Trevor Watts : The Deep Blue (Jazzwerkstatt, 2009)
Ce disque est à la fois celui de la solitude et de la multiplicité. Trevor Watts y joue seul et signe toutes les compositions. Mais aux saxophones soprano et alto s’ajoutent le piano, les percussions et le synthétiseur. Et ce disque célèbre, grâce aux rythmes créés par Watts, de nombreux ailleurs : l’Ecosse (Highlands & Islands), l’Afrique (Ghana Bop), le Moyen Orient (Golden Roses) ou encore les Caraïbes (Mama Rhumba’s). Mais nous n’écoutons pas ici quelque world music ; le synthétiseur met à distance l’illusion de l’exotisme et ce qui importe demeure le chant de Watts, l’incandescence de son jeu de saxophone. Les rythmes sont posés pour que le co-fondateur du Spontaneous Music Ensemble puisse développer ses longues improvisations chamaniques (A Life’s Celebration ou Drumbola).
Le disque s’ouvre avec le poignant Lace, hommage à son compagnon d’autrefois Steve Lacy. Plus loin, The Moiré Principle remet en perspective l’expérience de Watts au sein de son combo Moiré Music. Au final, c’est à une sorte de portrait en plusieurs fragments, comme chamarré, de Trevor Watts que nous avons affaire… Inlassable arpenteur de mondes, pierre angulaire de la musique improvisée européenne, Trevor Watts nous dit, dans les notes de pochette de ce disque généreux et attachant : « Je crois que les tous les musiciens devraient déployer leurs ailes aussi loin qu’ils le peuvent et vivre autant d’expériences que possible (…). Trouver sa propre voix est la clé ».
Ce disque nous démontre que c’est dans l’altérité que Watts a su trouver sa voix profonde, son Deep Blue. Solitude et multiplicité, donc.
Trevor Watts : The Deep Blue (Jazzwerkstatt)
Enregistrement : 2008. Edition : 2009.
CD : 1/ Lace 2/ Deep Blue 3/ Highlands & Islands 4/ Drumbola 5/ A Life’s Celebration 6/ Golden Roses 7/ The Moiré Principle 8/ Ghana Bop 9/ Mama Rhumba’s
Pierre Lemarchand © Le son du grisli