Le son du grisli

Bruits qui changent de l'ordinaire


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Archives des interviews du son du grisli

Oren Ambarchi, Stefano Pilia, Massimo Pupillo : Aithein (Karlrecords, 2016)

oren ambarchi stefano pilia massimo pupillo aithein

Oren Ambarchi / Stefano Pilia (3/4HadBeenEliminated, Afterhours…) / Massimo Pupillo (Zu, Offonoff…) ? Les trois ? D’un coup ? Deux guitares, une basse, une batterie ? D’un coup ? Ça pourrait s’avérer planant s’il n’y avait cette petite saturation qui m’attaque le bas du dos et empêche mes yeux de se fermer plus que le temps d'un battement de cil. OK, ça monte lentement, mais au moins on sait que ça monte (…)

-    C’est une chtouille comme Sagittarian Domain en fait ?
-    Oui, un peu beaucoup.
-    Bah, un peu ou beaucoup ?
-    Un peu beaucoup, j’ai écrit.

(…) Les cordes électriques donnent dans le dronofeedback travaillé, les cymbales les chatouillent jusqu’à ce qu’elles se séparent = une guitare d’un côté, une autre guitare de l’autre, une qui monte et l’autre qui descend, & avec ça la batterie qui applaudit grassement et leur bourre le mou : « tout ce qui brûle brille » (c’est ce que veut dire « athein »). Et c’est comme avec The Necks for example ça force ça frotte ça gratte et à la fin ça prend feu. Pourquoi bouder son plaisir ? c’est joli, le feu.



aithein

Oren Ambarchi, Stefano Pilia, Massimo Pupillo : Aithein
Karlrecords
Edition : 2016.
LP / DL : 01/ Burn 02/ Shine
Pierre Cécile © Le son du grisli



Paal Nilssen-Love Large Unit : Ana (PNL, 2016)

paal nilssen-love large unit ana

C’est une drôle d’école de samba qu’a ouverte Paal Nilssen-Love au Royaume de Norvège d’où nous arrivent les trois pièces d’Ana. Inspiré par la MPB – moins ClarA Nanes ou Elis RegAna que batucada –, le Large Unit qu’il emmène depuis 2013 se défait de son épaisseur le temps d’expériences rafraîchissantes.

« The Fat Is Gone », une fois pour toute ? Au son de motifs rythmiques et mélodiques rendus déposés par les invités Paulinho Bicolor et Celio de Carvalho, l’ensemble entamera deux pièces de quinze minutes (Ana et Circle in the Round, composées l’une et l’autre autour d’une phrase de quelques notes, redites par les vents à l’unisson quand ne s’y accrochent pas d’heureuses déclinaisons) et une autre de trente : Riofun, que le batteur a composé Bahia en tête.

Ouverte au berimbau, celle-ci (aussi disponible sur EP) disserte en quatre temps sur un thème exotique, fait porter à d’autres gimmicks des solos affolés et s’arrange aussi d’oppositions, met enfin son bel entrain au service d’une marche funèbre. Voilà les façons qu’a trouvées Nilssen-Love pour insuffler un peu de légèreté à ses franches habitudes ; et son jeu y gagne.



ana

Paal Nilssen-Love Large Unit : Ana
PNL Records
Enregistrement : 14 août 2015. Edition : 2016.
CD : 01/ Ana 02/ Riofun 03/ Circle in the Round
Guillaume Belhomme © Le son du grisli


Urs Leimgruber, Alex Huber : Lignthings (Wide Ear, 2016)

urs leimgruber alex huber lightnings

Avant que le disque se termine sur le Lonnie’s Lament de Coltrane, Urs Leimgruber et Alex Huber avaient escaladé de noirs sommets. Tout commença par les clefs du soprano, le souffle, les effleurements de fûts. Le saxophone était en recherche de territoire : les aigus avaient beau infiltrer, la modulation se mettre en marche, le doute se renforcait au fil des minutes. Et ce ne sont pas les balais distants du percussionniste qui pouvaient alléger le chemin. Il y eut beaucoup de caquetages et d’observations avant que s’ouvre la route du sensible.

Mais un ténor en embuscade ne demandait qu’à surgir. Les sifflements caractéristiques de Leimgruber prirent possession du cercle et l’étincelle devint fusion. Batteur et saxophoniste devinent frères d’armes. Les souffles furent continus, les harmoniques structurèrent le chaos. Ils purent alors s’égosiller, suspendre leurs élans (salivaire du saxophoniste, cliquetis du percussionniste), intensifier de rusées cavalcades : plus rien ne pouvait leur échapper. Pas même cette émouvante évocation coltranienne précisant, de fait, le territoire choisi par les deux improvisateurs.



urs leimgruber alex huber lightnings

Urs Leimgruber, Alex Huber : Lightnings
Wide Ear Records
Enregistrement : 2014. Edition : 2015.
CD : 01/ Swift 02/ Shaped 03/ Resistant 04/ Struck
Luc Bouquet © Le son du grisli

le son du grisli

au courrier ldp trio


Carate Urio Orchestra : Lover / Le Septième Continent : Talking Trash / Systematic Distortion Orchestra : The Assembly

carate urio trio lover

Voilà un CD de chansons pas comme les autres (le CD). D’abord parce que, sur ses huit plages, il n’y en a que trois (de chansons). Ensuite parce que son interprète n’est pas un chanteur (en l’occurrence Sean Corpio ou Joachim Badenhorst) mais un orchestre tout entier (dirigé par… Badenhorst).

Foin de l’impro, nous disent ici le clarinetto-saxophoniste et ses collègues (Sam Kulik au trombone et à la guitare, Frantz Loriot au viola, Pascal Niggenkemper et Brice Soniano aux contrebasses, Sean Corpio à la guitare et à la batterie & Nico Roig à la guitare too) sur ces prises studio de clôture de tournée. Mais des ambiances tout en retenue, une pop orchestrale très cinématographique (la voix de fausset de Corpio s’y prête à merveille) et des minutes d’instruments en bisbille (le très beau Crazy Wind Lay Down)…

Souvent bellement mystérieux mais aussi parfois lisse (le faiblard Feet History) tout en restant écoutable, ce second album, après Sparrow Mountain en 2013, du Carate Urio Orchestra confirme donc tous les espoirs qu’on (LB) avait mis en lui. In love ;)


lover

Carate Urio Orchestra : Lover
Klein
Edition : 2016.
CD : 01 / Preacher 02/ Ar Antiphon 03/ Interlude 04/ Iron Bird 05/ Lover 06/ Crazy Wind Laid Down 07/ Feet History 08/ Fremdenzimmer
Pierre Cécile © Le son du grisli

pascal niggenkemper le 7eme continent talking trash

Dans Le Septième Continent – non pas dépôt d’ondines-ordures mais plutôt orchestre flottant – de Pascal Niggenkemper, on retrouve Joachim Badenhorst en présence de Joris Rühl, Eve Risser, Philip Zoubek et Julián Elvira. Entre la contrebasse et une flûte grave, ce sont donc deux clarinettes et deux pianos préparés qui servent un ouvrage ambitieux dont le lent mouvement d’ouverture (les deux premières plages) impressionne. Malheureusement, le groupe vire bientôt de bord pour envisager des récifs qui le rendent nerveux, et même pire : bavard.


talking trash

Pascal Niggenkemper / Le Septième Continent : Talking Trash
Clean Feed / Orkhêstra International
Edition : 2016.
CD : 01/ Great Pacific Garbage Patch 02/ 135°W - 155°W & 35°N - 42°N 03/ Gyres Océaniques 04/ Plastisphere 05/ Talking Trash 06/ Crochet Coral Reef 07/ Ideonella Sakaiensis 08/ Geisternetz 09/ Kinetic Islands
Guillaume Belhomme © Le son du grisli

frantz loriot the assembly copy

Dans le Systematic Distortion Orchestra qu’emmène Frantz Loriot, on retrouve Pascal Niggenkemper, qui tient une des deux contrebasses de l’ensemble en présence de dix autres musiciens : trombonistes (Ben Gerstein, Sam Kulik), trompettistes (Brad Henkel, Joe Moffett) et contrebassistes (Niggenkemper et Sean Ali) allant aussi par deux. Epais, l’orchestre se soulève lentement, se manifeste à l’unisson – quelques permissions individuelles sont bien sûr accordées – même lorsqu’il feint la mésentente, avant de laisser la parole à Ali sur …Maybe…Still… et à un étonnant passage de relais qui engage batteries, archets puis vents. Au final, l'orchestre de Loriot signe une œuvre d’une belle envergure.


the assembly

Frantz Loriot Systematic Distortion Orchestra : The Assembly
OutNow
Enregistrement : 21 janvier 2015. Edition : 2016.
CD : 01/ Echo 02/ The Assembly 03/ … Maybe… Still… 04/ Le relais
Guillaume Belhomme © Le son du grisli


Pascal Battus, Dafne Vicente-Sandoval (Potlatch, 2016)

pascal battus dafne vicente-sandoval

Entre Marne et Seine – La Muse en Circuit, Alfortville – Pascal Battus (surfaces rotatives, microphones, polystyrène, papier, plastique) et Dafne Vicente-Sandoval (basson, microphones, table de mixage) ont enregistré en mars 2015 les neuf pièces du premier (Marne) des deux disques de cette référence Potlatch ; le second disque (Seine) en renferme six autres, arrangées plus récemment.

Si de la Seine la Marne n’est qu’un affluent, il est ici l’endroit où l’échange prend sa source : ce sont là les premiers remous – crépitation, estimation de la résonance d’un choc, micro soufflé – d’un tumulte que feront et déferont de brèves séquences. Diverses, aussi : ainsi Vicente-Sandoval peut-elle nourrir un grave quelques secondes durant ou composer, comme hier avec Klaus Filip (Remoto), avec de fragiles aigus, quand Battus profite une nouvelle fois de son instabilité créative.

En Seine, il sera encore temps de revenir aux notes longues – d’autant que Vicente-Sandoval n’y interviendra plus qu’au basson. Si le volume de ses notes varie, ces dernières cherchent la collusion dans la ligne – parallèle, celle-ci, aux notes discrètes mais dérapant de son partenaire – quand elles n’implorent pas la collision – c’est alors une histoire de fréquences. Dans un cas comme dans l’autre, l’équilibre trouvé est le même, qui force l’affection.



battus dafne

Pascal Battus, Dafne Vicente-Sandoval
Potlatch / Orkhêstra International
Enregistrement : 2015-2016. Edition : 2016.
2 CD : CD1 : 01/ Marne – CD2 : 01/ Seine
Guillaume Belhomme © Le son du grisli

urs leimgruber souffle continu



Anti Rubber Brain Factory & Hmadcha : Dhöl Le Guedra (arbf, 2016)

yoram rosilio anti rubber brain factory hmadcha live 2013

Présentons rapidement ce package de noms inconnus (de moi) : 1/ Anti Rubber Brain Factory est un combo emmené par le bassiste Yoram Rosilio 2/ Hmadcha est un autre combo que le bassiste Yoram Rosilio a rencontré à Essaouira, Maroc (pays de certains de ses ancêtres).

Terre de contrastes (la puissance spirituelle contre la branlitude des surfers-touristes), le voyage à Essaouira était risqué. On pouvait craindre la main tendue par un branchouilli-cultureux au premier gnawa qui passe et / ou un échange de bons sentiments et de musique baltringue (c’est courant, n’est-ce pas ?). Or, ce CD enregistré en concert à l’Anis Gras d’Arcueil commence plutôt bien.

Pour la bonne raison que l’auditeur en perd son folklore et chope le tournis. A ce point qu’il rêve d’avoir affaire au retour de l’âme du fantôme du festival panafricain d’Alger. Mais le soufflé retombe vite car l’association ne tarde pas à ronronner : on fait tourner le gimmick, on accélère le rythme, on soloïse ou on unissonne… Bref bref, passés les deux premiers titres, c’est toujours la même chose = de la musique d’ambiance exotique loin d'être désagréable mais en-deçà de ce qu'on espérait…  



live 2013

Anti Rubber Brain Factory & Hmadcha : Dhöl Le Guedra
arbf / Souffle Continu
Enregistrement : 20-22 novembre 2013. Edition : 2016.
CD : Dhöl Le Guedra
Pierre Cécile © Le son du grisli


Uliben Duo : Shared Memory (Creative Sources, 2015)

uliben duo shared memory

En temps réel, les live-processing d’Ulrich Phillipp percutent la contrebasse de Benoît Cancoin. Le mouvement ne s’égare pas, ne se transforme pas mais s’enrichit, accroît les harmonies d’archet. La boucle s’affermit, la contrebasse se déconnecte, le grésillement heurte le premier plan (Common Reservoir).

En quarante minutes, Joint Repository brosse le bois, fouette les borborygmes. La contrebasse lance l’accord et les ruches se rejoignent. Le bois scintille, saigne. L’archet se fait long, horizontal, Peter Kowald passe par là. Entre vertiges et contrôles, on glisse et on s’éloigne.

Les coups sont donnés, les coups sont rendus. La mémoire des chaos s’illumine. On gravit marche à marche sans oublier de rebondir (Concerted Recollection). Balayage des cordes ou bourdons, contrebasse et live-processing ne sont plus concurrents. Ils cheminent désormais côte à côte : ogres et fraternels (Mutual Memorization).

shared memory

Uliben Duo : Shared Memory
Creative Sources / Metamkine
Enregistrement : 2014 . Edition : 2015.
CD : 01/ Common Reservoir 02/ Joint Repository 03/ Concerted Recollection 04/ Mutual Memorization
Luc Bouquet © Le son du grisli

>>> A Strasourg, le 29 mai, l'Uliben Duo entamera une tournée de cinq dates. Tous les détails peuvent être lus ici.


Daniel Menche : Cave Canem (Daniel Menche Bandcamp, 2016)

daniel menche cave canem

Voilà longtemps qu’on n’avait plus de nouvelles de Daniel Menche. Autant dire que Cave Camen (trois morceaux que l’on peut écouter / acheter sur le Bandcamp de l’Américain) nous rassure dronement.

L’impression de retrouver l’univers de Road Rash (un vieux jeu Sega, pour les plus jeunes… mais y a-t-il ici des plus jeunes ? Ou même --- les plus jeunes existent-ils ?) ne fait pas long feu, parce que des stomps nous propulsent en plein Mad Max (du coup, c’est plus les mêmes motos…). Mais arrêtons de nous servir dans l’imagerie populaire.  

A la « single string bass slide guitar », le Menche, et aussi aux vibraphones, à la batterie et à l’électronique. Bien sûr pas tout d’un coup, mais tout petit à petit, qui s’installe presque tranquillement mais qui menace à chaque fois dès le début. Et le « petit à petit » va vite, on a perdu le fil d’une percussion ou la piste d’une des couches et voilà qu’on entend des voix ou des saturations électriques qui refileraient la frousse à la plus aguerrie des Natascha Kampusch… Bref, notre homme s’y prend comme le Menche qu’il est, même si certains le regretteront moins noise qu’avant. Alors qu’on pourrait s’en féliciter, non ? Ce serait un comble (de cave) !

cave canem

Daniel Menche : Cave Canem
Daniel Menche Bandcamp
Edition : 2016.
DL : 01/ Cave Canem 1 02/ Cave Canem 2 03/ Cave Canem 3
Pierre Cécile © le son du grisli


Christian Wolfarth : Spuren (Hiddenbell, 2016)

christian wolfarth spuren

Pour les deux faces d’un vinyle bleu nuit, Christian Wolfarth a récemment composé : sur matériau préenregistré ; avec la réflexion que l’exercice nécessite ; à distance, enfin, de ses Acoustic Solo Percussion.

C’est d’abord un bruit continu de sonnailles qui, mises bout à bout, s’entendent sur une presque même note. Celle-ci aurait pu courir sur les dix-sept minutes de Spuren I – on aurait alors, pour évoquer le bourdon, repris les noms osés par Jason Kahn dans les notes de Scheer – mais déjà Wolfarth arrange un autre air, qui lie quelques crépitements, le murmure d’une eau qui coule, des résonances jouant de ressacs, et un goût de métal exercé au chuintement.  

Au collage délicat de la première face, la seconde répond par un développement que l’on pourrait croire naturel. C’est au doigt et à l’œil (celui qui écoute), sur caisse claire semble-t-il, que le batteur installe une autre rumeur : sur les peaux de son instrument passent des rotatives, à même le tambour naît une étonnante musique de roulage – sans doute est-ce elle qui explique la référence faite au Talking and Drum Solos de Baby Dodds par Adam Sonderberg dans les courtes notes qu’il a signées pour Spuren. Ainsi est-ce dans le contraste, pour ne pas dire en deux temps, que les relectures de Christian Wolfarth magnifient sa première expression ; elles sont, en conséquence, indispensables.

spuren

Christian Wolfarth : Spuren
Hiddenbell Records
Enregistrement : 2015. Edition : 2016.
LP : A/ Spuren I – B/ Spuren II
Guillaume Belhomme © Le son du grisli


Dave Ballou : Solo Trumpet (Clean Feed, 2016)

dave ballo usolo trumpet

Pour indépassables qu’ils soient, Bill Dixon, Wadada Leo Smith, Axel Dörner et Peter Evans (liste à compléter) se voient aujourd’hui concurrencés par le premier disque de trompette solo de Dave Ballou.

Sobrement intitulé Solo Trumpet, ce disque voit Ballou expérimenter plusieurs pistes. On l’entend ainsi gagner en clarté au fil des plages (Tightly puis Broken Wing), tourner autour du  sujet, assumer angles et loopings (Dgas), progresser note à note (Construct), déchiffrer quelques indépendances opportunes (Construct encore), s’essayer – sans convaincre – aux techniques étendues (Wooley Warmth), retrouver l’éclat de Miles (Another Fool), s’inscrire dans des souffles quasi-continus (Sheets). Bref, ne pas réduire son talent à l’exercice de style.



solo trumpet

Dave Ballou : Solo Trumpet
Clean Feed / Orkhêstra International
Enregistrement : 2015. Edition : 2015.
CD : 01/ Tightly 02/ Dgas 03/ Laf 04/ Wooley Warmth 05/ Mumbling 06/ Another Fool 07/ Sheets 08/ Construct  09/ Broken Wing 10/ Loosely
Luc Bouquet © Le son du grisli



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