Keith Fullerton Whitman : Disingenuity b/w Disingenousness (Pan, 2010)
Artiste à la réputation mythique, Keith Fullerton Whitman n’a au de cesse d’explorer les styles au sein de sa déjà riche discographie. Entre breakcore et IDM (sous son pseudonyme de Hrvatski) pour le compte du label Planet Mu et l’electronica ambient avant-gardiste sur Kranky, le producteur et musicien américain n’a eu de cesse de renouveler un langage en perpétuelle mutation.
Aujourd’hui hébergé sur la maison Pan-Act de Bill Kouligas, KFW intègre essentiellement la musique concrète de Pierre Schaeffer et François Bayle dans son ultime ouvrage, qui nous vient quatre ans – et oui ! – après les fascinantes quarante-et-une minutes du live Lisbon. Adepte, c’est désormais officiel tant c’est frappant, d’un déconstructivisme analogique où la virtuosité des bruits vivants fait tournoyer les mandibules à force d’entrechocs, Whitman marie l’agressivité tangente des Nocturnal Emissions à l’enchevêtrement magnifique de Francisco Lopez (quand ce dernier ne mute pas le métal en une furie post-doom) – mais on songe aussi, de temps à autre, à Xenakis et aux expérimentations pionnières des années cinquante.
Conçues à partir d’enregistrements en public et de studio pris ces deux dernières années, les deux pistes de Disingenuity b/w Disingenousness (une par face de vinyle) évoluent en miroir l’une de l’autre. Bruyante et nerveuse, la première agresse les tympans en une épreuve combattante, la seconde apaise le tourment vers un surprenant clin d’œil au krautrock synthétique des seventies, où Ralf Hütter et Florian Schneider auraient muté en chercheurs de l’inconscient tournés vers l’au-delà.
Keith Fullerton Whitman : Disingenuity b/w Disingenousness (Pan-Act / Metamkine)
Edition : 2010.
LP : 01/ Disingenuity 02/ Disingenousness
Fabrice Vanoverberg © Le son du grisli