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Le son du grisli
12 octobre 2018

Long Orme : Long Orme (Wah Wah, 2018)

long orme

A l'occasion de la parution aux éditions Lenka lente du troisième et dernier volume d'Agitation Fritele son du grisli publie, depuis dix jours, des chroniques de disques signés de musiciens français interrogés ou évoqués par Philippe Robert dans son anthologie de l'underground français. Aujourd'hui, Long Orme, que Robert chronique et qualifie dans Agitation Frite 3 d'un des secrets les mieux gardés du folk d’ici.

Il est des disques « uniques », dont on ignorait tout, et que l’on réédite. C’est le cas de Long Orme, qu’ont enregistré, au milieu des années 1970 à Grenoble, Yves Fajnberg et sa compagne d’alors, Marie Butel. Le disque a paru sous étiquette SonArt, son titre reprenant le nom que le couple s’était choisi – un intérêt pour l’arbre et un clin d’œil adressé au longhorn d’Amérique – pour servir son folk à la française.

Dans un texte qu’il a rédigé à l’occasion de cette réédition, Fajnberg revient sur l’époque où il vivait en communauté, se qualifiant lui-même de « baba cool », écoutait Bob Dylan, Leonard Cohen, Peter, Paul and Mary et, en français, Graeme Allright et Hugues Aufray. Après avoir participé à l’enregistrement de l’album Wave On de Dominique Droin, le jeune homme se laisse convaincre de consigner quelques-unes de ses chansons sur un Revox 2 pistes.

Pour la forme, ce sont une guitare folk et deux voix – celle de Fajnberg, nasillarde, sur le fil, et, en soutien, celle de Butel, aérienne et toujours juste. Pour le fond, ce sont des rengaines qui rappellent les influences citées plus haut et évoquent parfois le blues sur lesquelles se posent des textes d’une poésie naïve, certes, mais qui parfois touche. Sur Nos rêves, par exemple, qu’un orgue et quelques flûtes peaufinent ; sur Galère, aussi, qui chante des visions fantastiques où se mêlent princesses, singes à bras nus et hommes en collier ; sur Henry et Les enfants, enfin, qui en appellent à la science-fiction pour dire l’inquiétude du quotidien.

Si l’album est inégal – les arrangements de Droin pouvant parfois noyer le propos de Long Orme, quand ce n’est pas Fajnberg lui-même qui ne sait pas bien quelle tournure musicale donner à sa poésie – il est le document d’une époque révolue où les gens avaient encore « de l’encre sur les doigts » et fumaient des cigarettes qui ne laissaient pas derrière elles un parfum de verveine ou de pamplemousse. Et si, dans le même texte, Fajnberg dit avec humilité le désenchantement qui a suivi – … je ne suis pas devenu un chanteur professionnel. Timidité, manque de foi en moi et circonstances de la vie, tandis que nous savons bien des « amateurs » capables davantage que tel professionnel –, il aura démontré avec Long Orme qu’on peut faire œuvre de tourment et de tristesse sans rien attendre de la nostalgie.

Long Orme : Long Orme
Wah Wah
Edition : 2018.
Guillaume Belhomme © Le son du grisli

COUV ET BANDEAU

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