Le son du grisli

Bruits qui changent de l'ordinaire


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Archives des interviews du son du grisli

Alessio Riccio : Ninshubar. From the Above to the Below (Unorthodox, 2013)

alessio riccio ninshubar

Batteur, percussionniste et compositeur, Alessio Riccio multiplie non seulement les pistes (18) sur Ninshubar. From The Above To The Below mais aussi les croisements stylistiques. Improbable – et très réussi – mélange de musiques contemporaines (Luciano Berio-style) tombées en pamoison devant un free rock tendance jazz (think Chris Corsano en leader du No-Neck Blues Band), l’ambition musicale de l’artiste transalpin ne se résume heureusement pas à un seul tenant bordélique – même si, au premier abord, ça déboule dans tous les sens et c’est à perdre la raison.

Toutefois, et bien vite, les nombreuses et assumées influences du gaillard (dont l’évidence Lasse Marhaug) nous emmènent séance tenante du meilleur côté de la force, telle qu’on se l’imagine du côté de la Norvège façon label +3dB. Et quelle riche idée de convier à la table le chant tout en nuances et sourdines de la Belge Catherine Jauniaux, associée au spoken word fascinant de l’Italienne/ophone Monica Demuru.

écoute le son du grisliAlessio Riccio
Ninshubar (extraits)


Alessio Riccio : Ninshubar. From The Above To The Below (Unorthodox Recordings)
Edition : 2013.
CD : 01/ Da nemico ad amico, si parlò di un cane... 02/ T6A - (Le) cattive compagnie 03/ Ishbu Kubu - Maenads_Ninshubar/Premise_Nell'ira 04/ Angelus 05/ D2 - (pre)Purifica le tue labbra 06/ Solennità dell'ombra 07/ Bacchae 08/ T6B - Cerbiatta_Hieros Gamos_La saggezza ideale_Infiniti gli uomini 09/ Il cane e la (sua) nuova vita 10/ Profezia 11/ Esilio 12/ Falso, anche in mezzo alla folla! 13/ D3 - Blessedness 14/ Purifica le tue labbra (in silenzio) 15/ D4 - Cerbiatta/Reprise 16/ Sull'affanno dell'uomo - (post)Purifica le tue labbra 17/ D1 - Il cane e la (sua) soglia 18/ (Re)Ishbu Kubu - Ninshubar/Autoremix_Come away
Fabrice Vanoverberg © Le son du grisli



Daniel Menche, William Fowler Collins : Split (Sige, 2014)

daniel menche william fowler collins split

Ainsi ces travaux partagés de nature et de ténèbres devaient un jour rapprocher Daniel Menche et William Fowler Collins. C’est un vinyle, pour l’heure, dont ils remplissent chacun une face.

Sur la première, Menche installe une ambient qui dévie dès ses premières secondes : souvenir de New Age gangréné par toutes les névroses qu’il aura vu venir à lui, tourne sur les trajectoires de drones nombreux puis s’offre à un orchestre fantôme, qui tonne et l’emportera. Sur la seconde, Fowler Collins dépose quelques notes de guitare bientôt avalées par un écho vorace. Celui-ci fera de frottements, de rumeurs, de tremblements graves et de motifs de guitare électrique bouclés, une berceuse oppressante : moins démonstrative que celle de Menche, la pièce est de charge égale, qui manifeste et caractérise le rapprochement en question.  

écoute le son du grisliDaniel Menche
Raised Coils of the Giant Serpent of Eternity

écoute le son du grisliWilliam Fowler Collins
I Heard Only the Eternal Storm

William Fowler Collins, Daniel Menche : Split (Sige)
Edition : 2014.
LP : A/ Daniel Menche : Raised Coils of the Giant Serpent of Eternity – B/ William Fowler Collins : I Heard Only the Eternal Storm
Guillaume Belhomme © Le son du grisli


Michal Jacaszek, Kwartludium : Catalogue des arbres (Touch, 2014)

michal jacaszek kwartludium catalogue des arbres

Les field recordings, certains les proposent tel quel, d’autres les transforment… Michal Jacaszek, lui, les fait accompagner. En l’occurrence par Kwartludium, un quatuor polonais d’allure toute classique (violon, clarinettes, piano et percussions : Piotr Nowicki, Paweł Nowicki, Dagna Sadkowska & Michał Górczyński) mais néanmoins fort inventif.

Son Catalogue des arbres (peupliers, sureaux, chênes…), qui ne manquera pas d’évoquer les oiseaux de Merzbow (à moins que ce ne soit, mais je ne peux pas y croire, ceux de Messiaen), se balance entre deux branches : une atmosphère nébuleuse et un contemporain de nature. Pas étonnant qu’on semble apercevoir, à l’autre bout de la forêt ou caché dans un fourré, Gavin Bryars ou Kronos Quartet, Rafael Toral (première période) ou Mark Hollis (dernière période en date). Sur le souffle de l’enregistrement, les pages du catalogue tournent, délivrant la sève qui y coule et la vie qui y bruisse.

Michal Jacaszek, Kwartludium : Catalogue des arbres (Touch / Metamkine)
Edition : 2014.
CD : 01/ Sigh (Les peupliers) 02/ Green Hour 03/ A Book of Lake (Roselière) 04/ Garden (Les sureaux) 05/ From a Seashell 06/ Circling (Le pré) 07/ Anthem (La forêt) 08/ Kingdom (Les chênes, les bouleaux)
Pierre Cécile © Le son du grisli


Fire! : (Without Noticing) (Rune Grammofon, 2013) / Ken Vandermark, Mats Gustafsson : Verses (Corbett vs. Dempsey, 2013)

fire without noticing

Fire! pourrait-il être autre chose que convulsif ? Les machines saturantes ouvrant et refermant ce disque disent beaucoup des excès à venir. Le scénario, épais comme une carte postale, est celui du cri. Au ténor ou au baryton, le bon Mats Gustafsson hurle une psyché rouillée. Les riffs, eux aussi épais comme des cartes postales, peuvent prendre la route du méditatif ou des lenteurs australes mais ne sont jamais que prétextes aux contaminations à venir.

Habitué aux débordements et autres escalades soniques, l’auditeur pourra (ou pas) y trouver son compte. Mais reconnaissons à la formule ses limites. Ennui serait trop fort, amertume serait plus juste.

Fire! : (Without Noticing) (Rune Grammofon)
Enregistrement : 2012-2013. Edition : 2013.
CD : 01/ Standing on a Rabbit 02/ Would I Whip 03/ Your Silhouette on Each 04/ At Least on Your Door 05/ Tonight, More, Much More 06/ Molting Slowly 07/ I Mostly Stare
Luc Bouquet © Le son du grisli

ken vandermark mats gustafsson verses

Enregistrés le 24 mars 2013, Ken Vandermark et Mats Gustafsson en Verses font de l’ère du swing un point de départ à partir duquel ils réinventeront à leurs manières (bien connues, maintenant) l’art de descendre en flamme tout entendement, celui du sifflement convulsif et du rebond vigoureux, celui enfin du canevas solide allié à des motifs changeants. Versatile, et souvent heureux.  

Ken Vandermark, Mats Gustafsson : Verses (Corbett vs. Dempsey)
Enregistrement : 24 mars 2013. Edition : 2013.
CD : 01/ The Madness of Branches 02/ Ripolin 03/ Fortunates Rust 04/ I Never Dreamed 05/ Beside Me, Images 06/ We Turn the Page
Guillaume Belhomme © Le son du grisli


NG4 Quartet : A Quartet for Guitars (Mikroton, 2014) / Rick Reed, Keith Rowe, Bill Thompson : Shifting Currents (Mikroton, 2013)

ng4 quartet a quartet for guitars

Si elle rappelle (ou évoque ?) une partition célèbre de Cornelius Cardew, celle présentée en couverture d’A Quartet for Guitars en est une autre tout en n’en étant peut-être pas une. Aurions-nous en effet sous les yeux une tablature remplie de numéros de cases et d’intentions d’effets ? Il faudrait le demander à Keith Rowe, ou Anthony Taillard, Emmanuel Leduc, Julien Ottavi, puisqu’ils sont de ce quartet… de cette réunion de guitaristes qui touchent aussi à l’électronique.

Il ne sera donc pas surprenant d’entendre quatre guitares (électriques) déroutées, qui filent l’usage mécréant, trahissent un goût pour la perversion mélodique. Respectant des découpages mais libres aussi vraisemblablement de donner dans l’indétermination, les musiciens dessinent des points d’exclamation (larsens et feedbacks, cordes pincées, notes plus longues...) et des points d’interrogation (glissandi, harmoniques filantes, notes étouffées ou dérapantes…) qui font toutes leurs phrases. A la place des mots qui manque il y a des silences et des signaux codés que l’on prendra plaisir à déchiffrer, à défaut de toujours les capter.

écoute le son du grisliNG4 Quartet
Ineptitude

NG4 Quartet : A Quartet for Guitars (Mikroton / Metamkine)
Enregistrement : 2013. Edition : 2014.
CD : 01/ Affetuoso E Sostenuto 02/ Ineptitude 03/ Awkward 04/ Gaucheness 05/ Underwhelm 06/ Failing
Héctor Cabrero © Le son du grisli

rick reed keith rowe bill thompson shifting currents

Plus tôt, Mikroton publia les rencontres en 2009 (en deux endroits) de Keith Rowe, Rick Reed (synthétiseur) et Bill Thompson (électronique) : Shifting Currents. C’est là un disque-double qui expose une installation de Thompson (basée sur la modification en temps réel d’une collection d’une centaine de pièces sonores) réarrangée par la suite, qui joue de silences et craque sous la juxtaposition de rumeurs et de field recordings, puis une électronique sur laquelle les basses tremblent et les effets abondent – les tensions, mal contenues peut-être, pourront avoir raison des présences, au point qu’on y perdra parfois le guitariste. Heureusement, le premier disque est le plus long des deux.

Rick Reed, Keith Rowe, Bill Thompson : Shifting Currents (Mikroton / Metamkine)
Enregistrement : mai-novembre 2009. Edition : 2013.
2 CD : CD1 : 01/ 1 – CD2 : 01/ 2
Guillaume Belhomme © Le son du grisli



Andreas Brandal : The Merchant of Salt (Dumpster Diving Lab, 2011) / Drive Home With A Hammer (Quasipop, 2005)

andreas brandal merchant of salt

Si les deux personnages de couverture ne respirent pas la joie, ils sont raccords avec l’univers d’Andreas Brandal. « Instable » car aussi dark ambient que pop indus, électro à la Fennesz ou dronysiaque (et j’en passe).

Le comble, c’est que The Merchant of Salt est un CD d’une cohérence incroyable qui ne justifie pas la dizaine d’années qu’il a fallu pour le voir sortir. Ces messages que Brandal envoie à destination des extraterrestres les singent ou les fantasment, et pour peu qu’ils retombent dans l’oreille d’un humain de passage voilà l’humain ravi ! On pourra maintenant citer encore Eno, Jan Jelinek (dans les rebonds de synthés old school) ou je-ne-sais-quel « maître » de B.O. de série Z : l’effet est immédiat !

Andreas Brandal : The Merchant Of Salt (Dumpster Diving Lab)
Enregistrement : 2001. Edition : 2011.
CDR : 01/ Existence Is Elsewhere 02/ Anemic Cinema 03/ School Of the Thread 04/ Staircase 05/ Kinetic 06/ Chance Operations 07/ End Game 08/ The Merchant Of Salt
Pierre Cécile © Le son du grisli

andreas brandal drive home with a hammer

Parfois avec l’aide de Bjarte Brandal (guitare électrique) et Svein Age Lillehamre (batterie), Andreas Brandal avait déjà enregistré Drive Home with a Hammer (mais dans quel but ? je vous le demande). Sur ce CD, comme le dit le nom du label, c’est une pop quasi parce qu’elle fait référence à l’indus, le noise ou encore le doom. Et encore une fois : l'effet est immédiat !!

Andreas Brandal : Drive Home With A Hammer (Quasipop)
Edition : 2005.
CD : 01/ Level 02/ The Factory Myth 03/ Herzog  04/ There Is No In-Between  05/ File Under Lost 06/ Vintage Velvet Body 07/ Drive Home With A Hammer 08/ A Double Negative 09/ Light Ghost Outfit 10/ Resistant 11/ Scarlet Street
Pierre Cécile © Le son du grisli


Le Grand Frisson : On/off (Creative Sources, 2014)

le grand frisson on off

Le Grand Frisson : derrière ce projet à l’ambition patronymique se cache Christophe Berthet, entouré d’un ensemble de sept musiciens acoustiques à l’unité aussi savoureuse qu’ambitieuse : Patricia Bosshard, Laurent Bruttin, Yannick Barman, Jean-Jacques Pedretti, Vinz Vonlanthen, Dragos Tara & Cyril Bondi.

Clairement dans une sphère d’influences où l’empereur aurait pour nom Reinhold Friedl et les terres se voudraient Zeitkratzer, le chef et saxophoniste suisse déploie en huit tableaux une non-exposition mélodique pour laquelle il ne se contente pas d’endosser la vareuse du suiveur. Même si la mayonnaise met du temps à prendre (en gros, sept à huit minutes), les lointains échos free jazz de son On/Off se conjuguent avec envie et délectation à des percussions et des cuivres d’un contagieux dynamisme, sans parler des bois, subtils et intrigants. Et quand ça vire au ralenti, c’est même encore mieux.

Le Grand Frisson : On/Off (Creative Sources / Metamkine)
Enregistrement : 2012. Edition : 2014.
CD : 01/ On/Off 02/ Canopée 03/ Bateau Ivre 04/ In A Séquentiel Mode 05/ Herbes Folles 06/ Gymnocarpe 07/ Latitudes Arctiques 08/ Inéluctable
Fabrice Vanoverberg © Le son du grisli


Masami Akita, John Duncan : The Black Album (Tourette, 2014)

masami akita john duncan the black album

The Black Album est… vert, sa pochette est rose rose et sa couverture noire, certes, mais complètement perforée (ça c’est le Texas, où crèchent les gars de Tourette Records. Qu'ils aient la gachette facile n'est pas une raison pour être grossier, d’autant que la décharge que j’ai reçue à l'écoute du LP est suffisante… en tout cas me suffit, à moi.

Alors quoi ? Une fois ma main glissée parmi les trous de balles (j’y peux rien), j’attrapai le vinyle, le posai sur la platine et y mis dessus le diamant et là… C’est comme un objet métallique (qui serait ma tête) que l’on appuierait sur un tour de pierre : ça crisse, larsenne et crache (pour tout dire : agresse d’une force !). Mais (et il ne faut pas l’oublier) on peut quand même se raccrocher à un rythme : et oui, voilà, ce rythme est celui de ce tour de pierre qui tourne à la régulière…

Heureusement, conciliante, l’agression se fait après plus douce, presque câline, avec un grand rétropédalage dont profitent les bruits de bandes (vrais ? de synthèse ?) et les parasites en tous genres, avant que les hostilités (les « austérités », dirait ma coiffeuse) ne reprennent : aïe, je m’ai écorché ; ouf, c’j'aime le goût du sang ! Vous ai-je dit au moins qu’il s’agissait là d’une brillante collaboration entre Masami Merzbow Akita et John Duncan ?  (et que j’ai oublié de fermer la parenthèse en ligne 2 ?)…

Masami Akita, John Duncan : The Black Album (Tourette / Souffle Continu)
Edition : 2014.
LP : AB/ The Black Album
Pierre Cécile © Le son du grisli


Anne-F Jacques, Tim Olive : Dominion Mills (845 Audio, 2014)

anne-f jacques tim olive dominion mills

Compte-tenu de la rapidité avec laquelle il autoproduit ses enregistrements sur 845 Audio, on saura gré à Tim Olive de ne pas verser dans l’enregistrement facile, c’est-à-dire : de trop. Après Alfredo Costa Monteiro (33 Bays), Katsura Mouri (Various Histories) et Jason Kahn (Two Sunrise), c’est avec sa compatriote Anne-F Jacques qu’il forme ce nouveau duo qui intéresse.

Aux « rotating devices » – petits moteurs électriques modifiés et amplifiés – de Jacques, Olive répond en faisant usage de « magnetic pickups » – sortis d’une guitare électrique monocorde. En trois temps, la paire dompte des râles qu’elle dépose ensuite à distance sur les sillons de plateaux (systèmes ou plaques) qu’elle fait tourner. Bercés par le mouvement et sur écho léger, ces râles deviennent alors des rumeurs à la force de persuasion de laquelle il est bientôt impossible de résister. Et donc, d'applaudir.

Anne-F Jacques, Tim Olive : Dominion Mills (845 Audio)
Enregistrement : juillet 2013. Edition : 2014.
CD : 01-03/ Dominion Mills
Guillaume Belhomme © Le son du grisli


Period : 2 (Public Eyesore, 2014)

period 2

A deux, Charlie Looker (guitare) et Mike Pride (batterie) ne font pas dans la dentelle. Arpèges malfaisants, fracas de toms : le venin est cajolé, le son est fracassé. Avec Chuck Bettis (voix), Looker et Pride font du Naked City (presque) plus vrai que nature. Avec Darius Jones (sax alto) et Sam Hillmer (sax ténor), Looker et Pride confirment le chaos. Laissent se noyer les saxophonistes dans la cuve à mazout, affirmant ainsi leur sens vicié du partage  (que le plus sonique gagne !).

Puis, avec l’altiste et, plus loin encore, avec le vocaliste, contemplent les débris et les chants de ruines. S’en voudraient presque de leurs méfaits. Maintenant, semblent vouloir (re)construire. Mirage ou malice ?

Period : 2 (Public Eyesore)
Edition : 2014.
CD : 01/ Two 02/ Four 03/ Ten 04/ Nine 05/ Six 06/ Eleven 07/ Eight
Luc Bouquet © Le son du grisli



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