase, Wolfgang Voigt confronte Wir Bauen Eine Neue Stadt au son martial de son génial piano sous beats techno – à la manière de son terrifiant Freiland Klaviermusik sorti l’an dernier.

Egalement identifiable au bout de quelques secondes, le son de Natalie Beridze insuffle à We Matter une touche poétique sous calmants électroniques, là où le traitement motorique de Jennifer Cardini sur Make It Work accapare sans réellement captiver. Autrement plus étonnant est le regard de Barbara Morgenstern sur Cutting Trees (mais il me laisse de marbre) tandis qu’Alva Noto est en pilotage automatique sur, lui aussi, Wir Bauen Eine Neue Stadt.

EN ECOUTE >>> Wir Bauen Eine Neue Stadt (Alva Noto)

Greie Gut Fraktion : reKonstruKtion (Baustelle Remixe) (Monika Enterprise)
Edition : 2011.
CD : 01/ Drilling An Ocean (AGF) 02/ Wir Bauen Eine Neue Stadt  03/ Wir Bauen Eine Neue Stadt (Wolfgang Voigt) 04/ Drilling An Ocean 05/ Ready Ready 06/ Black Betwixt Darkness 07/ The Far Field (WNYC Remix) 08/ The Serpentine Way 09/ Compounding Daydream 10/ Fabian Fox 11/ The Waves And The Beat 12/ Wir Bauen Eine Neue Stadt (Alva Noto)
Fabrice Vanoverberg © Le son du grisli


Greie Gut Fraktion : Baustelle (Monika Enterprise, 2010)

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Ville radicalement transformée vingt ans après la chute de son mur, Berlin n’a de cesse d’influencer les artistes qui y résident, en permanence ou provisoirement. Posé sur les fonds baptismaux du Kreuzberg des années 80, les Einstürzende Neubauten et autres Malaria ne pouvaient voir le jour que dans la sauvagerie ravagée par l’hideuse balafre de béton armé qui séparait l’est et l’ouest de la ville. Aujourd’hui parsemée de chantiers (Baustelle en allemand), la cité n’a depuis cessé de voir son urbanisme bouleversé par la Gentrifizierung (une insulte dans nombre de bouches radicales de gauche) – chassant davantage les artistes dans les quartiers périphériques.

Au milieu de tous ces changements spectaculaires – voire  regrettables, à l’image de la bétonisation croissante des bords de la Spree – le duo Gudrun Gut / Antye Greie interprète d’étonnante façon les field recordings glanés sur les sites de construction aux quatre coins de la métropole prussienne et bien au-delà. Evocateurs, les titres invitent au voyage à dos de bétonneuse ou de tronçonneuse, tel un environnement édifié à grands coups de forage et d’abattage. Croisant le fer avec l’électro-pop de I Put A Record On – qui était le premier effort solo de Gut après trente années de carrière – les beats minimalistes de Baustelle vitupèrent entre regrets et effusions un monde où l’humain l’emportera sur la technique – acceptons-en l’augure. Et, à l’instar de la formidable reprise du joyau Neue Deutsche Welle Wir Bauen Eine Neue Stadt de Palais Schaumburg, la musique est un chantier à l’évolution trop perpétuelle pour réellement lasser un jour.

Greie Gut Fraktion : Baustelle (Monika Enterprise)
Edition : 2010.
CD : 01/ Cutting Trees 02/ Wir Bauen Eine Neue Stadt 03/ Drilling An Ocean 04/ Mischmaschine 05/ Make It Work 06/ Betongiessen 07/ Grossgrundbesitzer 08/ Baustein 09/ China Memories 10/ White Oak 11/ We Matter
Fabrice Vanoverberg © Le son du grisli



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