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Le son du grisli

1 juin 2023

Akchoté / Henritzi : Pour et Contre > Donald Miller

donald miller le son du grisli transgression

A l’occasion de la parution du livre Guitare Conversation de Noël Akchoté et Philippe Robertle son du grisli ressuscite le temps d’une autre conversation : celle à laquelle se sont livrés Michel Henritzi et le même Akchoté, qui compose au fil des impressions une discographie de la guitare jazz faite d’une vingtaine de références. Dix ont été choisies par Henritzi, dix autres par Akchoté, auxquelles réagissent ensuite l’un et l’autre. En introduction de ce long échange – que vous retrouverez compilé à cette adresse au son du grisli –, Noël Akchoté explique... 

J'ai découvert Borebetomagus dans les années 90, comme tout le monde, je ne savais pas trop quoi en faire ni en penser. Ça avait un arrière goût d'ARFI (Workshop de Lyon), mais plus rock, plus brut aussi que la musique improvisée anglaise (parfois je me prends à me demander s'il y en a eu une autre que l'anglaise, rires). À chaque écoute je trouve ça vraiment abouti, vraiment implacablement cohérent aussi, mais toujours je reste un peu extérieur, je ne sais vraiment pas quoi en faire.

Qu'importe, il s'agit ici de Donald Miller, seul et acoustique (Dobro en bois ?). C'est un jeu assez classique, sorte de raga-folk, alternant slide et picking, c'est absolument remarquablement bien exécuté, donc assez différent de ce que je connaissais. Mais si je devais être un peu difficile (et je le suis, rires), le même problème revient qu'avec Borbetomagus, à savoir la dynamique et le narratif. La dynamique est un peu restreinte (entre intense et moins intense, mais pas d'autres nuances), ce qui va assez bien avec ma seconde question (le narratif), ou allons-nous, y aura-t-il un développement, une histoire et donc une évolution ?

Ça me fait penser aux musiques traditionnelles qui se jouent sans nuances, un peu sans y penser, comme un rituel immuable, mais aussi un peu inanimé. C'est admirable, mais il m'en faudrait un peu plus pour entrer dedans. Noël Akchoté

J'ai souvenir d'un concert de Borbetomagus à la Shot Gun Gallery à Strasbourg particulièrement intense et extrême, au milieu du set les deux sax ont cessé de jouer un court instant, comme une respiration, laissant Donald Miller seul. Il a joué peut-être 2 minutes quelques mesures de « A Spoonful Blues » de Charley Patton, c'était d'une beauté sidérante, ce pur moment de poésie guitaristique entre deux blocs organiques de bruits.

Miller vient de cette histoire aussi. Il disait dans un interview que « le blues était une maladie mélangée à son ADN ». Sur cet album il joue essentiellement de la 12 cordes. L'album dont ce morceau est extrait me semble assez aventureux, il s'y essaye à plein de techniques même si l'americana reste le fil conducteur, son précédent disque solo Little Treatrise on Morals est un disque pour guitare électrique préparée des plus novateurs que j'ai pu entendre, un des premiers à introduire le bruit comme matière et non plus seulement comme accident.

Pour revenir à ce morceau, j'entends pour ma part une narration, à la façon d'un plan séquence, qui permet de s'immerger dedans, de se laisser emmener je crois, où l'auditeur est actif, à lui d'entendre. Vous avez en commun d'avoir joué avec Tetuzi Akiyama et d'avoir tous deux un truc en partage avec lui, très différents, là où tu es dans le dialogue et comme deux potes qui partagent un truc, un verre en parlant cuisine, lui crée un climat autour, un paysage dans lequel Tetuzi pose ses notes / sons comme des accidents, ils sont sur des plans différents mais à l'arrivée ils sont ensemble. Michel Henritzi

Image of A paraître : Guitare Conversation de Noël Akchoté & Philippe Robert

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