Le son du grisli

Bruits qui changent de l'ordinaire


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Archives des interviews du son du grisli

RadioMentale : I-Land (F4T, 2012)

radiomentale i-land

I-Land est la première (vraie) sortie du duo RadioMentale, malgré une carrière démarrée en… 1992. Auteurs d’une multitude de collages, mixes et montages sonores, qui ont valu à leurs créateurs une renommée franche et certaine, Eric Pajot et Jean-Yves Leloup trouvent dans leur introspection bruitiste un monde dont ils ont – heureusement – banni la notion de monotonie.

Mariage profondément subtil d’une musique concrète et d’une ambient fugace telles qu’on les retrouve passionnément sur le label Touch (pensons à Jana Winderen ou Thomas Köner), l’univers de la paire française invite à la fois à l’éveil et à la méditation. Poursuivant un sillon tracé entre @c et Gilles Aubry, tout en remuant les terres fertiles de Phill Niblock et Geir Biosphere Janssen, nos deux hommes manient avec brio l’art de l’inquiétude (les voix d’outre-tombe de Sinking) et invitent à leur table élégamment dressée un monde entre courants arctiques et vents urbains d’une formidable acuité (radio)mentale.

EN ECOUTE >>> I-Land (extrait)

RadioMentale : I-Land (F4T)
Edition : 2012.
CD : 01/ Smooth Operator 02/ Sinking 03/ Gotlander
Fabrice Vanoverberg © Le son du grisli



Henri Roger : Exsurgences (Facing You / IMR, 2012)

henri roger exsurgences

Dans la pochette de ces deux LP, livrés avec un DVD contenant des films de l’artiste Anne Pesce (en lecture ici), le report d’une interview d’Henri Roger par Philippe Robert nous explique le parcours pour le moins iconoclaste de ce musicien. La pop des années 60, la chanson avec Catherine Ribeiro, l’improvisation jazz avec Paul Rogers et François Méchali

Encore aujourd’hui, ce bouillon de culture travaille Henri Roger. Dans les impressionannts solos de piano d'Exsurgences, on sent avant toute autre chose un véritable amour du jeu libre. D’une touche à l’autre, de gauche à droite et de droite à gauche, le pianiste fait tourner un manège à sensations impressionniste, minimaliste, expressionniste… Avec une aisance de voltigeur, Henri Roger remonte l’histoire de son instrument et les personnages qu’il fait tourner ont pour noms Debussy, Satie, Kremsky, Coltrane, Taylor, Schlippenbach, Jarrett… Et Ran Blake, ô combien. Une galerie que l’on voit défiler comme sous hypnose et qui laisse sur son passage des couleurs qui ne sont autres que celles de ce grand autoportrait d’Henri Roger.

Henri Roger : Exsurgences (Facing You / Instant Music Records / Souffle Continu)
Enregistrement : 2012. Edition : 2012.
2 LP + 1 DVD : Exsurgences
Héctor Cabrero © Le son du grisli


Lasse Marhaug, Bruce Russell : Virginia Plane (The Spring Press, 2013)

lasse marhaug bruce russell virgina plane

Ce n'est pas la première fois que Bruce Russell et Lasse Marhaug collaborent. Mais Virginia Plane – où le label The Spring Press nous promet de la musique concrète, du dub, des power electronics et du free noise – pourrait être à ce jour l'ouvrage le plus concluant qu'ils aient fabriqué ensemble.

Quatre morceaux par face de trente-trois tours gondolé à force de cracher des bruits qui piquent (marteau piqueur ou machine à coudre, M. Marhaug ?), motorisent, grincent, percutent (des bols ou un piano), déferlent en canalisations creusées profond, croulent et explosent sous le chutes de gravats, etc. Musique concrète : ok. Power electronics & free noise : ok.

Pour le dub, il faut attendre les sirènes en rut de Pyjamarama (un nom comme un autre) qui dansent sur du melodica étendu et bien sûr Numberer Dub. Mais, on s'en doutait, ce dub est loin d'en être, car il est plutôt récréation avant qu'un orgue ne revienne en démontrer. Ses drones résistent à l'appel des crépitements sur une conclusion, In A Dream-Home, qui résumerait à elle seule  l'attraction qui fait que Marhaug et Russell jouent régulièrement ensemble : le goût des bruits que tout oppose et qui pourtant s'arrangent au poil.

Lasse Marhaug, Bruce Russell : Virginia Plane (The Spring Press / Metamkine)
Edition : 2013.
A01/ Both Ends Burning A02/ Remake/remodel A03/ For Your Pleasure A04/ The Numberer B01/ Do the Strand B02/ Pyjamarama B02/ Numberer Dub B03/ In a Dream-home
Pierre Cécile © Le son du grisli


Lean Left : Live at Café Oto (Unsounds, 2012)

lean left live oto unsounds

Ainsi donc sont ici retranscrits les premiers sets donnés par Lean Left au Café Oto ces deux soirs de septembre 2011. On sait de The Ex les guitares brouillonnes – qui révèlent leurs charmes comme les visages frippés le font dans la ride profonde ou même la cicatrice –, empêchées donc nerveuses, interrompues souvent dans leur élan, et puis rudes autant que peut être sévère et implacable la frappe de Nilssen-Love.

Soit : le cadre idéal, pour Vandermark, qui invente en free tendu et passe de saxophone en clarinette excités par la dispute. Dans son dos, les guitares peuvent se chercher, tisser de concert une tapisserie de sons vengeurs ou inventer au contraire quelques atmosphères en latence qui, chargées en électricité, ne demandent qu'à entendre anches et peaux résonner. Le laisser-aller est de mise et convainc jusqu'au médiator : il faut écouter mais renvoyer aussi le matériau qui claque, et puis se laisser abattre par l'air qu'il a toujours de balayer d'un coup toute tentative de compromis.

Lean Left : Live at Café Oto (Unsounds)
Enregistrement : 11 et 12 septembre 2011. Edition : 2012.
CD : 01/ Koevoet 02/ Drevel
Guillaume Belhomme © Le son du grisli


Lean Left, Ab Baars, Steve Noble : Live at Café Oto (Kollaps, 2012)

lean left live at café oto

De deux soirs que passa Lean Left au Café Oto (11 et 12 septembre 2011), le label Kollaps a fait deux trente-trois tours – et même deux objets soignés : derrière le kraft découpé, trouver plusieurs pages de photographies en noir et blanc signées Andy Moor. Quatre faces reviennent donc sur les seconds sets de ces soirées – premiers sets publiés par Unsounds sur Live at Café Oto – à l'occasion desquels intervenaient deux invités : Ab Baars et Steve Noble.

Ainsi Baars permet-il au groupe d'équilibrer souffleurs et guitaristes : avec Ken Vandermark, le Hollandais s'oppose à la paire Andy Moor / Terrie Ex Hassels sous l'arbitrage (et les provocations) de Paal Nilssen-Love. L'espace est réduit et les musiciens jouent des épaules pour s'en extraire : phrases libertaires et tensions étouffées permettront d'abattre tous les murs – comprendre échelles de style et même de temps.

Avec Steve Noble, c'est forcément Nilssen-Love qui trouve un appui de taille : les guitares se font en conséquence agaçantes davantage et le saxophone plus virulent avant que la conversation n'engage Vandermark (son art du rebond incite ici à rebaptiser la formation : McLean Left, jeu de mot n'est pas coutume) et les batteurs dans un fantasque jeu de surenchère – voici les guitares torves faites catalyseurs de choix. Il est des abattages et des surenchères supérieures, nous disent ici Lean Left et ses deux invités.

Lean Left, Ab Baars : Live at Café Oto, Day One (Kollaps / Instant Jazz)
Enregistrement : 11 septembre 2011. Edition : 2012.
LP : A/ Day One / Set Two / Part One B/ Day One / Set Two / Part Two

Lean Left, Steve Noble : Live at Café Oto, Day Two (Kollaps / Instant Jazz)
Enregistrement : 12 septembre 2011. Edition : 2012.
LP : A/ Day Two / Set Two / Part One B/ Day Two / Set Two / Part Two
Guillaume Belhomme © Le son du grisli



Samuel Blaser : As the Sea (HatOLOGY, 2013)

samuel blaser as the sea

Ce que propose le quartet de Samuel Blaser n’est pas rien. Car si le but est de faire du présent une collecte des possibles, le pari est, ici, tenu haut la main.

Soit ne rien oublier de ce qui a nourri l’imaginaire du tromboniste, puis l’envisager, aujourd’hui, autour d’un axe collectif et partageur. Ainsi, quelques zestes du Miles électrique, de vrais morceaux de rock sonique et de jazz engagé viennent se glisser dans la partition de Blaser. De la merveilleuse polyrythmie de Gerald Cleaver en passant par les stries profondes de Marc Ducret ou le jeu pendulaire de Bänz Oester – et s’y rajoutant une parfaite maîtrise des crescendos et des déchaînements –, émerge une musique sans autre calcul que celui d’un partage généreux et, ici, densément accompli.

Samuel Blaser : As the Sea (Hatology / Harmonia Mundi)
Enregistrement : 2011. Edition : 2012.
CD : 01/As the Sea, Part 1 02/ As the Sea, Part 2 03/ As the Sea, Part 3 04/ As the Sea, Part 4
Luc Bouquet © Le son du grisli


Interview de Jac Berrocal

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Body/Head : Body/Head (Open Mouth, 2013)

kim gordon bill nace body head

Sur cassette à bande courte (Fractured Orgasm, Ecstatic Peace) et 45 tours (The Eyes, The Mouth / Night Of The Ocean, Ultra Eczema), Kim Gordon et Bill Nace ont inauguré la discographie de leur Body/Head. Le vinyle du même nom qui sort aujourd’hui, s’il a la taille d’un 33 tours, devra aussi tourner quarante-cinq fois par minute – ainsi est-il possible de supposer chez le duo un faible pour les distances réduites.

Celles-ci siéent d'ailleurs à leurs chansons défaites : corps (donc jambes) et tête comme réfléchissant à leur forme dans le même temps qu’ils les débitent, voici un vibrato grave éloignant une voix affamée de rengaines miniatures, des déflagrations et larsens emportant des mots prononcés à peine, des cris étouffés par des grilles d’ampli et puis cet expérimental indécis, qui fait le charme de l’ensemble. « Le propre du roman, c’est d’avoir pour forme son fond même », disait Maurice Blanchot. L’idée pourrait être appliquée à cette autre, que Body/Head se fait de la chanson.



Body/Head : Body/Head (Open Mouth)
Edition : 2013.
EP : A1/ Turn Me On A2/Be There Soon B1/ Take It Down B3/ Where Did You Go?
Guillaume Belhomme © Le son du grisli


Ircha Clarinet Quartet : Watching Edvard (Kilogram, 2011)

ircha watching edvard

Quatre clarinettes (Mikołaj Trzaska, Michał Górczyński, Paweł Szamburski, Wacław Zimpel), en vacances de timidité, affichent, ensemble, leurs éclats : être tour à tour aurore des mélancolies puis crépuscule frigorifiant. Entre ces deux pôles, elles vont s’innerver en unissons perçants, tirer des feux d’artifices en plein soleil, devenir souffle-paquebot, s’ébrouer en des marches imprévues.

Conciliant l’amertume et les douceurs, les voici cris d’orfraie ici, routardes de souffles flottants ailleurs. Mais la plupart du temps, partenaires et solidaires, elles ne quittent que très peu l’horizon qu’elles fixent et enfantent avec gourmandise. Et ainsi, savent se convaincre et nous convaincre que le collectif n’est en rien l’ennemi du particulier.

Ircha Clarinet Quartet : Watching Edvard (Kilogram Records / Instant Jazz)
Enregistrement : 2011. Edition : 2011.
CD : 01/ Upper Trias Caspian Fugue 02/ Ross Omak Attack 03/ Dream Analyzer 04/ No Smoking in Hell 05/ Climbing and Siding 06/ Small Dictators 07/ Kresto 08/ Re Constructive De Constructive 09/ Monastery Monsters 10/ Prince of Fiasco 11/ Builderblock.pampin 12/ Cenozoic Kenobi 13/ Watching Edward 14/ Invitation to Anorak Party 15/ Tender Dictator 16/ Last Turn Around the Room
Luc Bouquet © Le son du grisli


Colin Stetson, Mats Gustafsson : Stones (Rune Grammofon, 2012)

colin stetson mats gustafsson stones

La joute promettait d’être belle : Mats Gustafsson dans le coin gauche et Colin Stetson dans le coin droit. Au milieu, les instruments de la dispute programmée en public : un tas de saxophones alto, ténor, basse et baryton. Ca y est, la cloche sonne deux fois…

Les adversaires se tournent autour en dessinant de longues lignes au sol, Stetson semble pour le moment le plus prudent, il vocalise un peu alors que Gustafsson l’invective de front… Les voilà qui se lancent à bride abattue dans un corps à corps que malheureusement l’arbitre (invisible) interromp. Après avoir été séparés, les adversaires se cherchent de nouveau. Pas plus que leurs styles, l’idée qu’ils ont du noble art (de l’improvisation) n’est la même : Gustafsson sans filet et Stetson plus précautionneux. Si ce n’est quelques moments fortuits qui l’intéresse, le public a du mal à se concentrer sur la rencontre d’autant qu’il soupçonne quelques trucs et parfois un peu de comédie chez les belligérants.

Le corps à corps reprend heureusement, mais les coups semblent involontaires et les deux hommes se font éjecter en même temps du ring. Gustafsson vacille (on lui pardonne aux jolis petits bruits qu’il fait) et Stetson propose qu’ils fassent la paix sur une note, ce qui exige un talent de funambule, d’accord, mais le procédé est quand même facile. Au huitième et dernier round, le retournement de situation, la surprise, le public est debout, l’affrontement tient enfin ses promesses & les deux hommes montrent qu’ils cachaient bien leur jeu. Une question : pourquoi l'avoir caché si longtemps ?

Colin Stetson, Mats Gustafsson : Stones (Rune Grammofon / Instant Jazz)
Edition : 2012.
CD / LP : 01/ Stones That Rest Heavily 02/ Stones That Can Only Be 03/ Stones That Need Not 04/ Stones That Only Have 05/ Stones That Rest Heavily 06/ Stones That Can Only Be 07/ Stones That Need Not 08/ Stones That Only Have   
Pierre Cécile © Le son du grisli



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