Le son du grisli

Bruits qui changent de l'ordinaire


Vers TwitterAu grisli clandestinVers Instagram

Archives des interviews du son du grisli

Didier Lasserre : Silence Was Pleased (Ayler, 2022)

lasserre

Certes, le son du grisli n'est plus, mais quoi ? De temps à autre, le son du zombie vous rappellera à son bon souvenir, en plus de dresser un bilan comptable : 13 occurences Didier Lasserre dans l'anthologie le son du grisli... 

Sortes Miltonianae : c’est à la lecture du Paradis perdu de John Milton que l’on doit le retour de Didier Lasserre sur disque : en trois temps (Light / Day / Night), Silence Was Pleased (qui est aussi le nom de l'association) donne à entendre le percussionniste (et ici compositeur) en compagnie de Benjamin Bondonneau (clarinette), Jean-Luc Cappozzo (trompette, cornet), Denis Cointe (live sounds), Laurent Cerciat (voix), Loïc Lachaize (enregistrement et sound machinery conception), Gaël Mevel (violoncelle), et Christine Wodrascka (piano).

Acouphènes dans son sillage, le vaisseau navigue sur un canevas de souffles avant de prendre le large pour naviguer en eaux changeantes. Habile, Lasserre compose alors avec des notes tenues et autant de silences, le bruissement de son instrument et l’exclamation des autres : grondement du piano, alarme de la trompette, chant que le violoncelle abandonne sous archet, larsen fuyant… Quelques vers de Milton portés par un savoir-faire qui nous rappelle, selon l’heure, Monteverdi, Anthony Braxton, Erik Satie, Gavin Bryars ou Morton Feldman, et surtout que le trop rare Lasserre préférera toujours aux effets de manche de beaucoup de ses collègues d’implacables effets de surprise.

Didier Lasserre : Silence Was Pleased 
Ayler Records
Enregistrement : 26 et 27 mai 2021. Edition : 2022. 
Guillaume Belhomme © Le son du grisli

le son du grisli couv twitter



Gaël Mevel : Images et personnages (Leo, 2010)

grislietpersonnages

Le dernier album du pianiste Gaël Mevel, en quintet et pour le label Leo Records, se compose de deux longues suites d’une vingtaine de minutes chacune. Jamais, la musique jouée par Mevel et ses compagnons (Jean-Jacques Avenel à la contrebasse, Didier Petit au violoncelle, Jacques Di Donato à la clarinette et Thierry Waziniak aux percussions) ne se départira des climats sereins, méditatifs et concentrés développés dès les premières minutes.

D’abord, c’est au bandonéon que Gaël Mevel dépose délicatement un lambeau de mélodie, quelques notés tirées d’un ailleurs imaginé entre la comptine enfantine et une rengaine folklorique sans âge. Alors, les instruments, chacun à leur rythme (cette musique est la conjonction de respirations qui se cherchent et se rejoignent !), apprivoiseront ce bout de mélodie, le feront leur en lui dessinant de nouveaux contours qui s’entrelaceront tout au long de la première plage. Ce motif mélodique sera réintroduit dans la discussion régulièrement, tel un témoin de ce passage de relais musical, par Gaël Mevel, discret chef d’orchestre qui propose et recentre les débats plutôt qu’il les dirige. Il semble sans cesse rappeler ses compagnons à lui pour mieux leur souffler de s’enfuir à nouveau.

Sur ce disque, la musique est faite de flux et reflux, d’échappées belles et de retours en terra cognita, de boucles et de courbes. Les notes distillées avec économie, la riche interaction entre les timbres et les instruments, lui confèrent chaleur et étrangeté. Les musiciens, tous complices de longue date de Gaël Mevel, balaient de la main toute virtuosité et tout bavardage inutiles. Leur démarche pourrait être celle de la « route ouverte » décrite par D.H. Lawrence lorsqu’il décrivait la poésie de Walt Whitman : « La grande maison de l’âme est la route ouverte. (…) Pas par la méditation. Pas par le jeûne. Pas en explorant paradis après paradis, intérieurement, comme les grands mystiques. Pas par l’exaltation. Pas par l’extase. Par aucun de ces moyens l’âme ne se réalise. Seulement en prenant la route ouverte. »

Le langage commun, l’esperanto du quintet, c’est le silence. Gaël Mevel nous le confirme dans les notes de pochette : « Je remercie ces musiciens d’exception, inventifs et généreux qui partagent avec moi cet espace d’écoute si particulière où, en silence, tout est possible. » A notre tour de les remercier.

Gaël Mevel Quintet : Images et personnages (Leo Records / Orkhêstra International)
Edition : 2010.
CD : 01-02/ Images et personnages
Pierre Lemarchand © Le son du grisli


Commentaires sur