Jonas Kocher : Duos 2011 (Flexion, 2012) / Udarnik (L'innomable, 2011)
Avant Jonas Kocher, l’accordéon a connu de grands iconoclastes (nos premières pensées vont bien sûr à Pauline Oliveros). Cela aurait pu être d’autant plus dur pour le Suisse de faire entendre sa voix. Or, en quelques disques, il a réussi à nous familiariser avec son langage.
Après un solo du nom de Solo, c’est une compilation de duos (et d’un trio) enregistrés en 2011 du nom de Duos 2011 qu’autoproduit aujourd’hui Kocher. Hans Koch (clarinette basse) & Patricia Bosshard (violon), Christian Wolfarth (cymbales), Gaudenz Badrutt (electronics), Urs Leimgruber (saxophone), Christoph Schiller (épinette) et Christian Müller (clarinette contrebasse) sont les amis qui l’accompagnent sur ce CD. Les échanges comme au coin du feu sont différents selon la couleur des flammes.
Les plus beaux moments sont les flamboyances avec Wolfarth et Badrutt (Kocher tire sur ses aigus comme s’il cherchait à produire des sons électroniques), Leimgruber et Müller (Kocher souffle des graves qui équilibrent sa conversation avec ses partenaires). Soulignons aussi le beau travail de réalisation (et le master de Giuseppe Ielasi) : l’écoute se fait d’une traite sans qu’on y décèle le moindre accroc. Soufflant…
EN ECOUTE >>> Schiller / Kocher
Jonas Kocher : Duos 2011 (Flexion)
Enregistrement : 2011. Edition : 2012.
CDR : Duos 2011
Héctor Cabrero © Le son du grisli
Jonas Kocher grogne au début de cette improvisation de 2010 avec Michel Doneda (saxophone soprano), Tao G. Vrhovec Sambolec (computer) et Tomaž Grom (superbe contrebasse). Les instruments sont différents mais leur mélange se fait naturellement et malgré les éructations, les grognements, les hurlements et les chocs sonores d’autres espèces encore, Udarnik ne parvient qu’à faire l’admiration de l’auditeur. Epoustouflant…
Michel Doneda, Jonas Kocher, Tao G. Vrhovec Sambolec, Tomaž Grom: Udarnik (Zavod Sploh/ L'Innomable, 2011)
Enregistrement : 2010. Edition : 2011.
CD : 01/ Udarnik 1 02/ Udarnik 2 03/ Udarnik 3 04/ Udarnik 4 05/ Konstrukt
Héctor Cabrero © Le son du grisli
Insub Meta Orchestra : Archive #1 (Insubordinations, 2012)
45 musiciens (Christian Müller, Christophe Berthet, Christoph Schiller, Cyril Bondi, Florence Melnotte, Hannah Marshall, Patricia Bosshard, Rodolphe Loubatière…) s’ouvrent à la menace. Approfondissent la ligne, réduisent son isolement, diffèrent le chaos, font l’éloge des choses souterraines.
Dans cet atelier, une sourde respiration ouvre les débats. La machinerie, maintenant, s’active et délivre ses vifs roulis. Un court et impressionnant crescendo surgit. La cassure intimide la ligne mais échoue à la briser totalement. Et c’est précisément, cette ligne qui fait office de lien et assure sa dense continuité aux cinq conductions de ce disque.
Fondé en septembre 2010, l’Insub Meta Orchestra signe ici son premier enregistrement (disponible en CD ou en téléchargement gratuit). La menace est à prendre au sérieux.
EN ECOUTE >>> Punkte und Flächen >>> Miroir
Insub Meta Orchestra : Archive #1 (Insubordinations netlabel)
Enregistrement : 2011. Edition : 2012.
CD / Téléchargement libre : 01/ Punkle und Flächen 02/ Et si… 03/ The Living Dust 04/ Miroir 05/ Lava Underground 06/ Set Sail, Finally
Luc Bouquet © Le son du grisli
Birgit Ulher, Christoph Schiller : Kolk (Another Timbre, 2012)
Dans les bleus de la couverture de Kolk, on peut remarquer des veinures qui pourraient être les voies empruntées par les épinette et préparations de Christoph Schiller et les trompette, radio, haut-parleur et objets, de Birgit Ulher.
Cordes grattées ou frappées, trompette envisagée du bout des lèvres (voire de la gorge), les trajectoires traînent en longueurs et se confondent avant de disparaître dans un repli, creux véritable provoqué par la chute de coups défaits. Dans l’accumulation d’éléments disparates, Schiller et Ulher trouvent désormais leur bonheur insaisissable : la dissemblance de leurs instruments et la ressemblance de leurs usages facilitant quand même l'approche.
Grisailles d’un râle, suspensions d’aigus, prises d’échos, retour de cordes, égarent l’auditeur qui avait pourtant décidé de suivre lui aussi les veinures ; le voici égaré – Auflast, Sediment, Geröll, Kolk, Bult : avoir été germanophone aurait-il aidé ? – mais ravi, qui loue la belle idée du rapprochement Schiller / Ulher.
Christoph Schiller, Birgit Ulher : Kolk (Another Timbre / Metamkine)
Enregistrement : 26 octobre 2010. Edition : 2012.
CD : 01/ Auflast 02/ Sediment 03/ Geröll 04/ Kolk 05/ Bult
Guillaume Belhomme © Le son du grisli
Festival Le bruit de la musique #6 : Saint-Silvain-sous-Toulx, 16-18 août 2018
C’est encore une très belle édition du festival Le Bruit de la musique qui vient de se terminer, à Saint-Silvain-sous-Toulx, charmant village de la Creuse.
Plantons le décor. Comme chaque année, le cœur du festival bat dans une pâture, derrière la micro-salle des fêtes du village, juste en face de la mignonne église. Un chapiteau de cirque a été monté, rouge pétant et jaune. Des guirlandes, faites de triangles de tissu de récupération. Une tente ouverte, avec des matelas, pour se reposer. Une autre avec une installation de vélos sonores, agencée par François Arbon, qui font dzing et blam quand on pédale. Des parapluies haut placés, au bout de grands piquets. C’est pour rire, il ne pleut jamais pendant le festival. Des tables et des bancs, afin de manger et discuter. Trois jours de musique, de rires d’enfants, de découvertes artistiques pointues, parfois déroutantes. Le public ? Il y a ceux qui reviennent chaque année, depuis qu’ils ont découvert cette pépite, de toute la France et de plus loin (on parle un peu toutes les langues ici, allemand, italien, grec, anglais…). Et des gens du coin, qui arrivent à pied, en voisins, les oreilles et l’esprit ouvert à toutes les aventures sonores et artistiques.
Alors, pendant ces trois jours, du 16 au 18 août, qu’a-t-on entendu ? Du très dépaysant : Yaping Wang et son yangqin préparé. Qui dit mieux ? On connaît bien sûr le piano préparé. Nous avons découvert, en ouverture du festival, une épinette préparée (lire plus loin). Mais un yangqin, instrument de la musique traditionnelle chinoise, de la famille des cithares sur table, avec des vis et des morceaux de caoutchouc coincés entre les cordes ? Il fallait la rencontre de cette musicienne, compositrice, improvisatrice, et d’un festival tel que le Bruit de la musique, pour jouir d’un tel concert, dans la petite église de Toulx-Sainte-Croix.
Les cordes frappées avec des mailloches en bambou donnent, au naturel, une sonorité curieusement à la fois métallique et moelleuse. Dans la composition contemporaine, écrite par elle-même, avec laquelle Yaping Wang a ouvert son concert, les passages rapides présentent un son continu, une cascade complexe et riche, qui ne ressemble à rien de connu. Elle ne s’interdit pas de jouer aussi sur le cadre métallique ou sur le bois de son instrument. La deuxième partie, l’improvisation sur le yangqin rapidement préparé par elle sous nos yeux, a commencé par des crissements furieux, produits à mains nues, du bout des ongles, ses mains gigotant comme de petites araignées en folie. Puis, changement radical d’ambiance, elle reprend ses mailloches et, très lentement, distille des notes aux harmonies étranges, une suite calme et pondérée, qui emporte l’auditeur dans un état de relaxation et d’écoute profonde, quasiment de conscience modifiée. On y flotte, au fil de sonorités cadencées, avec une lenteur qui semble dialoguer avec des rythmes organiques internes. Yaping Wang finit par nous ramener sur terre. Tonnerre d’applaudissements, salle enthousiaste. Nous étions au fin fond de la Creuse, nous sommes partis vraiment ailleurs…
Autre voyage musical, l’Ensemble U:. Il y a de grandes chances que vous n’ayez jamais entendu ce groupe estonien. En effet, c’est la première fois qu’il se produisait en France. Il a fallu le Bruit de la musique pour organiser ces trois concerts. Depuis quelques années, Martine Altenburger et Lê Quan Ninh, qui portent le festival et en assurent la programmation, proposent un « fil rouge » à un groupe invité, c’est-à-dire une série de concerts, un par jour, l’occasion de montrer des facettes différentes de son travail. Spécialisé en musique contemporaine et expérimentale, U:, basé à Tallin, existe depuis quinze ans. Il a offert un concert contemporain de pièces baltes et nordiques, un concert participatif, et un troisième programme, centré sur le minimalisme.
Gros coup de cœur pour le premier de ces trois concerts. Avec, par exemple, une pièce de Jüri Reinvere, écrite pour les six musiciens, d’une grande complexité rythmique (chacun bat la mesure à son tour, selon qui a une main droite disponible à ce moment-là), et d’une magnifique richesse de timbres. Ou cet hommage à Schönberg, par Vykintas Baltakas, consistant en une réécriture d’un passage de Pierrot lunaire. Ou encore cette pièce bruitiste toute en subtilité de Tatjana Kozlova-Johannes, faisant intervenir le bruissement de fines feuilles de plastique ou les tintements de grains de riz doucement lâchés en pluie au-dessus d’un plat. Ce programme, splendidement maîtrisé, a lui aussi suscité l’enthousiasme du public, remplissant la charmante église de Domeyrot.
La deuxième prestation de U: était très différente. Grâce à un programme dédié, accessible par wifi depuis tout ordinateur portable, tablette ou smartphone, le public est invité à prendre le pouvoir sur les compositeurs et sur les interprètes. Une démonstration amusante, qui permet d’arriver à une conclusion peu surprenante : c’est mieux quand un vrai compositeur écrit de la musique, plutôt que le public, collectivement, en direct. Le troisième concert, consacré à la musique minimaliste, comportait notamment deux pièces radicales. L’une, de Peter Ablinger, présente un récitant (ici l’époustouflant flûtiste Tarmo Johannes) lisant un texte, sa voix étant totalement couverte par les grésillements variés, à volume très élevé, d’un haut-parleur installé juste à côté de son visage. Et l’autre, pour chef d’orchestre solo, de Thierry de Mey : la violoniste raffinée Merje Roomere bat très sérieusement la mesure, de manière de plus en plus farfelue, dans le silence, face public. Une très belle découverte, cet ensemble ! Les CD de U: se sont d’ailleurs vendus comme des petits pains. Ils sont disponibles sur leur site.
Autre proposition surprenante du festival, My Dog and I, un spectacle qui mêle plusieurs disciplines artistiques. Le point de départ est une commande à la compositrice irlandaise Jennifer Walshe. Elle a écrit une partition textuelle (téléchargeable ici) et réalisé un petit film, en plusieurs parties, avec entre autres des images de la chienne Skubi. Son propos, sur les relations entre les chiens et les humains, est assez décoiffant. Sur scène, pendant que le film est projeté, et entre ses séquences, il y a trois êtres vivants : la violoncelliste Martine Altenburger, la chorégraphe Clara Cornil, et la chienne Skubi. Skubi ne fait rien d’autre qu’être là – nous ne sommes pas au cirque (bien qu’étant sous un chapiteau), la chienne ne « joue » pas. En revanche, la musicienne et la danseuse sortent de leurs rôles traditionnels en bougeant, parlant, manipulant des objets, dessinant au sol avec un fil rouge et des sables colorés, ou se peignant les avant-bras en vert forêt. Une représentation au charme étrange, pleine d’empathie, d’attention, et dont on sort en portant un autre regard sur les chiens et les animaux en général.
En plein air, devant la façade du château de la Roche, voici la performance de Jeune fille orrible. Ils sont trois : Frédéric Danos, Audrey Gaisan-Doncel, Olivier Nourrisson. Ils improvisent, avec des objets et matériaux trouvés sur place ou apportés. Ils produisent des bruits (pas de la musique), uniquement acoustiques. Avec un parti pris d’absence d’intention, d’absence de récit, d’absence de communication visible entre eux (pas de regard, pas de synchronisation), ils bricolent une sorte de négation de spectacle, dont se dégage de l’humour (pas toujours), de la fantaisie, une occasion de réfléchir sur le principe du spectacle (nous sommes bien là à les regarder, ils font bien ça devant nous, et pas juste comme des enfants qui jouent avec des emballages en carton). Ça en a hérissé certains (plusieurs personnes sont parties), ça en a réjoui pas mal d’autres.
Plusieurs musiciens sont venus ici avec une approche très fine de la subtilité des petits sons qu’ils peuvent tirer de leurs instruments. C’est le cas de Christoph Schiller, et son épinette arrangée. Du bout des doigts, il joue dans les cordes, chipote avec divers accessoires (un tampon à vaisselle métallique, un morceau de boîtier de CD en plastique…). On est dans le très minimal, très ténu, très captivant. Une parfaite entrée en matière (c’était le premier concert du festival, jeudi après-midi). Autres pratiquants de l’arachnéen, le duo Jonas Kocher / Gaudenz Badrutt. Accordéon et électronique, les deux hommes construisent leur improvisation, pleine de silences, de moments très légers, de micro-variations, puis d’éclats de fureur, au fil d’une idée musicale toujours soutenue. Une très belle expérience, étayée par une grande qualité d’écoute, comme toujours dans ce festival.
Deux prestations bien givrées, maintenant : Parlophonie, en plein air, à La Spouze. Anne-Julie Rollet aux machines, envoie des sons dans une série de vieilles radios, de transistors ou de ghetto blasters. Anne-Laure Pigache vocalise, grimpant parfois à un Everest du farfelu, avec des sons organiques en pleine ébullition. Très réussi et joyeux. Et le solo de Michael Vorfeld, qui produit des sons à partir d’ampoules lumineuses, qu’il allume et éteint, et dont il amplifie les bruits électriques. Il joue dans le noir, bien sûr. C’est agréablement bizarre. On peut toutefois se permettre de dire ici que ça ne procure pas une émotion artistique inoubliable. Autre bémol, au milieu de ce très riche programme : les images de synthèse et les sonorités binaurales de Mathieu Chamagne, avec une projection sur l’autre façade du château de la Roche, nous ont laissée dubitative.
Aucune réserve, en revanche pour le concert des deux saxophonistes Violaine Gestalder et Michel Doneda, dans l’église de Toulx-Sainte-Croix. Elle, dans des pièces contemporaines (Scelsi, Berio…), lui dans des improvisations. Drôle de duo : ils ne jouent pas ensemble, mais se répondent, Doneda s’appuyant dans ses impros sur des éléments des pièces écrites. Dialogue contemporain et musique improvisée : un parfait résumé de l’esprit de ce festival.
Il faudrait aussi parler de la pièce de Mauricio Kagel, Eine Brise, pour 111 cyclistes, qui a été interprétée joyeusement par 70 participants, spectateurs, artistes, bénévoles, après deux répétitions rondement menées. Une déambulation vélocipédique et musicale, sifflée, chantée et ponctuée de coups de sonnette, juste avant le bal sous chapiteau avec le groupe Frisette.
Anne Kiesel © Le son du grisli
Birgit Ulher : Matter Matters (Hideous Replica, 2017)
Matter Matters donne trois fois à entendre l’interprète que peut décider d’être Birgit Ulher. En concert, à chaque fois, elle rend une composition personnelle (Traces), une autre de Christoph Schiller – avec lequel elle enregistra Kolk il y a quelques années – (From Die Schachtel) et une dernière qu’elle co-signe avec Michael Maierhof – fidèle partenaire avec lequel elle signa Nordzucker et Stark Bewölkt – (Splitting 21).
La première composition est la sienne, installation commandée par le Goethe Institut de Chicago dont la partition est glissée dans la pochette du disque. La trompette n’est pas le seul instrument qu’on y entend : radio, enceintes et objets y ont aussi leur note à dire. Intervenant, les enregistrements (cliquetis divers, sciages succincts, remuements sourds, crécelles de tailles différentes…) semblent tirer du pavillon des notes longues, des souffles blancs sinon quelques éléments de ponctuation. Le paysage est de reps, dont les reliefs changent selon la seconde qu’il est.
L’allure – si l’on peut dire – est plus volontaire sur les deux autres pièces : prise encore de tremblement, la trompette trace une ligne-horizon qu’elle abandonne soudain pour le vertige des hauteurs du théâtre musical qu'est Die Schachtel ; ensuite, elle dévisse (et, à l’occasion, vocalise) à force d’insister face à l’opposition de crépitements ou de signaux aigus sur Splitting 21. C’est ainsi à chaque fois un instrument dont il faut sortir des sons avec minutie contre un échantillon de bruits préalablement enfermés. Autrement peut-être – « peut-être » puisqu’elle joue de contrastes, qu’elle interprète ou improvise –, Birgit Ulher développe son singulier « art des bruits » à force de nouvelles déviations instrumentales.
Birgit Ulher : Matter Matters
Hideous Replica, 2017.
CD
Guillaume Belhomme © Le son du grisli
Doneda, Kocher, Schiller : /// grape skin (Another Timbre, 2011) / Doneda, Kocher : Action mécanique (Flexion, 2011)
Le 23 juin 2010, Michel Doneda improvisa en compagnie de l’accordéoniste Jonas Kocher et du joueur d’épinette Christoph Schiller.
Ainsi ///grape skin conserve-t-il le souvenir de cette réunion : consigne des lignes sinueuses s’emmêlant et des bruits qui tournent en satellites au-dessus de l’association. A force de mouvements, ce sont deux membranes qui sont ici créées. La première adopte la ligne d’un chant monacal et, sur le cadre de l’instrument à cordes, dépose les longs aigus de sopranos et les graves tenaces de l’accordéon. La seconde est faite de moments différents intelligemment imbriqués : l’homme y scie ou y souffle, y affirme ou y tremble, dans des instruments qu’il a voulu d’un autre âge (c'est à dire en avance sur son temps). De ces deux membranes de formes différentes filtrent alors cet ouvrage de cohérence, cette affaire d’osmose qu’est ///grape skin.
EN ECOUTE >>> /// grape skin (extrait)
Michel Doneda, Jonas Kocher, Christoph Schiller : ///grape skin (Another Timbre / Metamkine)
Enregistrement : 23 juin 2010. Edition : 2011.
CD : 01/ First Membrane 02/ Second Membrane
Guillaume Belhomme © le son du grisli
D’un concert donné à Sofia un peu plus tôt (27 novembre 2009), Doneda et Kocher ramenèrent de quoi permettre au second d’inaugurer le catalogue de son propre label, Flexion. Sur cet Action mécanique, le duo va, toujours dans l’urgence, de paraphrases en déconstructions. Fait d’interventions brèves, le dialogue gagne en rondeurs au point de rassurer Doneda qui laissera en conséquence libre cours à une invention plus individualiste. Le changement de cap, d’augmenter et même de compléter cet autre exercice d'improvisation convaincante.
EN ECOUTE >>> Action mécanique (extrait)
Michel Doneda, Jonas Kocher : Action mécanique (Flexion / Metamkine)
Enregistrement : 27 novembre 2009. Edition : 2011.
CD : 01/ Action mécanique
Guillaume Belhomme © le son du grisli
Yusef Lateef, Celer, Thomas Ankersmit, Tomas Phillips, Bent Spoon Duo, Carl Ludwig Hübsch, Christoph Schiller, Stasis Duo
Yusef Lateef, Adam Rudolph : Towards the Unknown (Meta, 2010)
Towards the Unknown est la rencontre de deux multi instrumentistes (Adam Rudolph et Yusef Lateef) et aussi un hommage adressé par le premier au second. Malheureusement, Towards the Unknown est aussi un disque peu recommandable sur lequel de petits orchestres donnent sérieusement de la voix, du tambourin ou du synthétiseur. De bons sentiments évoluant en vase clos, donc : irrespirable. (gb)
Celer : Dying Star (Dragon’s Eye Recordings, 2010)
Avec Dying Star de Celer (Will Long et Danielle Baquet-Long), les codes de l’écurie Dragon’s Eye Recordings sont respectés : on est ici dans une ambient diaphane. C’est délicat et ça se contente d’une note et de ses variantes automnales. Mais, le soleil de la pochette nous aveuglant, impossible d'y reconnaître la moindre identité. (pc)
Thomas Ankersmit : Live in Utrecht (Ash International, 2010)
Il aurait fallu assister à ce Live in Utrech de Thomas Ankersmit pour savoir d’où sortaient tous ces bruits (drones, chuintements, éructations, larsens, notes de synthés et des samples pour couronner le tout). Il aurait fallu assister à ce live pour connaître aussi notre réaction face à autant d’agressions (des représailles, peut-être ?). Mais pour calmer ses ardeurs et les nôtres, Ankersmit terminait sa prestation sur un air de folk : très bizarre et très acceptable tout ça. (pc)
Tomas Phillips : Quartet for Instruments (Humming Conch, 2010)
Le titre est simple et la musique est plutôt belle. Quartet for Instruments est une pièce de tendresse où un piano, une clarinette, un violoncelle et des traitements électroniques, se disputent des cauchemars éclairés à la bougie. On pense parfois à Michael Nyman ou à Taylor Deupree alors que l’œuvre est celle de Tomas Phillips. (hc)
Bent Spoon Duo : Cover Prince (Bug Incision, 2010)
Sur Cover Prince, Chris Dadge (violon et guitare) et Scott Munro (violon et « partial trombone ») se frottent l’un à l’autre. Eloge du crin-crin et souffles courts pour tout panache, le duo démontre d’un je m’enfoutisme contagieux puisque l’auditeur finit par relativiser lui aussi. Trois applaudissements sur la fin du disque. (gb)
Carl Ludwig Hübsch, Christoph Schiller : Giles U. (Another Timbre, 2010)
Sortis de Millefleurs, Christoph Schiller et Carl Ludwig Hübsch dialoguent à l'épinette et au tuba. Passé les premières craintes – notamment celle de voir le duo se satisfaire de la juxtaposition de souffles souffreteux et de cordes étouffées –, un système évolutif se met en place qui saura jouer des contrastes. Grâce à l'usage que Schiller fait de l'électricité et à la grave répartie d'Hübsch, Giles U. parvient à convaincre d’un bout à l’autre de ses sept mouvements. (gb)
Stasis Duo : - (L’innomable, 2010)
Après 3, Adam Sussman et Matt Earle continuent de donner dans les bruits blancs. Sur ce disque sans titre, ils travaillent le numérique un peu à la manière d’Ikeda si ce n’est en plus agressif. Leurs armes sont des larsens qui forment une œuvre trop clinique pour être honnête. (pc)
Millefleurs : Millefleurs (Creative Sources, 2009)
Depuis 1999, Christoph Schiller dirige l’ensemble vocal Millefleurs. Celui-ci comprend en ses rangs aussi bien des amateurs que des musiciens habitués des scènes de l’improvisation comme Carl Ludwig Hübsch ou Agnès Palier. Il s’agit du premier opus d’un groupe que l’on devine fascinant sur scène. Son nom renvoie aux tapisseries médiévales dont le fond est parsemé de petites fleurs. Ces dernières correspondraient aux sons émis par chacun des musiciens ; le fond, au tout formé par ces efforts individuels.
Chaque morceau, baptisé d’après une fleur, résulte ainsi d’une improvisation libre. Si le concept est proche de celui mis en place par Phil Minton avec son Feral Choir, le résultat s’en éloigne par l’absence d’un conducteur, une rythmique moins affirmée et des ambiances plus abstraites. Il y a comme une retenue dans l’expression des chanteurs qui les empêche de tomber dans la cacophonie. D’ailleurs, il est rare d’entendre plus que quelques-uns des douze improvisateurs en même temps. L’inquiétante étrangeté qui se dégage de leurs chuchotements, trilles ou cris étranglés, est suffisamment captivante pour faire oublier la durée d’un album parfois un peu long. Pour s’en convaincre, il suffit d’écouter Passiflora incarnata et de se laisser glacer par un chœur nocturne et incantatoire.
Millefleurs : Millefleurs (Creative Sources)
Enregistrement : janvier-février 2009. Edition : 2009.
CD : 01/ galanthus nivalis 02/ cypripedium calceolus 03/ ononis spinosa 04/ rhinanthus minor 05/ cardamine pratensis 06/ passiflora incarnata 07/ lamium album 08/ saxifraga aizoon 09/ pulsatilla vulgaris 10/ maianthemum bifolium 11/ linnea borealis 12/ arum maculatum.
Jean Dezert © Le son du grisli