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Le son du grisli
11 août 2011

Alexander von Schlippenbach : Globe Unity (Saba, 1966)

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Ce texte est extrait du premier volume de Free Fight, This Is Our (New) Thing. Retrouvez les quatre premiers tomes de Free Fight dans le livre Free Fight. This Is Our (New) Thing publié par Camion Blanc.

Alexander von Schlippenbach, en 2005, au moment de la sortie de Monk’s Casino, coffret-relecture de l’intégrale de l’œuvre de Monk : « Je suis un musicien de jazz et je préfère appeler ma musique du free ; en tant que pianiste j’apprécie aussi bien Horace Silver que Cecil Taylor, même si la vision que ce dernier a de l’instrument me parle plus précisément. » Une fois questionné plus avant, on comprend que Schlippenbach fait allusion au fait que Cecil Taylor utilise le piano comme un balafon ou une batterie à quatre-vingt-huit toms : « Chez moi dit-il, la conception des structures mélodiques s’appuie également sur l’attaque, souvent percussive. » 

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Alexander von Schlippenbach sera très vite repéré dès lors qu’il participera à l’élaboration du label allemand FMP, en compagnie du saxophoniste Peter Brötzmann, du bassiste Peter Kowald et du (notamment) bassiste / producteur Jost Gebers. Parmi ses influences, outre le jazz, Schlippenbach cite la « tutelle » du compositeur contemporain Bernd Alois Zimmermann tragiquement disparu en 1970, avec qui il a collaboré, et dont la pièce « Requiem For A Young Poet » a été définitivement marquante. Les deux hommes partageaient une même vision plurielle / pluraliste et globale de la composition, une vision singulière où le passé, le présent et le futur fusionnent dans l’éternité de l’instant lié à l’improvisation, conception qui les rapproche, selon Schlippenbach, d’un Timothy Leary ou d’un James Joyce. Quant au jazz à proprement parler, il n’était pas étranger à Zimmermann, qui s’intéressait entre autre au quintette de Manfred Schoof au sein duquel Schlippenbach jouait du piano. 

De toutes les formations animées par le pianiste allemand, le Globe Unity Orchestra demeure l’une des plus fameuses, et l’avant-garde de l’impro européenne parait s’y être de tous temps donné rendez-vous. On l’ignore parfois, l’idée de ce grand orchestre a été mise sur pied dès 1966, en partie inspirée par les conceptions de Zimmermann, et à la suite d’une commande de la radio, à l’origine de la pièce intitulée « Globe Unity » jouée à Berlin la même année, et dont le titre a finalement donné son nom à un ensemble se réunissant régulièrement. Au départ, les musiciens rassemblés vinrent du quintette de Manfred Schoof et du trio de Peter Brötzmann, les deux batteurs étant rien moins que Jaki Liebezeit, du groupe de rock Can, et Mani Neumeier, de Guru Guru

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A l’époque, l’on compara le Globe Unity Orchestra au Jazz Composers’ Orchestra de Mike Mantler : leurs préoccupations ne s’avéraient cependant pas identiques, mais juste voisines. Dans cette performance inaugurale qu’est « Globe Unity », et à laquelle répond « Sun » ici sur la face B, quatorze musiciens, essentiellement issus du free et de différents pays européens, jouent. L’idée, selon Schlippenbach, a été d’utiliser toutes les forces en présence, de tirer un maximum des permutations d’instrumentistes possibles, sous forme de combinaisons propices à l’improvisation par affinités.

Beaucoup de ce qui s’est joué ce jour-là, au Berlin Jazz Festival, était le fruit d’arrangements couchés sur papier de manière graphique, surtout pour les accompagnements soutenant les solistes. Peu connu, l’album Globe Unity est une étape importante de la musique libre en Europe et du free jazz en grande formation ; un prolongement de ce qui a été entrepris par le double quartette d’Ornette Coleman sur Free Jazz, au diapason de son époque et d’une actualité toujours brûlante.

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